Longtemps boudés en raison de leurs taux d’intérêt médiocres, les certificats de placement garanti, ou CPG, redeviennent au goût du jour. Dans un contexte où les investisseurs ont des sueurs froides en voyant leurs placements, La Presse a magasiné les épargnes sûres des institutions bancaires facilement accessibles. Deux experts donnent leur avis.

Est-ce que ça vaut la peine de considérer les CPG ?

Avec leurs taux ridicules année après année, personne ne perdait son temps à regarder les taux des certificats de placement garanti. Si bien que quand La Presse a contacté le surdoué en placements François Rochon, gestionnaire de portefeuille et fondateur de Giverny Capital, il n’a pas cru aux taux que La Presse avait trouvés lors de son magasinage de CPG.

« Des taux de 4 %, je suis sceptique, ce n’est presque pas possible, à moins qu’il y ait un niveau de risque plus élevé. Personne ne peut offrir plus de 3 % à moins d’avoir un certain risque », affirme le spécialiste au téléphone.

C’est 4,10 % pour 5 ans et 4 % pour 2 ans à la Banque Laurentienne et 4 % pour 3 ans chez Tangerine...

« Je suis étonné. Il faudrait que je le voie de mes propres yeux... La Banque Laurentienne, c’est correct, la banque n’est pas en danger. Tangerine aussi. »

Pas étonnant que l’expert soit étonné. En un an, le taux des CPG a grimpé de 144 %, estime David Paré, conseiller en placement et planificateur financier chez Gestion de patrimoine Desjardins.

« À l’hiver 2021, un CPG de 5 ans avoisinait les 1,5 % à 1,7 %. Aujourd’hui, on est capable d’aller chercher environ 4,15 %. Pour le terme d’un an, on est à 3,4 % tandis qu’à l’hiver 2021, on était à 0,81 % ou 0,9 % », observe-t-il.

Les résultats du magasinage de La Presse sont présentés à l’onglet suivant.

Pourquoi les taux ont-ils augmenté autant ?

Il ne s’agit pas d’un effet direct de la récente hausse d’un demi-point annoncée par la Banque du Canada, explique David Paré. « C’est essentiellement l’anticipation. Le marché a déjà anticipé les futures hausses de taux que la Banque du Canada va annoncer. La hausse était déjà dans le marché. »

L’expert prévoit que la prochaine annonce de la Banque du Canada aura un effet, mais pas de façon linéaire. « Même si, en juillet, on peut s’attendre à une hausse d’un demi-point, ça ne veut pas dire que les certificats de placement garanti vont monter d’un demi-point. »

Pourrait-on rêver à des taux de 6 ou 7 % ?

Il y a beaucoup d’inflation, il y a une partie des hausses qui est déjà présente, mais la cible réaliste, sans dire que c’est vers là qu’on s’en va, je pense que c’est 5 % dans un placement garanti de 5 ans. Dans le contexte actuel, je serais surpris qu’on excède ça.

David Paré, conseiller en placement et planificateur financier chez Gestion de patrimoine Desjardins

Est-ce un produit pour les matantes ?

« Plusieurs ont une partie de revenus fixes dans leur portefeuille, que ce soit 10 % pour certains ou 90 % pour d’autres. Cette partie de revenus fixes peut être occupée en partie par un CPG, affirme David Paré chez Gestion de patrimoine Desjardins. Actuellement, c’est un outil dont on se sert dans la gestion des portefeuilles et souvent un outil qu’on oublie. »

« Ce n’est pas propre à une clientèle, disons plus prudente ou plus bas bruns. Dans notre clientèle, plusieurs personnes de tous horizons en ont. »

Dans un contexte de hausse de taux d’intérêt, le CPG ne perdra pas de valeur, contrairement à une obligation. L’inconvénient, c’est qu’il n’est pas encaissable en tout temps. Il a un terme bien précis. Que ce soit de un à cinq ans.

Le CPG est un bon produit en fonction des contextes et des situations, soutient David Paré. « Depuis un an, il devient intéressant, car il amène de la stabilité alors que le marché obligataire canadien est en baisse de 10 % en 2022. Les CPG qui donnent du 3 % ou 4 % amènent une stabilité. Ce sont des stratégies évolutives. Dans le contexte actuel, le CPG est une solution à envisager pour les investisseurs. »

François Rochon chez Giverny Capital, qui ne jure que par les actions, n’est pas du tout de cet avis.

