La croissance effrénée est déjà chose du passé à la Société québécoise du cannabis (SQDC), qui soufflera sa cinquième bougie en octobre. Son prochain objectif : convaincre les clients de dépenser « tous leurs dollars de cannabis » dans ses boutiques, affirme le président-directeur général de la société d’État, Jacques Farcy.

C’est l’un des nombreux chantiers qui figurent dans le deuxième plan stratégique de la société d’État, dont la publication coïncide avec la présentation des résultats financiers pour l’exercice qui s’est terminé le 25 mars dernier.

« Nous ne sommes plus sur des croissances à deux chiffres comme nous avons connu avec le démarrage de la légalisation, explique M. Farcy, en entrevue avec La Presse. C’est un marché que l’on connaît un peu plus. »

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Le président-directeur général de la SQDC, Jacques Farcy

Avec un réseau de 98 succursales dans chacune des régions administratives de la province, la SQDC ne table pas sur une expansion de son empreinte physique. Cela aura un effet sur les résultats. On anticipe une progression des volumes vendus ainsi que du chiffre d’affaires, mais les augmentations seront moins fulgurantes. Les profits devraient fluctuer, selon les prévisions fournies dans le document.

« L’expérience client »

D’ici la fin de l’exercice 2025-2026, M. Farcy veut donc mettre l’accent sur « l’expérience client » dans l’espoir de convaincre les consommateurs de tourner le dos au revendeur du coin pour de bon. Selon la plus récente enquête sur le cannabis réalisée par l’Institut de la statistique du Québec (ISQ), 44 % des consommateurs âgés d’au moins 21 ans – l’âge légal pour se procurer du cannabis au Québec – ont réalisé leurs emplettes exclusivement à la SQDC.

« L’enjeu principal auquel on fait face aujourd’hui, c’est que ces clients ne dépensent pas tous leurs dollars de cannabis à la SQDC, dit-il. Notre problème n’est plus tant d’être accessibles, mais de convaincre les consommateurs qui viennent chez nous tout en allant aussi vers le marché illégal de transférer leurs achats à la SQDC. »

Plus facile à dire qu’à faire lorsque le cadre réglementaire interdit à la société d’État toute la publicité afin de promouvoir ses produits. L’effort devra donc se faire à l’intérieur des succursales, souligne celui qui est aux commandes depuis le 12 octobre 2021.

La SQDC « gagnerait à mieux expliquer son offre », estime-t-il.

Il y a encore beaucoup de clients qui ne savent pas que l’on vend du haschich et des produits comestibles. On communique aussi beaucoup le prix moyen du gramme de fleur séchée [6,48 $], mais peu de personnes savent que l’on peut aussi en acheter à 3,43 $ le gramme.

Jacques Farcy, président-directeur général de la SQDC

« Cela fait partie des choses sur lesquelles il faut informer notre clientèle », ajoute-t-il.

« Marque employeur » et grève

Avec une main-d’œuvre difficile à trouver, la SQDC ambitionne également d’améliorer sa « marque employeur ». Le hic, c’est qu’une grève perdure depuis plus d’un an dans 24 des succursales du réseau – une situation inhabituelle pour une société d’État.

Les travailleurs touchés sont représentés par le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), affilié à la FTQ. Le salaire est le principal point en litige. Les travailleurs de la SQDC syndiqués auprès du SCFP gagnent 17,12 $ l’heure à l’embauche, d’après le salaire de 2021 – avant le débrayage. De l’avis de M. Farcy, la situation actuelle n’est pas contradictoire avec les objectifs de la société d’État en matière d’image dans le marché du travail.

« Vous savez, les trois quarts de notre réseau fonctionnent normalement, souligne le gestionnaire. Nous avons ouvert 10 succursales et nous n’avons eu aucun enjeu pour recruter. Le mouvement [de grève] existe et je le respecte, mais cela n’est pas la réalité de la SQDC. »

Interrogé sur la suite des choses avec le SCFP, M. Farcy n’a pas voulu commenter l’état des relations entre les deux parties, affirmant ne pas vouloir négocier sur la « place publique ». L’employeur et les représentants syndicaux doivent se rencontrer devant le conciliateur au cours de la semaine, selon M. Farcy.

En savoir plus
  • 359 603 $
    Salaire global du président-directeur général de la SQDC, Jacques Farcy, l’an dernier
    Source : SQDC
    1,4 million
    Montant de la rémunération globale des six dirigeants les mieux payés à la SQDC
    Source : SQDC