Son boulot, Jean-Paul, de la Rive-Sud de Montréal, l'a aimé pendant très longtemps. Mais là, après bientôt 28 ans à réparer des frigos et des cuisinières, il commence à en avoir assez.

«Je suis blasé», admet bien franchement ce technicien en électroménagers.

À 53 ans, Jean-Paul songe donc déjà à la retraite. Il aimerait ranger ses tournevis rapidement. Son problème, c'est qu'il hésite à lâcher son travail. Il est conscient qu'il gagne très bien sa vie, et ne sait pas s'il peut se permettre financièrement d'arrêter à courte échéance.

«Pourrai-je prendre ma retraite en janvier 2013, soit à 55 ans?» se demande-t-il.

Si c'est impossible, Jean-Paul est prêt à considérer un report à 58 ans. Idéalement, il préférerait arrêter dans moins de deux ans, quitte à se trouver ensuite une jobine à temps partiel dans un autre secteur. Avec ce revenu d'appoint, il espère avoir assez d'argent pour se promener un peu plus souvent aux États-Unis avec son épouse Marie, 55 ans.

«Je suis prêt à faire n'importe quoi pour me tenir occupé et pour voyager au moins deux fois par année, dit-il. Même «pomper» du gaz ou livrer de la pizza!»

À la retraite, le couple estime avoir besoin d'environ 35 000$ par an, vacances incluses. Il aimerait aussi pouvoir débourser 12 000$ pour des rénovations, montant réparti sur plusieurs années.

De belles économies

Actuellement, Jean-Paul touche un salaire annuel de 60 000$. Comme surveillante dans une école, Marie gagne 5000$ par an. À la retraite, Jean-Paul estime que son travail à temps partiel lui rapportera 6000$/an. Marie, elle, prévoit continuer à temps partiel jusqu'à 60 ans.

Côté finances, Jean-Paul et Marie se sont assez bien débrouillés. Jean-Paul possède dans divers véhicules de placements (RÉER, CELI, etc...) près de 230 000$ et Marie, 171 180$. Note importante: tous les placements du couple sont dans des certificats de placement garanti. En 2010, ces CPG ont généré 2,5% de rendement, mais autant lui que elle s'attend à du 2% au cours de cinq prochaines années. Malgré cela, le couple n'a pas l'intention de changer de stratégie.

«Nous ne sommes nullement intéressés par d'autres types d'investissements», affirme Jean-Paul, qui souhaite que les taux d'intérêt grimpent au cours des prochaines années, mais n'en est pas convaincu.

Le couple habite un triplex, dont Jean-Paul est l'unique propriétaire. L'immeuble est évalué à 439 000 et libre d'hypothèque. Le couple occupe le tiers de l'espace habitable; le reste est loué. Les revenus de loyer se chiffrent à 18 180$ par an, auxquels il faut déduire 10 100$ de dépenses (taxes, assurances, entretien).

En 2011, l'avoir net du couple totalise donc 858 000$, soit 685 000$ pour Jean-Paul et 173 000$ pour Marie. L'écart de valeur entre les deux conjoints est principalement dû à la propriété unique du triplex par Jean-Paul, à son CRI et son épargne non-enregistrée.

Une retraite serrée!

Gaétan Veillette, planificateur financier au Groupe Investors, a analysé les finances du couple. Il a pris pour hypothèses un taux d'inflation de 2%/an, un taux de rendement espéré de 2%/an et une plus-value sur la valeur du triplex de 2%/an. Selon le spécialiste, Jean-Paul et Marie n'ont pas trop de bile à se faire car ils pourront atteindre leurs objectifs financiers.

En effet, ses prévisions indiquent que malgré leur train de vie projeté à la retraite, non seulement leurs avoirs ne disparaîtront pas, ils auront même tendance à augmenter! Ainsi, l'avoir net du couple sera de 885 000$ en 2020, et de 946 000$ en 2030, en dollars d'aujourd'hui. Lorsque Jean-Paul aura 89 ans, il vaudra 1 054 000$.

Gaétant Veillette met toutefois un bémol à ce beau scénario. Car il se réalisera si et seulement si le couple s'astreint à une discipline serrée sur le plan des dépenses. Une légère augmentation du train de vie pourrait tout remettre en question. Par exemple, si le couple augmente ses dépenses de 500$ par mois, l'actif net de Jean-Paul à 89 ans tombe à 462 000$. C'est près de 600 000$ de moins que dans le scénario original! Si le couple dépense 1000$ par mois, alors l'actif net sera complètement épuisé lorsque Jean-Paul aura 87 ans.

Cette situation est principalement dû à la politique de placement du couple, limitée aux CPG, qui, selon le planificateur, s'avère une contrainte. Il note qu'actuellement, les principales institutions financières offrent des CPG - terme d'un an - à des taux qui varient entre 1% et 1,5%, alors que les taux pour des termes de 5 ans sont de 2,2% à 2,5%.

Gaétan Veillette rappelle qu'un investissement générant 2% par an double tous les 36 ans, À du 4%, il double tous les 18 ans; à du 6%, il double tous les 12 ans. De plus, ce type de placement est généralement fortement imposable (sauf dans un CELI). Ce qui veut dire que le rendement réel des CPG, après impôt et inflation, est souvent négatif, ou moins de zéro.

Évidemment, précise M. Veillette, une politique de placement doit être basée sur un ensemble de facteurs: rendement, fiscalité, nature des revenus, contexte des marchés, et sensibilité du client aux risques d'investissement.

«Le client doit-être confortable avec sa politique de placement», insiste M. Veillette.

Dans ce cas-ci, il suggère néanmoins une révision de la politique de placement. Il souligne qu'il existe dans le marché plusieurs véhicules financiers dont les rendements surpassent l'inflation tout en offrant la sécurité d'esprit. Les fonds de biens immobiliers ou encore les fonds de placements garantis sont deux bons exemples...