Les gants sont tombés. Le propriétaire du centre commercial Fairview Pointe-Claire traîne la Ville de Pointe-Claire devant les tribunaux à la suite de sa décision de geler le projet de transformation de l’établissement jusqu’à l’adoption d’un nouveau plan d’urbanisme.

« En raison du gel déraisonnable et injustifié de notre développement en cours, le centre commercial Cadillac Fairview Pointe-Claire n’a malheureusement pas d’autre option que de lancer des procédures judiciaires contre la Ville pour préserver nos droits », dit Brian Salpeter, vice-président principal au développement de Cadillac Fairview (CF), dans un entretien.

Cadillac veut transformer la partie sud-ouest du gigantesque stationnement du mail commercial en un projet à vocation multiple à dominante résidentielle.

Incrédule quant à la tournure récente des évènements, Brian Salpeter soutient travailler de concert avec la ville de la banlieue ouest de l’île de Montréal depuis six ans en vue de transformer son actif.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Brian Salpeter, vice-président principal au développement de Cadillac Fairview

La société immobilière dit avoir reçu de la Ville le 28 mai 2021 un projet d’entente de développement relatif à son projet. CF avance en outre qu’elle a déposé une demande d’approbation de plans d’implantation et d’intégration architecturale (PIIA) en juillet 2021.

« Le Projet est conforme aux orientations du PPU [plan particulier d’urbanisme concernant le secteur du mail commercial adopté par la Ville en 2018] et aux règlements municipaux d’urbanisme », avance Cadillac Fairview dans sa requête signifiée le 9 mars. Son projet devait être présenté, dit-elle, devant le comité consultatif d’urbanisme (CCU) le 14 mars suivant.

Que s’est-il passé ?

Le 8 février dernier, le conseil municipal de Pointe-Claire a adopté une résolution de contrôle intérimaire qui, selon CF, « prohibe la construction de tout développement résidentiel » et « limite de façon drastique toute autre forme de développement » sur sa propriété.

Le 8 mars, le conseil déposait cette fois un avis de motion visant l’adoption d’un règlement de contrôle intérimaire afin de remplacer, jusqu’à l’adoption d’un nouveau plan d’urbanisme, la résolution de contrôle intérimaire dont l’effet est limité à 90 jours.

La volte-face de l’administration municipale intervient après l’élection de Tim Thomas à l’hôtel de ville de Pointe-Claire. Celui-ci a battu en novembre dernier le maire sortant, John Belvedere.

La dernière campagne électorale s’est jouée entre deux visions : « Pointe-Claire, ville-jardin » et « Pointe-Claire, centre-ville ». « C’est la ville-jardin qui a gagné, nous a dit le nouveau maire en février. On adore les business et les projets commerciaux, mais pas les tours de condos », avait-il ajouté à cette occasion. Selon lui, il s’est construit trop de tours résidentielles qui empirent la congestion routière dans les rues de sa ville. Elles sont attirées par la mise en service prochaine du Réseau express métropolitain (REM), qui s’arrêtera à Fairview Pointe-Claire.

Lisez l’article « Pointe-Claire met le holà à la construction de tours résidentielles »

Mercredi, la Ville a confirmé la réception de la requête, sans la commenter. « La Ville a été signifiée d’une demande de pourvoi en contrôle judiciaire. Cette demande est en analyse par nos procureurs. Par respect pour le processus, nous commenterons une fois cette étape terminée », a écrit Marie-Pier Paquette-Séguin, directrice des communications.

Centre commercial en voie de transformation
  • Le projet de transformation concerne la partie sud-ouest du stationnement.

    PLAN FOURNI PAR CADILLAC FAIRVIEW

    Le projet de transformation concerne la partie sud-ouest du stationnement.

  • La nouvelle place publique envisagée aurait la superficie de la place d’Armes, dans le Vieux-Montréal.

    ILLUSTRATION FOURNIE PAR CADILLAC FAIRVIEW

    La nouvelle place publique envisagée aurait la superficie de la place d’Armes, dans le Vieux-Montréal.

  • Vue du niveau de la rue

    ILLUSTRATION FOURNIE PAR CADILLAC FAIRVIEW

    Vue du niveau de la rue

  • L’allure actuelle du stationnement

    PHOTO FOURNIE PAR CADILLAC FAIRVIEW

    L’allure actuelle du stationnement

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Dans sa demande de pourvoi en contrôle judiciaire, CF demande à la Cour d’invalider l’article 4 de la résolution du 8 février et de lui rendre inopposable l’article 5 de cette même résolution qui l’empêche d’aller de l’avant avec son projet. Elle demande aussi au tribunal d’obliger la Ville à reprendre le processus d’approbation de son PIIA, étape cruciale pour la réalisation de son projet.

Filiale immobilière de la caisse de retraite des enseignants de l’Ontario (Teachers’), Cadillac Fairview a construit le Centre Fairview en 1965 et en est propriétaire depuis cette date.

Les mails commerciaux ont été mis à mal dans les dernières années avec la montée en puissance du commerce en ligne. La maladie a pris de l’ampleur pendant la pandémie, qui a forcé le confinement des consommateurs pendant de longues semaines. Les propriétaires tentent de redonner de la valeur à leurs galeries marchandes en construisant des logements en hauteur sur une partie de la propriété. Le but est de stimuler l'affluence en ajustant la liste des locataires vers davantage de services de proximité.

À Fairview Pointe-Claire, le promoteur veut condamner un stationnement extérieur de 900 cases en bordure de l’autoroute 40 et à proximité de la future gare du REM pour ériger trois tours résidentielles autour d’une place publique de la taille de la place d’Armes, dans le Vieux-Montréal. La première tour de 20 étages devait accueillir une résidence pour personnes âgées de 435 logements. Les deux immeubles locatifs de 25 étages compteraient au total 445 appartements. Le projet prévoit aussi un stationnement intérieur étagé. Le montant de l’investissement n’a pas été précisé.