Les époux Manon*, 58 ans, et Christian*, 57 ans, bénéficient de revenus d’emploi et d’un bilan financier confortables. À quelques années de la retraite, ils souhaitent fournir un coup de pouce financier à leur fille de 28 ans pour l’achat de sa première propriété résidentielle.

La situation

Cet achat d’un appartement en copropriété est prévu aux environs de 300 000 $. Un montant qui, de l’avis de ses parents, pourrait s’avérer un fardeau hypothécaire « un peu lourd » pour leur fille Catherine*.

D’autant plus qu’elle est en début de carrière, avec un revenu d’emploi adéquat, mais avec peu d’épargne accumulée jusqu’à maintenant.

Dans ce contexte, les parents cherchent conseil sur la meilleure façon d’aider financièrement leur fille pour son projet d’achat immobilier.

« Nous voulons aider notre fille afin d’éviter qu’elle se retrouve prise à la gorge, comme on dit, avec ses futurs paiements hypothécaires et les autres frais courants de propriété [taxes, charges de copropriété, etc.], explique la mère, Manon, en discussion avec La Presse.

« Mais en même temps, mon mari et moi voulons minimiser l’impact de cette aide sur la bonne continuité de notre planification financière et fiscale en vue de notre retraite du travail, dans quelques années. »

Les chiffres 

Les parents : Manon, 58 ans, et Christian, 57 ans


Revenus d’emplois : 190 000 $ (bruts)Actifs financiers :
– en régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER) : 909 000 $
– en comptes d’épargne-placement libre d’impôt (CELI) : 8500 $
– en régimes de retraite d’employeurs : 138 000 $
– en comptes de retraite immobilisés (CRI, d’emplois antérieurs) : 67 000 $
– en comptes d’épargne-placement non enregistrés : 60 000 $

Actifs non financiers :
– résidence principale : 620 000 $ (libre d’hypothèques)
– chalet, terrain vacant : 500 000 $ (libres d’hypothèques) Principaux débours annuels :
– liés aux résidences : env. 25 000 $
– liés au style de vie personnel : env. 40 000 $
– liés à la fiscalité : env. 50 000 $
– liés aux comptes d’épargne enregistrés (REER, CELI) : env. 3600 $

Leur fille : Catherine, 28 ans, célibataire

Revenu d’emploi : 46 000 $ (bruts)
Actifs financiers :
– en compte d’épargne libre d’impôt (CELI) : 21 000 $
– en compte d’épargne-placement non enregistré : 10 000 $
Aucun passif

Principaux débours annuels :
– liés à sa résidence en colocation : env. 14 000 $
– liés à son style de vie : env. 15 000 $
– liés à la fiscalité : env. 9500 $

Les questions

Donc, les parents de Catherine se questionnent sur la somme optimale à envisager en guise d’aide financière à la mise de fonds immobilière, probablement de quelques dizaines de milliers de dollars.

Aussi, comment répartir l’obtention de ces liquidités parmi leurs divers comptes d’actifs financiers ? Comme solution de rechange, devraient-ils envisager de puiser dans leur marge de crédit hypothécaire à faible taux d’intérêt, et qui est encore inutilisée ?

Par ailleurs, Manon et Christian se demandent s’ils pourraient bénéficier d’avantages financiers et fiscaux à moyen et long terme en achetant eux-mêmes le condo trouvé par leur fille, afin de le lui louer ensuite en guise d’investissement familial en immobilier locatif.

Les questions de Manon et de Christian ont été soumises pour analyse-conseil à Maryse Filion, une planificatrice financière et fiscaliste de profession qui est aussi directrice de marché adjointe pour Montréal et Laval de BMO Gestion privée, une division de la Banque de Montréal.

Les conseils

« La bonne nouvelle pour Manon et Christian, c’est qu’ils sont en excellente santé financière, constate d’emblée Maryse Filion. À l’approche de la retraite, ils ont une bonne épargne-retraite totalisant environ 1,1 million de dollars en REER et en parts d’actif dans leurs régimes de retraite chez leur employeur respectif.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Maryse Filion, planificatrice financière et fiscaliste de profession, qui est aussi directrice de marché adjointe pour Montréal et Laval de BMO Gestion privée

« De plus, apprécie Mme Filion, leurs actifs immobiliers [maison, chalet, terrain] sont payés en totalité et ils n’ont pas de dettes à la consommation courante [sur cartes ou sur marge de crédit]. »

Par conséquent, souligne-t-elle, « Manon et Christian ont l’avantage d’une bonne indépendance financière et d’une liberté de choix exceptionnelle ».

Cela dit, elle leur suggère quelques ajustements durant les quelques années d’ici leur retraite.

« Manon et Christian devraient prioriser les contributions à leur REER au maximum de leurs cotisations inutilisées [env. 23 000 $ en tout]. Ensuite, ils devraient maximiser les contributions à leurs CELI respectifs, qui demeurent encore largement sous-utilisés. »

À cette fin, Mme Filion leur suggère d’établir des cotisations mensuelles automatiques à raison de 500 $ chacun dans leur CELI, et de 750 $ chacun dans leur REER.

À ce rythme, « Manon et Christian pourraient accumuler suffisamment d’épargne-retraite pour financer des rentes totalisant près de 65 % de leur salaire à partir de 65 ans ».

Quant à leur intention d’aider leur fille à financer l’achat de sa première propriété résidentielle, Mme Filion émet une mise en garde avant de formuler sa recommandation.

« Leur fille Catherine n’a pas encore les moyens d’acheter seule un condo de 300 000 $. En fait, le maximum qu’elle peut se permettre est un condo de 185 000 $, en considérant une mise de fonds de 20 % [env. 37 000 $] pour éviter le coût d’assurance hypothécaire auprès de la SCHL [Société canadienne d’hypothèque et de logement]. Cela impliquerait un condo plus éloigné ou plus âgé, ainsi que des coûts de transport potentiellement plus élevés », souligne Maryse Filion.

Par ailleurs, « si les parents achètent le condo pour le louer ensuite à leur fille, ils prendraient le risque financier sur eux, en plus d’avoir à gérer la fiscalité d’un revenu de loyer et de 100 % du gain de capital dans l’éventualité d’une revente du condo ».

Comme solution de rechange, Maryse Filion leur recommande de faire l’achat du condo de 300 000 $ conjointement avec leur fille Catherine afin qu’elle puisse se qualifier pour un financement hypothécaire à de meilleures conditions, et faire une mise de fonds de plus de 20 % (60 000 $) pour être exemptée des frais d’assurance prêt de la SCHL.

« Cette mise de fonds proviendrait en partie du CELI de Catherine, à hauteur de 15 000 $, tout en conservant une autre part de 15 000 $ en épargne courante pour les frais imprévus, explique Mme Filion.

« La balance de mise de fonds, soit 45 000 $, proviendrait d’une contribution remboursable de la part de ses parents, soit 15 000 $ de leurs comptes d’épargne-placement non enregistrés et 30 000 $ de leur marge de crédit hypothécaire encore inutilisée. »

En procédant ainsi, croit Maryse Filion, « leur fille Catherine se retrouvera avec une hypothèque de 240 000 $ amortissable sur 25 ans, avec un taux d’intérêt et des paiements mieux adaptés à son budget personnel de jeune adulte ».

Entre-temps, « Manon et Christian auront satisfait leur souhait d’aider leur fille, tout en préservant leur capacité budgétaire à maximiser les contributions à leur REER durant les quelques années avant la retraite du travail ».

* Bien que le cas mis en lumière dans cette rubrique soit réel, les prénoms utilisés sont fictifs.

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