(Montréal) La Coalition des associations de consommateurs du Québec (CACQ), qui regroupe une vingtaine d’organismes, organise « une action d’envoi de courriels massif au gouvernement du Québec » pour qu’il enclenche les procédures de débat public autour d’un projet de loi qui protégerait les citoyens contre l’obsolescence programmée.

En février dernier, la porte-parole de l’opposition officielle pour la protection des consommateurs, Marwah Rizqy, a présenté à l’Assemblée nationale un projet de loi visant à lutter contre l’obsolescence programmée et faire valoir le droit à la réparation des biens.

Une telle loi viserait à mettre fin aux pratiques de certains fabricants qui réduisent de façon volontaire la durée de vie utile de leurs produits afin d’augmenter la fréquence de rachats de la part des consommateurs.

« Ça fait longtemps qu’on attend une loi comme ça », indique la directrice générale de la CACQ Laurence Marget, en précisant qu’un projet de loi semblable avait été déposé en 2019 avant de mourir au feuilleton.

« Le gouvernement ne semble pas vouloir donner suite » au projet de loi 195 déposé par les libéraux, selon Laurence Marget, qui « demande aux citoyens d’envoyer des lettres au ministre de la Justice », Simon Jolin-Barrette, car « c’est lui qui peut pousser ce projet-là ».

La directrice générale de la CACQ admet qu’il est difficile de prouver qu’un fabricant réduit délibérément la durée de vie d’un produit, mais le projet de loi 195 comporte également « une partie sur le droit à la réparabilité des biens, et ça, c’est super important », selon elle.

Le projet de loi 195 viendrait modifier la Loi sur la protection des consommateurs « afin d’assurer que les pièces de rechange, les outils et les services pour la réparation d’un bien soient rendus disponibles à un prix raisonnable ».

En entrevue avec La Presse Canadienne, la directrice de la Coalition des associations de consommateurs du Québec souligne que l’obsolescence programmée coûte très cher aux ménages, surtout dans un contexte d’inflation.

Elle fait notamment référence aux grille-pains qui se retrouvent dans les sites d’enfouissement, car ils ont une durée de vie très courte, ou encore aux fabricants de téléphones cellulaires qui demandent à leurs clients de télécharger des mises à jour qui finissent par ralentir le fonctionnement des appareils.

« Le consommateur n’est plus capable de l’utiliser ou alors le téléphone devient très lent, donc les personnes vont se racheter un téléphone cellulaire. C’est la même chose pour les câbles pour les recharger, souvent, ils ont une durée de vie très faible », souligne Laurence Marget.

En 2021, la Cour d’appel du Québec avait autorisé une action collective contre Apple après que le géant américain eut reconnu avoir ralenti le rendement de certains iPhone. La compagnie avait aussi admis des limites de durée de vie des piles des appareils.

Le budget fédéral prévoit le droit à la réparation

Lors du budget 2023 présenté par le gouvernement fédéral en mars dernier, le gouvernement a promis d’introduire, au cours de la prochaine année, un « cadre ciblé » décrivant le droit des Canadiens de réparer leurs appareils électroménagers et électroniques qui sont défectueux, au lieu de toujours devoir les remplacer.

« Nous trouvons important que le gouvernement du Québec se dote également de son propre cadre législatif pour répondre à la spécificité québécoise » et « nous croyons que le droit à la réparabilité des biens aura un impact plus fort s’il est également dans la Loi de la protection du consommateur », précise Laurence Marget.

La CACQ souligne également que l’obsolescence programmée nourrit la surconsommation et provoque une intensification de l’exploitation de ressources primaires, au détriment de l’environnement.

En 2020, un rapport des Nations unies révélait que les déchets électroniques produits sur Terre avaient dépassé les 50 millions de tonnes en 2019, et que cette abondance de déchets constitue un danger pour la santé et l’environnement. Le rapport onusien soulignait que l’obsolescence programmée aggravait cette situation.