Je suis un fan des actions. Je ne suis pas un fan en général de revenus fixes, d’obligations ou de CPG. À long terme, je pense qu’historiquement les actions peuvent faire autour de 9 % par année. Pour moi, il n’y a aucune raison de ne pas être 100 % actions.

François Rochon

« Le prix à payer, c’est de vivre avec la volatilité du portefeuille, ce n’est pas en ligne droite, ce n’est pas garanti, ce n’est pas facile, mais si on reste longtemps et qu’on reste imperméable aux fluctuations boursières, le jeu en vaut la chandelle », affirme-t-il avec conviction.

Choisir un placement garanti, c’est « un appauvrissement garanti », dit-il, car avant ou après impôts, les épargnants vont faire moins que l’inflation ».

Mais si l’argent dort dans un compte d’épargne ? Car ce ne sont pas tous les Québécois qui ont une tolérance au risque. « C’est sûr qu’entre faire 0 % dans un compte d’épargne et faire 3 % dans un CPG, c’est mieux 3 %. Un moment donné, il faut choisir le moindre mal. Mais 3 % ou 4 %, ce n’est pas assez pour couvrir l’inflation, surtout si les gens payent de l’impôt avec un compte non enregistré. »

Pourquoi certaines institutions offrent-elles de meilleurs taux ?

Certaines institutions offrent de meilleurs taux. La principale explication est le besoin de capitaux. « Une banque a besoin d’argent pour prêter, explique David Paré. Certaines en ont plus besoin que d’autres, ce qui va impliquer des promotions, des taux plus alléchants pendant une certaine période et par la suite les taux reviennent à la normale. »

Ensuite, il y a le risque. Les grandes banques principales ont souvent des taux plus bas que les banques de deuxième rang comme Home Bank ou Banque Équitable. Or, l’écart s’est toutefois rétréci dernièrement, précise l’expert.

« À taux égal, les investisseurs vont rester dans une institution reconnue, dans les grandes banques. »

Lorsque vous placez de l’argent dans un certificat de placement garanti, vous prêtez votre argent à l’institution financière pour une durée déterminée sans possibilité de le retirer. À terme, l’institution s’engage à vous verser les intérêts prévus et votre somme initiale.

Top 3 et stratégies

La Presse a scruté les sites internet des grandes institutions financières pour connaître les meilleurs taux de certificats de placements garantis. Voici le résultat des meilleurs taux de CPG que l’on peut acheter soi-même au bout d’un clic.

Les meilleurs taux 1 an non rachetable

3,5 % numérique* (3,2 % ordinaire) : Banque Laurentienne

3 % (en promotion) : Banque Nationale

2,9 % : Tangerine

Les meilleurs taux 3 ans non rachetable

4,2 % numérique* (4,10 % ordinaire) : Banque Laurentienne

4 % : Tangerine

3,80 % (en promotion) : Banque Scotia

Les meilleurs taux 5 ans non rachetable

4,25 % numérique* (4,2 % ordinaire) : Banque Laurentienne

4 % (en promotion) : Banque CIBC

3,75 % (en promotion) : Banque Royale RBC

Cinq stratégies à adopter avec les CPG

  1. Achetez votre CPG vous-même sans passer par un conseiller. C’est aussi simple que de commander un produit chez Amazon.
  2. Évaluez vos besoins prochains de liquidités avant de choisir le terme, car votre argent sera gelé pour un à cinq ans.
  3. Divisez votre somme d’argent en plusieurs dates d’échéance (1 an, 3 ans, 5 ans), au cas où les taux augmenteraient encore.
  4. N’attendez pas que les taux grimpent encore. « Si j’attends dans six mois, je me prive pendant six mois des intérêts », affirme David Paré, conseiller en placement et planificateur financier chez Gestion de patrimoine Desjardins.
  5. Mettez, si possible, l’argent du CPG dans un CELI pour que votre épargne croisse à l’abri de l’impôt. Attention aux frais de transfert de CELI entre institutions.

* La Banque Laurentienne BLC Numérique offre des taux plus élevés que la Banque Laurentienne classique.

En savoir plus
  • 4,85 %
    En 2000, c’était le taux d’un dépôt garanti avec un terme d’un an chez Desjardins.
    Document officiel d’un dépôt à terme de Desjardins.
    1,15 %
    En 2009, c’était le taux d’un CPG un an non remboursable.
    Mouvement Desjardins