Une semaine après avoir mis en doute la légitimité de l’actionnaire dissident Browning West à pouvoir demander la tenue rapide d’une assemblée, Gildan convoque ses actionnaires pour une assemblée annuelle et extraordinaire le 28 mai.

Le fabricant montréalais de vêtements entendait néanmoins présenter lundi une demande en jugement déclaratoire auprès d’un tribunal du Québec pour faire déclarer la demande de convocation de Browning West comme nulle et déclarer par conséquent l’assemblée extraordinaire des actionnaires annulée.

Le conseil continue de prétendre que Browning West a enfreint une loi antitrust américaine en bonifiant sa participation dans Gildan au point de pouvoir demander une réunion des actionnaires. Browning West assure que la loi Hart-Scott-Rodino n’a pas été violée, car l’entité détenant les actions de Gildan n’est pas constituée aux États-Unis et Gildan n’est pas une société ayant son siège social aux États-Unis.

Le fonds de couverture américain avait demandé à Gildan le 9 janvier d’organiser sans tarder une assemblée pour tenir un vote afin de reconstituer le conseil d’administration pour ramener Glenn Chamandy au poste de PDG après son congédiement survenu le 10 décembre.

La dernière assemblée des actionnaires de Gildan s’étant déroulée en mai dernier, le conseil d’administration de Gildan dit avoir décidé de combiner les assemblées annuelle et extraordinaire pour « éviter des assemblées multiples saisies de questions similaires et des situations où il y a un risque véritable de semer la confusion parmi les actionnaires et d’entraîner un certain désengagement de leur part ».

Puisque la demande de convocation formulée par Browning West vise à reconstituer la majorité du conseil dans le but de prendre le contrôle de l’entreprise, Gildan insiste sur l’importance d’accorder à tous les actionnaires un « délai raisonnable » pour évaluer la proposition de Browning West et bien la comprendre.

Le conseil soutient aussi que la date du 28 mai donnera aux actionnaires l’occasion d’évaluer les qualités de leadership de Vince Tyra – le successeur de Glenn Chamandy – à titre de chef de la direction de Gildan afin qu’ils puissent prendre la décision « la plus éclairée possible » quant au choix de la personne qui représente le meilleur dirigeant pour mener l’entreprise.

La décision de tenir l’assemblée à la fin de mai s’inscrit dans une certaine logique aux yeux du président de l’Institut sur la gouvernance, François Dauphin.

« C’est à l’intérieur d’un délai qui semble tout à fait raisonnable pour donner la possibilité de voter aux actionnaires en ayant le plus d’information possible, notamment sur le nouveau PDG Vince Tyra, mais aussi sur les résultats annuels. Il y aura des documents qui permettront de se faire une idée en ayant la tête un peu plus froide à la suite des récents développements. »

La date d’assemblée fixée par Gildan est pour Browning West une « tentative de gagner du temps pour un PDG vraisemblablement non qualifié ayant une feuille de route de destruction de valeur ». Browning West dit craindre un risque de dommages permanents pour l’entreprise et demande au conseil de reconsidérer sa décision et de tenir sans délai l’assemblée extraordinaire demandée.

Le gestionnaire d’actifs torontois Turtle Creek, qui s’oppose lui aussi au congédiement de Glenn Chamandy, réagit également avec vigueur.

« Plutôt que de convoquer l’assemblée dans les deux ou trois mois, le conseil semble déterminé à frustrer et à retarder la capacité des actionnaires à lui demander des comptes. Ces tactiques ne sont qu’une autre gifle au visage des actionnaires à long terme », est-il mentionné par déclaration électronique.

« De plus, le conseil continue d’engager des dépenses inutiles en s’opposant devant les tribunaux à l’assemblée extraordinaire demandée. L’action en justice n’est qu’une autre tactique visant à priver les actionnaires de la possibilité de choisir leurs représentants au conseil. »

Gildan dit par ailleurs avoir offert à Browning West de tenir une rencontre avec Vince Tyra et a demandé à rencontrer les candidats proposés par Browning West afin de mieux comprendre leurs points de vue et la pertinence de leurs compétences. Le conseil affirme que Browning West s’est refusé jusqu’ici à toute communication entre ses candidats et le conseil.

Le conseil a destitué Glenn Chamandy en justifiant sa décision par des divergences liées au plan de succession et en soulignant qu’il souhaitait aller de l’avant avec une stratégie d’acquisitions risquée de plusieurs milliards de dollars.

Browning West souhaite remplacer 8 des 11 administrateurs en poste. Les départs souhaités sont ceux de Donald Berg, Maryse Bertrand, Marc Caira, Shirley Cunningham, Charles Herington, Luc Jobin, Craig Leavitt et Chris Shackelton.

Une dizaine d’actionnaires institutionnels indépendants, contrôlant environ 35 % des actions de Gildan, ont publiquement exprimé leur opposition au congédiement de Glenn Chamandy.