Quelles sont les expositions à voir ce week-end? Chaque vendredi, nos critiques en arts visuels proposent une tournée montréalaise de galeries et de centre d'artistes. À vos cimaises!

Luc Laporte, le poète architecte

L'architecte Luc Laporte (1942-2012) a marqué Montréal de son empreinte. On lui doit les intérieurs de restaurants renommés (L'Express, Laloux, le Café du Nouveau Monde, Leméac, etc.), mais aussi de la Société des arts technologiques. Une exposition lui est consacrée au 1700 La Poste, un lieu signé... Luc Laporte.

Pour le premier anniversaire du 1700 La Poste, le centre d'art ouvert par la mécène Isabelle de Mévius a souhaité rendre hommage à l'architecte montréalais qui avait rénové l'intérieur de cet ancien bureau de poste de Griffintown construit en 1913.

L'exposition Luc Laporte, architecte. Réalisations et inédits n'est pas seulement un regard sur ses créations et sur ses rêves mais aussi un hommage de ses amis, collègues architectes, écrivains et photographes avec lesquels il a rêvé de Montréal.

On peut y découvrir des exemples de ses réalisations, à l'aide de maquettes, de plans et de photos. L'architecte a beaucoup influencé la scène gastronomique de Montréal, y recréant l'ambiance des bistros parisiens. Avec «un goût français au sens classique de l'expression, disait-il, avec simplicité, économie de moyens et régularité.» Une photo nous le montre d'ailleurs attablé au comptoir de L'Express en 2011. Il ne manque plus que M. Masson pour lui servir un verre...

Luc Laporte a aussi signé le design du LUX, sur le boulevard-Saint-Laurent en 1983, le Pavillon des patineurs, près du bassin Bonsecours, l'intérieur de l'ex-musée Juste pour rire, la brasserie Holder, le restaurant de l'ITHQ, le restaurant Le Valois, et la SAT en 2011.

On peut aussi prendre connaissance de ses projets qui n'ont jamais vu le jour, notamment celui d'une ville imaginaire sur l'île Saint-Barnabé, près de Rimouski. Une ville dont on peut voir l'aspect sur une grande maquette posée sur une table.

Dans une petite pièce, on a reconstitué son atelier du 264, Carré Saint-Louis avec des photos et des objets lui ayant appartenu tels son fauteuil, ses règles et sa lampe d'architecte.

Théâtre de marionnettes

Et surtout, Isabelle de Mévius a fait construire, au centre de la salle principale, un théâtre de marionnettes en bois pour célébrer l'amour que portait Luc Laporte au théâtre et aux enfants. «Quand il allait en France, il aimait aller dans les parcs et restait fasciné devant les théâtres de marionnettes tels que Guignol», explique Roger Lupien, directeur administratif du 1700 La Poste.

Ce petit théâtre, qui comprend deux allées pour s'asseoir, a été conçu par les derniers collaborateurs de Luc Laporte, soit Louise Koo, Martin Bégin et Martin Vincent, qui ont terminé le projet 1700 La poste après son décès en mars 2012. Ils l'ont construit à partir de croquis de théâtres d'enfants que Luc Laporte avait dessinés.

Sur la scène du théâtre, un film de 24 minutes défile sur un écran devant lequel une figurine s'anime grâce à une projection vidéo, une réalisation de Denis Marleau et Stéphanie Jasmin, du théâtre Ubu. C'est le comédien Carl Béchard qui a prêté sa voix à cette animation, récitant des poèmes et des exercices de style de Prévert, La Fontaine, Cendrars et Queneau, des auteurs que Luc Laporte appréciait.

«Stéphanie Jasmin et Denis Marleau sont allés dans son atelier et ont vu ces livres de poésie alors ils s'en sont inspirés pour la marionnette qui a un costume en noir et blanc, comme Luc», explique M. Lupien.

«L'exposition est une intégration de qui était Luc, lui qui est parti trop vite, ajoute Isabelle de Mévius. Ses collègues avaient envie qu'on fasse quelque chose. Et lui voulait qu'on ramène sa maquette de Rimouski. J'ai l'impression que maintenant, on a bien compris qui il était et on parvient à goûter à toutes ses facettes.»

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Luc Laporte, architecte. Réalisations et inédits, au 1700 La Poste, 1700, rue Notre-Dame Ouest. Jusqu'au 4 janvier, du mercredi au samedi de 11h à 17h.

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PRÉCISION: Lors de sa parution initiale, nous avons indiqué que la présente photographie avait été fournie par le Centre d'art La Poste. Il aurait fallu également inclure le nom du photographe André Cornellier dans les crédits. Nos excuses.



La collection Argillet à Montréal

Mort en 2001, le photographe et collectionneur français Pierre Argillet était l'éditeur du mouvement surréaliste. Ami de Salvador Dalí, il amassa une importante collection d'oeuvres de l'artiste catalan. Une partie de cette collection est présentée au public lors d'une expo-vente à la galerie d'art Ambiance, dans le Vieux-Montréal, jusqu'au 9 novembre.

Pierre Argillet avait créé un musée du surréalisme dans son château français dans les années 70. L'affluence de visiteurs ayant été limitée, il décida de faire voyager sa collection d'oeuvres d'art contemporaines, dadaïstes et surréalistes, notamment celles de Salvador Dalí.

