(Ottawa) Doug George-Kanentiio, qui a subi les pensionnats pour Autochtones, demande au gouvernement fédéral de participer à la création d’un musée national permanent qui préserverait la mémoire collective des peuples autochtones.

« Nous, les survivants, serons là pour guider les gens vers cette réconciliation », a déclaré jeudi M. George-Kanentiio, depuis une scène sur la colline du Parlement, lors de la cérémonie marquant la toute première Journée nationale de la vérité et de la réconciliation au Canada.

M. George-Kanentiio a raconté à la foule la triste histoire de son ami Joey Commanda, tué par un train en 1968 alors qu’il s’échappait du pensionnat « Mohawk Institute » de Brantford, en Ontario.

M. George-Kanentiio a participé en août à la « Marche pour Joey » et il a soutenu jeudi que cet évènement avait été un véritable baume, car le ministre des Services aux Autochtones, Marc Miller, et la ministre des Relations Couronne-Autochtones, Caroline Bennett, y ont participé non pas pour des raisons politiques, mais parce qu’ils « sentaient au fond d’eux-mêmes qu’il fallait le faire ».

« C’est à ce moment-là (que) l’histoire du Canada a commencé à changer », a déclaré M. George-Kanentiio, jeudi. Il espère maintenant que les ministres Miller et Bennett, avec le premier ministre Justin Trudeau, sont prêts à entendre les appels des survivants pour des gestes « tangibles », y compris des enquêtes criminelles et des poursuites concernant les agressions et la mort de centaines d’enfants dans ces sinistres pensionnats partout au Canada.

« Chaque site de pensionnat, 130 d’entre eux, doit être déclaré “lieu criminel’’, un endroit où les crimes les plus graves ont été commis contre ces enfants, a déclaré M. George-Kanentiio. Chaque emplacement doit être protégé. »

Un musée autonome et permanent

M. George-Kanentiio a reçu les applaudissements les plus nourris lorsqu’il a déclaré que les survivants souhaitaient « un musée national autochtone autonome, avec un volet pensionnats ».

« Nous ne voulons pas d’une salle dans le musée de la culture et de l’histoire canadienne : nous ne serons pas encore refoulés dans un coin, a-t-il lancé. Nous voulons notre propre musée. »

M. George-Kanentiio, Mohawk d’Akwesasne, à la frontière entre le Québec, l’Ontario et l’État de New York, a été administrateur au « National Museum of the American Indian » de Washington. Il a raconté jeudi que la vision de ce musée, qui a ouvert ses portes en 2004, n’est partie de rien. Mais « nous l’avons fait parce que nous avions cette conviction, qui est devenue une obligation morale, que nous allions construire un musée national littéralement installé à l’ombre du Capitole.

« Rien de moins ne devrait être fait ici au Canada, a-t-il déclaré jeudi, alors que la foule hurlait son approbation. Nous avons besoin de cette institution pour préserver notre patrimoine, rassembler nos souvenirs et veiller à ce que les Canadiens de la septième génération se souviennent de cette partie de notre expérience commune. »

Actuellement, le Centre national pour la vérité et la réconciliation conserve en archives tous les documents et les récits oraux collectés par la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Ces archives sont présentement hébergées à l’Université du Manitoba, mais les libéraux ont promis de financer la construction d’une « maison permanente » pour ce centre. Ils ont promis dans leur plateforme électorale une enveloppe de 60 millions $ pour l’exercice 2022-2023, puis 5 millions $ par année en budget de fonctionnement.

Des expositions sur les pensionnats sont également présentées dans plusieurs musées du pays, dont le Musée canadien pour les droits de la personne, à Winnipeg, et le Musée canadien de l’histoire, à Gatineau. Mais le Canada ne dispose pas de musée national consacré aux premiers peuples et conçu par eux.