Contrairement aux autres grandes villes du pays, Montréal et Québec disposent d’un parc de logements privés abordables significatif pour les ménages à faibles revenus, selon un nouvel indicateur préparé par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL).

Dans l’inventaire des logements privés situés dans des bâtiments offrant trois logements locatifs ou plus dans la région montréalaise, 23 % des logements sont offerts à un loyer inférieur à 750 $ par mois, ce qui correspond à moins de 30 % du revenu avant impôt pour les ménages les plus pauvres.

« Le premier indicateur mesure la part des logements qui sont abordables pour les locataires dans le quintile [20 %] des revenus les plus faibles. Pour qu’un logement soit considéré comme abordable, son loyer doit être inférieur à 30 % du revenu avant impôt du ménage », écrit dans un blogue paru le 22 juin l’économiste en chef adjoint Kevin Hughes.

À Québec, c’est le quart des logements privés qui entre dans cette catégorie. En revanche, à Toronto et à Ottawa, c’est près de 0 % ; à Vancouver, 1 % ; à Gatineau, 8 %.

« Ce que nous révèle cette première mesure est pour le moins préoccupant, poursuit M. Hughes dans son billet. Comme le montre la figure [ci-dessus], les ménages les moins nantis ont accès à une très faible part du parc locatif. Dans les grands centres, exception faite de Québec et de Montréal, la part du marché qui est abordable pour les ménages à faible revenu est inférieure à 5 %. Elle se chiffre à 1 % à Vancouver et est quasi nulle dans les villes de l’Ontario. »

Dans un entretien avec La Presse, M. Hughes se défend de vouloir minimiser la crise de l’abordabilité du logement au Québec. « On ne formule pas de jugement là-dessus, dit-il. On rapporte seulement la comparaison entre les grandes villes au pays. Au plan relatif, le pourcentage est supérieur. En revanche, la situation à Montréal et à Québec, prise dans son ensemble, a ses défis et on ne fait pas abstraction de ça du tout. »

Près de 145 000 logements à moins de 750 $ par mois

La proportion de 23 % dans la région métropolitaine de recensement de Montréal correspond à 143 400 logements dont le loyer mensuel ne dépasse pas 749 $.

Travaillant avec les données de son enquête annuelle sur les logements locatifs, la SCHL exclut de son indicateur les HLM, les logements d’organismes sans but lucratif et les ménages subventionnés.

Le parc locatif de Montréal et de Québec se distingue de celui du reste du pays, explique M. Hugues, pour trois raisons : il est plus profond, il est plus âgé et il est constitué en bonne partie de logements de basse densité en bois et en brique qui sont généralement de moindre qualité, donc moins chers, par rapport aux logements dans des tours en acier et en béton que l’on retrouve généralement ailleurs au pays.

Pour le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec, l’indicateur de la SCHL donne un portrait d’un certain segment de l’offre de logements locatifs sans s’intéresser aux besoins des locataires.

Son co-porte-parole, Martin Blanchard, cite Centraide, qui estime qu’en 2022, 360 000 ménages (environ 19 % des ménages) du Grand Montréal auraient un revenu résiduel négatif s’ils vivaient dans un logement du marché et subvenaient à leurs besoins essentiels (nourriture, vêtements, transport et autres).

Il souligne en outre que la proportion de locataires habitant un logement subventionné est plus élevée à Toronto (14,6 %) qu’à Montréal (8,2 %), d’après des données publiées en 2019 par la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM).

Selon des chiffres de 2021 diffusés par la CMM, on dénombre près de 83 000 logements sociaux et communautaires, ce qui inclut les ménages qui bénéficient du Programme de supplément au loyer sur le marché privé.

Les logements subventionnés tels qu’ils sont définis par Statistique Canada incluent « les logements dont le loyer est déterminé en fonction du revenu, les logements sociaux, les logements sans but lucratif, les habitations à loyer modique, les logements bénéficiant de programmes gouvernementaux d’aide au logement et les logements dont les occupants bénéficient de suppléments au loyer ou d’allocations au logement ».

En savoir plus
  • 1520 $
    Loyer mensuel moyen d’un appartement de deux chambres à Ottawa sans roulement de locataire. À Montréal, c’est 963 $.
    Source : Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2022