Les finances de Cook it s’étaient tellement détériorées depuis la « sortie de pandémie » que son conseiller spécial se demandait si le spécialiste du prêt-à-cuisiner et du prêt-à-manger avait suffisamment d’argent dans ses coffres pour « passer la période des Fêtes ».

Pour sauver les meubles, l’entreprise fondée par Judith Fetzer s’est retrouvée dans une course contre la montre où elle a dû insister pour recevoir des offres d’achat, ce qui a mené au dépôt d’une proposition par l’entreprise britanno-colombienne Fresh Prep Foods.

« Au début, on avait des craintes que les liquidités ne nous permettent pas de passer la période des Fêtes », a raconté Jean Gagnon, de Raymond Chabot, lundi, devant le juge Michel Pinsonnault, de la Cour supérieure du Québec. « Les liquidités étaient très serrées. »

Celui qui a agi comme syndic dans ce dossier témoignait dans le cadre d’une audience visant à obtenir l’aval du tribunal pour officialiser la vente de Cook it, qui avait déposé un avis d’intention de faire une proposition en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité le 29 janvier dernier. Mme Fetzer était présente, mais la femme d’affaires n’a pas témoigné. Le magistrat a donné le feu vert à la transaction.

Le prix de vente n’a pas été divulgué, mais il est inférieur à 2,3 millions, la somme due aux créanciers garantis de l’entreprise, constate-t-on à la lecture du rapport de M. Gagnon.

Ensemble, les créanciers ordinaires, parmi lesquels on retrouve le Fonds de solidarité FTQ (7,7 millions) et Desjardins (7,4 millions), perdent près de 19 millions.

Des années dans le rouge

Après « plusieurs années de déficit », Cook it avait engrangé un profit net de 2,8 millions au terme de son année financière terminée le 30 juin 2022. L’entreprise de Mme Fetzer tournait alors la page sur une année où les restrictions sanitaires, qui limitaient les sorties, avaient suscité un engouement des ménages pour le prêt-à-manger et les boîtes-repas.

L’embellie est cependant de courte durée. La « forte inflation » fait plonger Cook it dans le rouge. Les ventes reculent de 27 % entre 2022 et 2023, pour s’établir à 39 millions. L’année se termine avec une perte nette de 7 millions. Le portrait n’est guère reluisant pour la période de six mois ayant pris fin le 31 décembre dernier. Malgré des efforts pour réduire ses coûts fixes, l’entreprise a perdu 2,7 millions. Le « déficit accumulé » s’élevait à 25 millions.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Judith Fetzer a fondé Cook it et dirigeait l’entreprise.

« La baisse du chiffre d’affaires, l’inflation au niveau des matières premières [aliments] a fait en sorte que la gestion quotidienne a été plus compliquée, a expliqué M. Gagnon. C’est ce qui a essentiellement mené aux problèmes. Malgré beaucoup d’efforts de restructuration, l’équipe de Cook it n’a pas réussi à garder le cap. »

Entre mai et décembre 2023, l’entreprise fondée par Mme Fezter a mis à pied 74 personnes. Elle comptait 178 salaires à la fin de la dernière année. Cook it avait aussi sabré ses dépenses de marketing de l’ordre de 75 %.

Une « douche froide »

C’est dans ce contexte difficile que l’entreprise décide de retenir les services de la firme Raymond Chabot, le 1er novembre dernier. Son mandat : trouver des partenaires ou des repreneurs. Jusqu’au 10 novembre, M. Gagnon frappe à la porte de 17 « investisseurs/acquéreurs stratégiques » au Canada, aux États-Unis et en Australie. Deux repreneurs potentiels passent à l’étape suivante, qui se déroule jusqu’en décembre. Un troisième acteur s’est ajouté à la dernière minute.

« Malheureusement, les trois acteurs n’ont pas soumis d’offre, a expliqué M. Gagnon. Ç’a été une douche froide. On avait beaucoup d’espoir avec la première étape, mais on n’a pas eu d’offres. Par contre, on a poursuivi les discussions avec les trois acteurs du 22 décembre au 17 janvier et on a reçu, en incitant fortement, trois offres. »

C’est finalement Fresh Prep Foods, établie à Vancouver, qui a raflé la mise. L’entreprise spécialisée dans les repas prêts à cuisiner et prêts à manger se limite actuellement à la Colombie-Britannique et aux villes albertaines de Calgary, d’Edmonton et de Red Deer.

M. Gagnon a aussi expliqué au juge Pinsonnault que malgré ses finances précaires, Cook it avait préféré solliciter un acheteur sans se placer à l’abri de ses créanciers, afin de ne pas semer « la panique » au sein de sa clientèle. L’objectif, a raconté le syndic, visait à éviter une interruption des commandes parce que la clientèle s’inquiétait de la situation financière de Cook it.

Lisez « Cook it à l’abri de ses créanciers pour être vendue »
En savoir plus
  • 2014
    Année de fondation de Cook it
    Source : cook it
    4
    Nombre d’acquisitions réalisées par l’entreprise
    Source : Raymond Chabot