(New York) Une grève inédite de six semaines chez les trois grands constructeurs automobiles américains touche à sa fin grâce à l’accord de principe conclu lundi entre General Motors et le syndicat UAW, après ceux de Ford et Stellantis, des ententes qualifiées d’« historiques » par le président Joe Biden.

« Ces accords record récompensent les ouvriers de l’industrie automobile qui ont fait beaucoup de sacrifices pour que le secteur continue à fonctionner » lors de la grande crise économique de 2009, a estimé le président américain.

M. Biden a fait de son soutien aux syndicats une marque de fabrique de son mandat, et l’appui apporté par l’UAW à sa candidature en 2020 l’a aidé à faire basculer le Michigan en sa faveur, alors que l’État avait voté pour Donald Trump en 2016.

Le président s’était rendu fin septembre sur un piquet de grève devant une usine de General Motors.

Annoncé dès lundi matin par des sources proches des négociations à l’AFP et à des médias américains, la confirmation de l’accord de principe entre GM et l’UAW est arrivée vers 16 h (heure de l’Est), quelques minutes après la clôture de la Bourse de New York.

Selon un communiqué du syndicat, le constructeur a accepté – à l’instar de ses deux concurrents – une hausse du salaire de base de 25 % sur les quatre ans de la convention collective.

C’est inférieur aux 40 % que le président du syndicat Shawn Fain réclamait, mais c’est nettement supérieur aux 9 % initialement proposés par Ford en août par exemple.

L’UAW s’étend

Les multiples grilles salariales vont disparaître chez GM, les retraités vont toucher plusieurs primes et deux entités « cruciales » du groupe spécialisées dans les batteries, Ultium Cells et GM Subsystems, vont entrer dans le giron du syndicat, s’est-il félicité.

« GM est ravi d’être parvenu à un accord de principe avec l’UAW qui illustre les contributions des équipes tout en nous permettant de continuer à investir pour notre avenir et de fournir de bons emplois aux États-Unis », a commenté Mary Barra, patronne du constructeur, dans un bref communiqué, disant avoir « hâte que tout le monde retourne travailler ».

« Les trois “Big Three” ont désormais signé un accord de principe avec l’UAW. Les trois accords battent des records et unissent davantage notre syndicat », a relevé l’UAW dans son communiqué.  

Ces accords doivent être validés par une commission nationale du syndicat puis ratifiés par un vote de ses adhérents – ce qui peut prendre deux semaines.

L’UAW a d’ores et déjà annoncé que tous les grévistes allaient reprendre le travail sans attendre ces votes.

Le mouvement a été déclenché le 15 septembre faute d’accord à l’échéance des conventions collectives, mobilisant au plus fort plus de 45 000 des 146 000 encartés auprès de l’UAW travaillant pour ces trois grands constructeurs historiques américains.

C’est la première fois depuis la création du syndicat en 1935 que les « Big Three » étaient ciblés par une grève simultanée, qui est montée en intensité au fil des semaines.

Usines majeures

Après avoir lancé un appel au débrayage dans des usines secondaires et des centres de distribution de pièces détachées, l’UAW a frappé fort en visant l’usine la plus importante et la « plus lucrative » de chacun des trois groupes de Detroit (Michigan).

La Kentucky Truck Plant de Ford, qui réalise un chiffre d’affaires de 25 milliards de dollars par an, est englobée dans la grève le 11 octobre.

Le constructeur a transigé mercredi, après 41 jours de grève, et Stellantis (Chrysler, Jeep, etc.) a fait de même trois jours plus tard.

Ford « a mis sur la table 50 % de plus que lorsque nous avons débrayé », s’était réjoui Shawn Fain, lors de l’annonce de l’accord avec le constructeur.

« Une fois de plus, nous avons obtenu ce que l’on nous disait impossible il y a encore quelques semaines », a-t-il relevé samedi, en faisant part de l’entente avec Stellantis.

Ces accords prévoient des hausses salariales, des mesures d’ajustement au coût de la vie, des avantages sociaux, des améliorations pour les retraités, entre autres.

Ils contiennent également des spécificités en fonction du groupe, comme chez Stellantis en matière d’emplois.

Usine « sauvée »

Le groupe s’est en effet engagé à créer 5000 postes alors qu’il avait prévu des suppressions notamment dans le cadre de la fermeture décriée d’une usine à Belvidere (Illinois) qui est « sauvée », selon Rich Boyer, vice-président de l’UAW.

« Nous avons gagné un nouveau véhicule à Belvidere », a-t-il lancé samedi.

« Les travailleurs n’ont pas eu autant de force de levier depuis des décennies, et certainement pas depuis la récession de 2008-2009 », a expliqué Susan Schurman, professeure spécialisée sur les relations dans le monde du travail à l’université Rutgers.

Dans l’automobile, « les employés ont fait d’énormes sacrifices » lors du sauvetage du secteur après la crise de 2008 et maintenant, avec la reprise, « les dirigeants reçoivent beaucoup d’argent et les ouvriers veulent leur part », a-t-elle poursuivi.

« Un autre trimestre record, une autre année record. Comme nous le disons depuis des mois : des profits record signifient des contrats record », avait commenté Shawn Fain, après la publication des résultats trimestriels de GM le 24 octobre.