Déterminés, motivés et organisés, Aurélie* et Thomas* appliquent à la lettre les préceptes du mouvement FIRE (Financial Independence, Retire Early, ou indépendance financière, retraite précoce). Âgés de 32 et de 36 ans, vont-ils atteindre leur but à temps pour leurs 41 et 45 ans ?

La situation

Le couple a dressé un plan d’action bien détaillé dans un fichier Excel. Chaque mois, il vérifie la progression vers la cible FIRE qui est d’accumuler des placements générant assez d’intérêts pour soutenir leur coût de vie jusqu’au trépas.

« Notre objectif est d’arrêter de travailler à respectivement 41 et 45 ans, ou du moins ne plus avoir la pression de travailler avec de gros salaires et responsabilités à cet âge », explique Aurélie.

Le couple alloue 25 000 $ par année à l’hypothèque, aux taxes, aux charges de copropriété et à l’entretien, et 25 000 $ supplémentaires pour les autres dépenses de la vie courante.

Il réussit à épargner chaque année 85 000 $. « À ce jour, nous avons accumulé un “nid” de 574 000 $ », relate Aurélie. Et comment ?

« Nous cuisinons beaucoup, n’avons pas de voiture et voyageons toujours en fonction des billets d’avion les moins chers. Nous n’avons pas d’enfant et ne prévoyons pas en avoir. »

Selon les calculs FIRE, ils ont besoin d’avoir accumulé en 2030 la somme de 1,5 million de dollars (en excluant la valeur du condo) pour soutenir leur coût de vie de 50 000 $ par année qui suivra l’inflation. Aurélie a estimé un rendement de 4 % annuellement d’ici cette retraite précoce. « Est-ce que ce plan est trop optimiste ? », questionne-t-elle.

Au début de la quarantaine, Aurélie et Thomas aimeraient voyager, voire déménager dans des pays où le coût de la vie est moins élevé. Ils rêvent à Mexico, à Lisbonne et à Medellín, en Colombie. Quelle que soit leur destination, ils ne vendront pas le condo, mais prévoient le louer.

« En vivant ailleurs qu’au Canada, aurons-nous droit à la pension de vieillesse du fédéral et au Régime des rentes du Québec à 65 ans ? demande-t-elle. Et combien coûte une assurance maladie à l’étranger ? »

Aurélie et Thomas sont prévoyants. Conjoints de fait, ils ont à la fois un contrat de vie commune et un testament qui déterminent que les avoirs de chacun iront au conjoint survivant.

Les chiffres

Aurélie

Salaire : 75 000 $ + boni annuel
REER collectif 6 % employeur/6 % employé
REER : 52 775 $
CELI : 40 750 $
Placements non enregistrés : 1370 $
Aucune dette (hors hypothèque)

Thomas

Salaire : 140 000 $ + boni annuel
REER collectif 6 % employeur/6 % employé
REER : 297 920 $
CELI : 101 250 $
Placements non enregistrés : 80 650 $
Dette de prêt étudiant : 5500 $ (intérêts déductibles d’impôt)

Hypothèque commune : 375 000 $ (valeur du condo 500 000 $)

La réponse

Nous avons demandé d’analyser le plan du jeune couple FIRE à Pierre-Raphaël Comeau, conseiller expert en gestion de patrimoine pour la gestion privée de la Banque Laurentienne.

Bonne nouvelle pour Aurélie et Thomas. Si leur motivation suit le plan, ils atteindront leur objectif en janvier 2030.

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Pierre-Raphaël Comeau, conseiller expert en gestion de patrimoine pour la gestion privée de la Banque Laurentienne

« Mathématiquement, le plan devrait fonctionner, estime Pierre-Raphaël Comeau. Évidemment, plus le projet est loin, plus on est longtemps à la retraite, plus les variables sont importantes. Mais selon les variables d’aujourd’hui, ça fonctionne. »

« J’ai même testé les limites du plan en baissant leurs rendements à 3,88 % plutôt que les 4 % qu’ils ont suggérés, poursuit le planificateur. Et le couple peut vivre jusqu’à 100 ans. Il leur reste même 500 $ par mois net après impôts et après inflation de plus que leur coût de vie. Je n’ai pas inclus les bonis dans le calcul ni la vente de la propriété. »

Et si le couple devance ses plans, en 2029 ? Ça fonctionne aussi, estime le conseiller expert en gestion de patrimoine. « Mais le surplus tombe à environ 250 $ par mois », souligne-t-il.

Afin d’optimiser le décaissement de ses actifs le temps venu, le couple devrait prévoir l’aide d’un planificateur financier, conseille Pierre-Raphaël Comeau.

SV et RRQ

S’ils sont toujours des résidents canadiens, Aurélie et Thomas auront droit à leur pleine pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) à 65 ans et à des versements plus élevés s’ils attendent jusqu’à 70 ans. Par contre, s’ils décident de devenir non-résidents canadiens, ils auront droit à un certain pourcentage en fonction des années de résidence au Canada après l’âge de 18 ans.

Pour ce qui est de la rente du Régime de rentes du Québec (RRQ), elle est établie en fonction de l’âge et des cotisations que le travailleur a faites au Régime. « Ils vont avoir un pourcentage en fonction de leur contribution jusqu’à 41 et 45 ans », indique Pierre-Raphaël Comeau.

Devenir non-résident

En déménageant à l’étranger, Aurélie et Thomas pourraient être tentés de faire une demande pour devenir non-résidents du Canada et cesser de payer de l’impôt ou presque. Or, il faut en général ne plus avoir de liens de résidence au Canada. S’ils gardent le condo, ils seront plutôt considérés comme résidents de fait et devront payer de l’impôt, sauf certaines exceptions.

« Il y a des règles complexes à vérifier qui varient selon les pays, avertit Pierre-Raphaël Comeau. Il y a des spécialistes de l’expatriation qu’il faut consulter avant de quitter le Canada. »

« La réflexion doit se faire au moins deux ans avant de passer à l’acte, insiste-t-il. On suggère d’aller passer six mois à l’étranger, dans le pays où l’on souhaite vivre, avant de faire le saut pour de bon et renoncer à sa citoyenneté canadienne. Car certains pays chauds sont agréables en vacances deux semaines, mais peut-être moins quand on y vit toute l’année avec des restrictions en électricité. »

Si Aurélie et Thomas répondent aux exigences de l’expatriation, ils devront souscrire à des assurances médicales dans le pays choisi. S’ils restent citoyens canadiens, ils pourront acheter une assurance maladie prolongée pour l’étranger ici.

À titre d’exemple, un couple non adepte de sport extrême et en bonne santé devra débourser 3600 $ pour une assurance maladie d’un an avec assurance-vie, quel que soit le pays sur la planète. Sans assurance-vie, le montant baisse à 3300 $. À noter que l’assurance couvre les soins d’urgence et non les visites de routine chez le gynécologue ou le dentiste.

* Bien que le cas mis en lumière dans cette rubrique soit réel, les prénoms utilisés sont fictifs.

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