Les « fonds verts » ont-ils encore la cote chez les investisseurs, après une première moitié d’année très difficile sur les marchés financiers ?

Oui, mais à condition de bien gérer le rehaussement des attentes des investisseurs en matière de responsabilité environnementale et de développement durable, constatent des experts-conseils en placement consultés par La Presse.

« Après quelques années très fortes pour les fonds d’investissement à thème environnemental, dans un contexte où presque tous les concepts émergents attiraient des masses de capitaux en Bourse, les derniers mois ont lancé un rappel à l’ordre à l’encontre des placements plus spéculatifs et conceptuels qui avaient pris beaucoup de poids dans les actifs et le rendement de certains fonds verts », affirme François Bourdon, associé-directeur à la firme SMS (Sustainable Market Strategies).

Cette firme montréalaise est spécialisée en analyse-conseil de placements aux normes ESG (environnement-société-gouvernance) auprès des gestionnaires d’actifs financiers.

PHOTO FOURNIE PAR SUSTAINABLE MARKET STRATEGIES

François Bourdon, associé-directeur chez SMS (Sustainable Market Strategies)

Manifestement, on n’est plus dans un marché où le moindre concept à consonance verte ou environnementale pouvait être rapidement et hautement valorisé parmi les investisseurs, et donc les gestionnaires de fonds verts.

François Bourdon, associé-directeur chez SMS (Sustainable Market Strategies)

Intérêt des jeunes

« En contrepartie, la demande pour des placements et des fonds bien gérés en matière de responsabilité environnementale et de développement durable demeure très importante parmi les gestionnaires d’actifs financiers. Et dans le marché des particuliers, la demande pour des placements verts demeure la plus forte chez les jeunes. Ils sont mieux informés en matière d’investissement durable et responsable, mais aussi plus exigeants envers la gestion et le contenu des fonds verts, au-delà de leur message marketing », souligne M. Bourdon, qui était auparavant chef de la stratégie de placement à la firme montréalaise Fiera Capital, qui a 173 milliards en actifs sous gestion.

Ses observations sur l’intérêt persistant des gestionnaires de portefeuille pour les placements alignés sur l’environnement et le développement durable trouvent écho dans les résultats du plus récent relevé semestriel effectué par la firme montréalaise Millani, spécialisée en services-conseils aux normes ESG pour les investisseurs et les entreprises.

D’après ce relevé réalisé auprès de 37 investisseurs institutionnels au Canada, qui accumulent 5000 milliards d’actifs sous gestion, en dépit des tumultes dans les marchés financiers, la très grande majorité des répondants (97 %) indiquent qu’ils n’avaient pas modifié leur approche en matière d’intégration des critères ESG dans leur stratégie de placement. Millani rapporte aussi que « beaucoup d’entre eux ont même mis davantage l’accent sur l’engagement » en matière de critères ESG auprès des entreprises où ils investissent.

Par ailleurs, parmi les critères ESG recherchés par les grands investisseurs, ceux liés aux changements climatiques — la composante environnement dans ESG – sont considérés comme prioritaires par les deux tiers (68 %) des répondants au relevé de Millani.

« En dépit des récentes conditions macroéconomiques, qui auraient suscité la perception d’une mise de côté des critères ESG, les répondants ont indiqué que l’ESG n’est pas un style d’investissement, avec la recherche de rendements plus faibles ou plus élevés », lit-on dans le rapport de Millani distribué parmi sa clientèle d’investisseurs institutionnels.

« Il s’agit plutôt d’une approche intégrée dans l’analyse fondamentale des investissements avec une vision à long terme des rendements. Et pour ceux qui l’ont réellement adoptée, il n’y a pas de retour en arrière. »

Popularité en hausse

D’ailleurs, la firme Millani indique dans son rapport que les fonds dits « durables » ou verts ont beaucoup mieux résisté à la baisse significative des afflux de capitaux subie par l’ensemble des fonds d’actions mondiales durant les deux trimestres précédant le 31 mars dernier.

En plus, les fonds durables ou verts d’origine canadienne, même encore en nombre limité, ont maintenu un afflux de capitaux positif durant cette période de deux trimestres.

Du point de vue de François Bourdon, associé-directeur chez SMS, la remise en question des critères ESG et de la valeur des fonds verts suscitée chez certains investisseurs durant cette période tumultueuse dans les marchés financiers n’est que « temporaire » face aux préoccupations grandissantes envers les « enjeux fondamentaux » de la société.

