Un regroupement de propriétaires a mis de l’avant, mardi, 24 propositions pour sortir le Québec de la crise du logement. Jeudi, c’est l’organisme Vivre en ville qui lancera un registre des loyers à la disposition du public. De quoi nourrir la réflexion du gouvernement de François Legault sur des pistes de réforme.

La Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ) a mandaté la firme économique Aviseo Conseil pour poser « un regard sur le marché locatif qui évite les clichés », soutient-elle.

Au chapitre des constats, l’étude mentionne qu’un ménage locataire sur deux est formé d’une seule personne au Québec. Elle rappelle que c’est au Québec que les loyers sont les moins élevés au pays et que le ratio loyer/revenus y est bien inférieur qu’en Ontario.

Le document propose 24 pistes de solution. Sans surprise, cinq propositions portent sur la réforme du règlement sur la fixation des loyers, le cheval de bataille de la CORPIQ depuis des années. Le but est de rendre l’environnement réglementaire attrayant pour l’investissement immobilier.

Le rapport d’Aviseo s’intéresse longuement à la construction de logements. Il estime à 16 300 unités le déficit de logements requis pour retrouver un taux d’inoccupation au seuil d’équilibre, soit 3 %.

D’ici 2031, les besoins s’élèvent à 130 000 logements, selon Aviseo, dont plus de la moitié hors de la région montréalaise. En conséquence, les efforts de construction devront être mieux répartis à travers la province, insiste son auteur, l’économiste Jean-Pierre Lessard.

« Les besoins d’ici 2031 représentent une moyenne de moins de 13 000 logements par année, soit l’équivalent de 62 % de l’ajout au marché primaire entre 2012 et 2021 », lit-on dans les faits saillants du rapport dévoilé mardi.

Cela dit, le nombre de 130 000 logements paraît faible dans le contexte migratoire actuel où les travailleurs temporaires affluent dans la province.

L’an passé, la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) estimait que le nombre de mises en marché devrait doubler dans les prochaines années pour que le marché résidentiel redevienne abordable.

« Notre prémisse est différente, explique M. Lessard. La SCHL parle d’une suroffre pour rendre le marché abordable. De notre côté, nous estimons le nombre de nouveaux logements requis pour atteindre le point d’équilibre, soit un taux d’inoccupation de 3 %. »

Autres recommandations

Autrement, le rapport commandé par la CORPIQ suggère de mieux encadrer les évictions de locataires, de hausser les seuils de remboursement de la TVQ et de la TPS pour les logements neufs, d’éliminer les exigences minimales de stationnements qui font augmenter le coût du logement et de mieux encadrer l’hébergement temporaire de type Airbnb. Quatre propositions s’intéressent par ailleurs aux logements sociaux. L’étude suggère notamment de louer les terrains au lieu de les vendre.

Pour éviter l’inflation dans les loyers, Aviseo demande aux 136 villes qui imposent un taux différencié plus élevé sur les immeubles de plus de cinq logements de cesser cette pratique. La hausse des taxes foncières peut être en effet entièrement refilée aux locataires en fonction des règles actuelles de fixation de loyer.

Dans le lot des propositions, la suggestion de cesser de favoriser l’accession à la propriété surprend dans le contexte où le Québec a déjà la plus faible proportion de propriétaires parmi les 10 provinces et que le taux de propriété a recommencé à décliner ces dernières années avec le vieillissement des baby-boomers. La supériorité de la propriété comme facteur d’enrichissement d’un ménage repose sur un mythe, démontre Aviseo.

« Dans le cas d’une copropriété au prix moyen localisée à Montréal par rapport à un logement locatif de trois chambres au loyer moyen, les scénarios favorisent majoritairement les locataires. Le graphique ci-après présente le cas d’une copropriété achetée à Montréal en 2008 dont on simule la vente entre 2009 et 2021. Il appert que le propriétaire est dans tous les cas perdant financièrement sauf lorsque le niveau d’épargne est de 20 % et pour des ventes en 2020 et 2021 », lit-on dans le rapport.

En conséquence, Aviseo recommande d’élargir l’admissibilité aux programmes de subventions à la rénovation aux propriétés à revenus et pas seulement aux logements de propriétaire-occupant comme c’est le cas depuis longtemps.

« Ces 24 mesures contribueront à rendre l’immobilier locatif attractif, à faciliter l’ajout d’une offre diversifiée et à aider ceux qui en ont le plus besoin », soutient la firme d’économistes.

Jeudi, on en saura davantage sur le registre des loyers de Vivre en ville. Sa mise en ligne sera accompagnée d’un sondage Léger faisant le portrait exhaustif des locataires québécois en 2023.