Les gestes faits par Bombardier il y a trois ans – au plus fort de la pandémie – pour minimiser ses difficultés d’approvisionnement semblent porter leurs fruits. Pendant que les livraisons déclinent ou stagnent un peu partout dans l’industrie, l’avionneur québécois continue d’accélérer la cadence.

À deux mois de la fin de l’année, l’entreprise s’attend à pouvoir remettre au moins 138 jets privés à ses clients, comme prévu. Chez ses principaux concurrents – Gulfstream, Textron (Cessna) et Embraer –, on peine à répondre aux attentes des analystes sur ce plan.

« Je me souviens, à l’été 2020, avoir pris des décisions très différentes des tendances en ajoutant du personnel dans la chaîne d’approvisionnement plutôt que l’inverse, a expliqué jeudi le président et chef de la direction de Bombardier, Éric Martel, en conférence téléphonique. On constate les bénéfices depuis deux ans. »

Celui-ci répondait aux questions des analystes financiers à propos du troisième trimestre ayant pris fin le 30 septembre, où le constructeur de jets privés a dépassé les attentes.

La performance de Bombardier s’est reflétée sur le cours de son action à la Bourse de Toronto, jeudi. Le titre s’est envolé de 11,3 %, ou 5,09 $, pour clôturer à 50,20 $.

Pendant les mois de juillet, août et septembre, Bombardier a remis 31 avions des familles Challenger et Global à ses clients, soit six de plus par rapport à il y a un an. La compagnie devra livrer 56 appareils au quatrième trimestre pour atteindre son objectif.

« Nous avons pratiquement toutes les pièces pour assembler les avions, a dit M. Martel, dans une autre conférence téléphonique avec les représentants des médias. Une fois que c’est dans nos usines, c’est sous notre contrôle. »

Planification

Dans l’espoir d’éviter les mauvaises surprises, le constructeur de jets privés a déployé, au cours des dernières années, des employés, comme des spécialistes de la logistique et des achats, chez certains fournisseurs de deuxième et de troisième rangs afin de les accompagner.

Parallèlement, l’entreprise a rapatrié du travail pour augmenter la fiabilité de sa chaîne d’approvisionnement. À l’intérieur de l’ancienne usine Canadair située dans l’arrondissement de Saint-Laurent, cela s’est notamment traduit par l’ajout de 500 personnes pour assembler des composants.

Cela permet à Bombardier d’être optimiste. Chez ses principaux concurrents, le portrait n’est pas aussi rose. Par exemple, Gulfstream devrait livrer entre 10 et 12 appareils de moins que les 145 prévus cette année. Chez Textron, la prévision oscille entre 175 et 180 exemplaires, mais les 39 livraisons du troisième trimestre n’ont pas répondu aux attentes des analystes.

« Bombardier est le seul constructeur d’avions d’affaires à avoir livré plus d’appareils par rapport aux attentes, souligne l’analyste Benoit Poirier, de Valeurs mobilières Desjardins. L’avionneur se concentre déjà sur son approvisionnement de pièces pour 2024. »

Trouver des clients

Avec une augmentation anticipée de la cadence de production l’an prochain ainsi qu’en 2025 – où l’on table sur 150 livraisons –, Bombardier devra également décrocher davantage de commandes pour que son carnet de commandes continue à représenter l’équivalent de 18 à 24 mois de travail. Le ratio de nouveaux contrats par rapport au nombre de livraisons s’est établi à 1,1 au troisième trimestre.

Cela signifie que l’entreprise livre pratiquement autant d’appareils qu’elle reçoit de commandes. Cela n’a pas empêché la valeur du carnet de commandes de se contracter légèrement, à 14,7 milliards US. M. Martel répète que la demande est toujours au rendez-vous, en faisant valoir que les opérateurs de flotte, qui louent des jets privés à des taux horaires, continuent de faire de bonnes affaires et que le créneau de la défense devrait venir garnir le carnet de commandes en 2024.

En dépit des craintes de récession, l’aviation d’affaires, un secteur généralement vulnérable aux aléas de l’économie, semble garder le cap. En octobre, le niveau d’activité était légèrement supérieur à celui observé en 2022 et 17 % plus élevé par rapport au niveau d’avant la pandémie.

« Il y a beaucoup d’activité un peu partout dans le monde, affirme le grand patron de Bombardier. Nous sommes satisfaits du niveau de demande, surtout dans le créneau des appareils à large cabine. On continue de vouloir se procurer des avions privés. »

En savoir plus
  • 123
    Nombre de jets privés livrés par Bombardier en 2022
    Source : bombardier