« Avec le revirement significatif des marchés financiers depuis le début de l’année, on voit que les investisseurs ont délaissé les placements spéculatifs liés notamment à l’économie numérique et virtuelle pour revenir sur des enjeux plus concrets et tangibles comme l’énergie et l’alimentation, indique François Bourdon.

« C’est pourquoi je suis très optimiste envers le meilleur potentiel de rendement à long terme des investissements responsables en matière d’environnement et de développement durable. »

Des exemples de fonds verts

Pour être crédible, un « fonds vert » n’investit que dans des entreprises qui exercent leurs activités dans le respect de l’environnement et du développement durable. Les critères de sélection de chaque fonds varient toutefois énormément, d’où la nécessité de porter une attention particulière à leur contenu.

Par exemple, les entreprises choisies peuvent être impliquées dans les énergies renouvelables, les transports à très faible ou sans émissions de gaz à effet de serre (GES), la gestion des eaux potables et usées, ainsi que la gestion des déchets en faveur du recyclage.

Par ailleurs, des fonds verts investissent dans des entreprises de développement technologique avec des avantages environnementaux, comme les énergies propres et les matériaux durables.

Enfin, certains fonds verts investissent dans des entreprises qui se sont affranchies d’activités nuisibles à l’environnement, comme les combustibles fossiles ou la déforestation.

Pour ses lecteurs-investisseurs, La Presse a trouvé des exemples de fonds verts qui sont facilement accessibles auprès d’institutions financières ou négociés en Bourse, et dont les descriptions illustrent la diversité de cette gamme de produits.

Fonds d’actions mondiales sans combustibles fossiles Vision RBC

Actif : 778 millions

Frais de gestion : 0,99 %

Géré par RBC Gestion mondiale d’actifs, filiale de la Banque Royale

Description

« Le fonds concentre ses placements dans des titres de capital des marchés mondiaux qui ne comprennent pas d’exposition à des sociétés qui s’adonnent directement à l’extraction, au traitement et au transport de combustibles fossiles comme le charbon, le pétrole et le gaz naturel. »

Fonds Desjardins SociéTerre Technologies propres

Actif : 443 millions

Frais de gestion : 2,62 %

Géré par Desjardins Gestion internationale d’actifs

Description 

« Le Fonds Desjardins SociéTerre Technologies propres investit principalement dans des actions de sociétés situées partout dans le monde, y compris les marchés émergents, et qui exercent leurs activités dans le secteur des technologies propres. Le Fonds a recours à une approche d’investissement responsable. »

FNB Wealthsimple d’obligations vertes nord-américaines

Symbole en Bourse : WSGB

Actif : 184 millions

Frais de gestion : 0,25 %

Géré par Placements Mackenzie, filiale de la Financière IGM et du conglomérat montréalais Power Corp.

Description

« Le fonds cherche à reproduire le rendement de l’indice “Solactive Green Bond” sur les marchés nord-américains. Il investit principalement dans des obligations durables, sociales et vertes de bonne qualité. »

Fonds en développement durable d’actions mondiales BNI (Banque Nationale Investissement)

Actif : 108 millions

Frais de gestion : 0,91 %

Géré par Trust Banque Nationale et Alliance Bernstein Canada

Description 

« L’objectif de placement du fonds est d’investir directement ou indirectement [par d’autres fonds] dans des titres de participation de sociétés situées partout dans le monde qui contribuent à l’atteinte d’un ou de plusieurs objectifs de développement durable de l’Organisation des Nations unies (ONU). »

FNB BMO MSCI ACWI / Actions alignées sur l’Accord de Paris

Symbole en Bourse : ZGRN

Actif : 2,8 millions

Frais de gestion : 0,25 %

Géré par BMO Gestion mondiale d’actifs, filiale de la Banque de Montréal)

Description 

« Le fonds cherche à reproduire le rendement de l’indice “MSCI ACWI Climate Paris Aligned Equity”. Le fonds investit dans des sociétés des pays développés et émergents dans le but de réduire l’exposition aux risques liés à la transition et aux risques physiques liés au climat, tout en respectant les exigences de l’accord de Paris. »

Des exemples de fonds d’énergie propre

Face aux changements climatiques attribués à la pollution par les gaz à effet de serre, de nombreux pays cherchent à remplacer les combustibles fossiles (charbon, pétrole, gaz) par des sources d’énergie propre et renouvelable.