C'est sa fille, Christine Argillet, qui poursuit cette tâche et, après plusieurs villes américaines, elle a apporté à Montréal une centaine de gravures originales sur cuivre, deux aquarelles et deux tapisseries d'Aubusson du grand maître du surréalisme. La valeur des oeuvres varie entre 5000 $ et 595 000 $.

Au-delà du prix, c'est un plaisir rare que de voir de nos propres yeux ces pièces authentiques de Salvador Dalí. Parsemée de photos où l'artiste est pris en compagnie de Mme Argillet lorsqu'elle était jeune, l'expo-vente est présentée selon une dizaine de sections.

Dans Tauromachie surréaliste, une gravure de 1966 présente une scène de corrida où les toreros ont des têtes de poissons et le taureau une tête humaine barbue. Un homme dont le front saigne a, à la place des yeux, un de ces fameux tiroirs de Dalí qui symbolisent son subconscient.

Dans la section Gravures individuelles, on notera le nu Diane de Poitiers, où la favorite d'Henri II est représentée à la chevelure ébouriffée alors que la comtesse portait toujours ses cheveux serrés sur la tête! Et surtout une très originale Marilyn Monroe dont le corps nu est parsemé de clous noirs menaçants.

Les 19 gravures de la série Faust sont impressionnantes avec notamment Le veau d'or, où l'animal décharné difforme et lubrique a la langue pendue et le sexe en tornade.

On reconnaît dans Spectre à la Rose tout l'univers magique de Dalí avec sa façon dépouillée d'évoquer des personnages et des situations.

Sept gravures forment la section Poèmes secrets d'Apollinaire dont Les tranchées où l'on retrouve ses fourmis et ses fameux cadrans déformés. De la présence humaine, il ne reste que des os et un oiseau sombre qui semble exploser.

Les 15 grandes gravures de la section Mythologies sont parmi les plus belles (et donc les plus chères) avec sa Naissance de Venus et son Vol et chute d'Icare, tout en traits aériens comme il se doit. Dans Thésée et le Minotaure, le monstre a un air libidineux tandis qu'il se tient à la cuisse de Thésée.

On peut aussi admirer deux aquarelles de Dalí, notamment son Dessin de Don Juan, magnifique esquisse d'un riche et jeune Espagnol avec cape et épée. Grand, fin et élancé mais dont la tête est comme une tornade vide... La galerie vend aussi deux tapisseries d'Aubusson intitulées Nu à la Jarretière (la femme est nue de dos au milieu d'un champ où poussent quelques fleurs) et Femmes-Fleurs au piano.

L'exposition est à voir, assurément. Dommage que les dates de création des oeuvres ne soient pas précisées sur les cartels. Un catalogue raisonné sur les oeuvres de Dalí est toutefois offert pour les visiteurs.

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Oeuvres de Salvador Dalí de la collection Argillet à la galerie d'art Ambiance, 81, rue Saint-Paul Est. Jusqu'au 9 novembre.

Photo: Patrick Sanfaçon, La Presse

L'expo-vente Salvador Dalí à la galerie Ambiance.

Les autres expos à voir

> LISA REIHANA

De la visite lointaine à la galerie Articule! L'artiste néo-zélandaise et maorie Lisa Reihana propose de vous faire découvrir ses oeuvres vidéo, ses photographies et ses animations qui traitent de questions sociales, politiques et culturelles. L'artiste examine les thèmes traditionnels maoris de l'esthétique, de la mythologie, de la philosophie et de la pédagogie à partir de la culture contemporaine.

Chez Articule, 262, rue Fairmount Ouest. Jusqu'au 16 novembre.

> DAVID NASH/CAROL BERNIER

La galerie Simon Blais présente jusqu'au 15 novembre deux expositions en parallèle. D'abord les sculptures et dessins du Britannique David Nash créés de 1987 à 2013 en s'inspirant du bois, sa matière de prédilection. Et dans une autre salle, les grandes peintures de la Montréalaise Carol Bernier, des oeuvres «atmosphériques» qui évoquent des éléments qui s'entremêlent.

À la galerie Simon Blais, 5420, boulevard Saint-Laurent. Jusqu'au 15 novembre.

> LÉON BELLEFLEUR

Il ne vous reste que deux semaines pour aller admirer les oeuvres de Léon Bellefleur à la galerie BAC qui consacre une rétrospective au peintre et graveur montréalais mort en 2007. L'exposition d'une vingtaine d'oeuvres couvre la période allant du début des années 30 jusqu'à la fin des années 90, avec des peintures parfois inédites allant de l'académisme à l'abstraction en passant par le surréalisme.

À la galerie BAC 6341, boulevard Saint-Laurent. Jusqu'au 15 novembre.

> KAREN TRASK

La salle Alfred-Pellan de la Maison des arts de Laval propose jusqu'au 16 novembre l'exposition L'ombre et la forme, des oeuvres de Karen Trask réalisées entre 1995 et 2014. Les sculptures, images photographiques, installations vidéo, textes et oeuvres sur papier fait main sont mis en espace par la commissaire Nicole Gingras.

À la Maison des arts de Laval, 1395, boulevard de la Concorde Ouest, Métro Montmorency. Jusqu'au 16 novembre.



Photo: fournie par la galerie

Lisa Reihana explore la culture maorie à travers ses oeuvres vidéo, ses photographies et ses animations.