Pour une deuxième année, Hochelaga-Maisonneuve vibre sur les ondes de l'art contemporain. L'exposition Projet HoMa II: Les espaces réciproques, organisée jusqu'au 22 juin à la Maison de la culture Maisonneuve et jusqu'au 24 juillet à la Fondation Guido Molinari, présente les rayons de lumière que sont 16 artistes visuels du quartier.

Ils habitent ou travaillent dans Hochelaga-Maisonneuve. Certains sont établis, comme Raymonde April, Daniel Langevin ou Massimo Guerrera. D'autres ont déjà été effleurés par la notoriété, comme Laurent Lamarche, Stéphane Gilot, Louis Bouvier, Pierre-Yves Girard, Isabelle Guimond, Mathieu Cardin ou Éric Lamontagne. Enfin, Élise Provencher, David Gagnon, Simon Gaudreau, Danny Gaudreault, Katherine-Josée Gervais et le collectif Les enfants de chienne font partie des nouveaux électrons réactifs de l'atome artistique montréalais.

La commissaire Ève Dorais les a réunis autour de la notion de territoire et d'espace, tant naturels qu'habités et tant extérieurs qu'intérieurs. Cela donne une expo bigarrée de peintures, dessins, photos, sculptures, vidéos et performances.

À la Maison de la culture Maisonneuve, les fenêtres du rez-de-chaussée ont été, à dessein, recouvertes de draperies noires pour évoquer l'ex-bunker des Hells du coin, sujet abordé par Les enfants de chienne, groupe d'artistes visuels très «champ gauche» au contenu in situ plutôt véniel sur les motards criminels.

Simon Gaudreau présente dans la salle contiguë son film documentaire King of the l'Est, sur le rappeur d'Hochelaga C-Drik, un portrait poétique, humain et urbain. À l'étage, on admire plusieurs oeuvres d'Isabelle Guimond consacrées au thème des rebuts déposés dans la rue, dans un style éclatant de couleurs qui donne parfois à la réalité crue une tenue d'abstraction.

À côté des aquarelles et graphite de Stéphane Gilot, dont l'univers mêle architecture, cartographie et fantastique - une facture originale, peut-être un peu fade dans les tons -, Massimo Guerrera présente une nouvelle toile dans des nuances de sépia. Tout près, coup de coeur pour Le scalp de Pierre-Yves Girard, oeuvre d'huiles et de gesso élégante, très travaillée et au cachet mystérieux titillant l'imaginaire.

Dans la salle du Cube, à côté d'une abstraction polychrome de Daniel Langevin et d'une installation de Stéphane Gilot, autre coup de coeur pour les sculptures d'Élise Provencher qui évoquent Shary Boyle et Valérie Blass. La sculpture Marie Shelley, en référence à la romancière qui a créé Frankenstein, est constituée d'une longue chevelure noire et, en lieu et place du visage et du corps, d'un magma de figures humaines et animales sculptées dans le plâtre. Étrange et bien fait.

À la Fondation Molinari

L'exposition se poursuit à la Fondation Guido Molinari. Au rez-de-chaussée, la fresque La maison où j'ai grandi dévoile trois rangées de photos d'archives et de prises de vue de Raymonde April provenant de la région de Rivière-du-Loup où elle a vécu jeune. Les photos parlent du temps qui passe, comme pour cette maison où les fissures et le treillis n'ont pas changé, malgré les années.

Sur le mur d'à côté, on trouve deux oeuvres de Louis Bouvier - une dans le style pop art, l'autre, magnifique de précision, exécutée au crayon de plomb, tout comme ses colonnes antiques retenues pour illustrer l'affiche de l'exposition.

Très belle oeuvre également que Nostalgie urbaine, une vue du Plateau Mont-Royal mi-réelle mi-rêvée par Éric Lamontagne, génie de la perception.

L'ancien coffre-fort de l'ex-édifice bancaire a été maquillé par l'installation lumineuse Diffraction que Laurent Lamarche a déjà présentée chez Art mûr. Six rayons laser rouges transpercent un objet en résine jouant le rôle d'un cristal. La diffraction des rayons crée des filets qui se reflètent telles des aurores boréales sur les murs de l'espace. Belle idée esthétique qui rappelle le réseau réciproque de la cristallographie.

Il ne faut pas manquer non plus, au premier étage, les oeuvres singulières de David Gagnon, le gâteau de retailles de crayons de Louis Bouvier et l'installation anamorphique sur l'envers du décor de Mathieu Cardin, de la même eau que celle exposée l'hiver dernier à Art souterrain. Mais cette fois-ci la causeuse traverse l'écran. Les cristaux de quartz poussent même dans les cadres de bois. L'imagination de Mathieu Cardin n'a pas de frontières. Tant mieux pour nous.

À la Maison de la culture Maisonneuve jusqu'au 22 juin; à la Fondation Guido Molinari jusqu'au 24 juillet.