Pour les investisseurs, cette transition énergétique représente une occasion de marché dans les énergies renouvelables telles que les énergies solaire, éolienne ou hydroélectrique.

Pour les gestionnaires de fonds d’investissement, il s’agit aussi d’une catégorie plus précise de placements dits « verts », et donc plus facile à cerner dans les critères de gestion et de promotion d’un fonds spécialisé en énergie propre.

D’ailleurs, investir en énergie propre peut comprendre des entreprises de technologies connexes qui sont importantes pour la transition énergétique hors des combustibles fossiles.

Par exemple, des technologies de batterie améliorées pour faciliter l’électrification des réseaux de transport. Ou encore des technologies dites « intelligentes » afin d’optimiser la gestion des infrastructures d’énergie renouvelable entre les pics et les creux de production et de consommation.

Pour ses lecteurs-investisseurs, La Presse a recensé des exemples de fonds consacrés aux énergies propres qui sont facilement accessibles en Bourse (selon l’actif sous gestion) :

FNB iShares Global Clean Energy

Symbole en Bourse : XCLN

Actif : 5,8 millions (dérivé du fonds ICLN de 5,5 milliards US à la Bourse américaine)

Frais de gestion : 0,35 %.

Géré par Gestion d’actifs BlackRock Canada Limitée, filiale du géant américain BlackRock)

Description 

« Le fonds a été conçu pour fournir aux investisseurs une exposition au rendement de l’indice S&P Global Clean Energy, qui se compose de sociétés qui participent au secteur de l’énergie propre ou qui produisent de l’énergie propre. »

FNB First Trust NASDAQ/Clean Edge Green Energy

Symbole en Bourse : QCLN

Actif : 15,6 millions CAN (dérivé du fonds QCLN de 2,1 milliards US à la Bourse américaine)

Frais de gestion : 0,15 %

Géré par la Société de gestion de portefeuilles FT Canada, filiale de l’américaine First Trust Advisors L.P.

Description 

« Le fonds cherche à reproduire le rendement de l’indice NASDAQ Clean Edge Green Energy Index de sociétés cotées en Bourse américaine qui sont engagées dans la fabrication, le développement, la distribution et l’installation de technologies d’énergie propre, notamment la technologie solaire photovoltaïque, l’énergie éolienne, les batteries de pointe, les piles à combustible et les véhicules électriques. »

FNB BMO Brookfield / Fonds mondial d’infrastructures d’énergie renouvelable

Symbole en Bourse : GRNI

Actif : 148 millions

Frais de gestion : 0,9 %

Géré par Brookfield Public Securities Group, filiale du conglomérat torontois Brookfield Asset Management, et par BMO Gestion mondiale d’actifs, filiale de la Banque de Montréal

Description 

« Ce fonds en gestion active investit dans des sociétés mondiales cotées en Bourse qui cherchent à tirer parti de la transition vers les énergies renouvelables, en particulier les occasions mondiales dans trois secteurs clés : l’énergie renouvelable et les infrastructures, les technologies propres et la durabilité de l’eau. »

FNB BMO actions du secteur énergie propre

Symbole en Bourse : ZCLN

Actif : 93 millions

Frais de gestion : 0,40 %

Géré par BMO Gestion mondiale d’actifs, filiale de la Banque de Montréal

Description 

« Le fonds cherche à reproduire le rendement de l’indice S&P Global Clean Energy qui comprend des sociétés à grande, moyenne et petite capitalisation des marchés développés et émergents, dont l’activité principale est l’énergie propre, au moyen de la production d’énergie propre, ou de l’équipement et des technologies d’énergie propre. »

FNB Harvest Énergie propre

Symbole en Bourse : HCLN

Actif : 58 millions

Frais de gestion : 0,4 %

Géré par Harvest Portfolios Group, d’Oakville, en Ontario

Description 

« Le fonds investit principalement dans des sociétés qui exercent des activités liées à l’énergie propre et qui sont inscrites à la cote d’une Bourse de valeurs réglementée dans certains pays d’Amérique du Nord, d’Asie ou d’Europe. »

Rectificatif

Une version antérieure de ce texte indiquait que François Bourdon est, associé-directeur chez texto (Sustainable Market Strategies). Il s'agit d'une erreur technique, François Bourdon est, associé-directeur chez SMS (Sustainable Market Strategies). Nos excuses.