Dure journée pour les employés de l’important studio Ludia. Nombre d’entre eux ont appris jeudi, par le biais d’entretiens virtuels, qu’ils perdaient leur emploi sur le champ. Des sources parlent de nombreuses personnes sur les 400 que compte le studio montréalais de jeux vidéo sur mobile (Jurassic World Alive, Lovelink, Dragons – Rise of Berk).

Jam City, l’entreprise américaine qui a acquis Ludia en septembre 2021 pour environ 175 millions de dollars, compte aussi des mises à pied. « C’est près de 200 pour tous les bureaux du groupe », précise Kristina Cole, porte-parole de Jam City, par écrit à La Presse.

Jam City ne précise pas le nombre exact de mises à pied chez Ludia. « À la lumière de l’économie mondiale difficile et de son impact sur l’industrie du jeu, Jam City a pris la décision difficile de réduire la taille de notre équipe d’environ 17 %, ajoute Kristina Cole. […] Bien que Jam City reste rentable, […] il s’agit d’une décision nécessaire pour améliorer notre flexibilité financière et accroître l’efficacité opérationnelle, en positionnant mieux Jam City pour une croissance à long terme. »

Cela fait également suite à une restructuration plus large que nous avons récemment achevée pour réaligner nos équipes de développement sous des divisions de genre axées sur l’expertise afin d’optimiser les performances.

Kristina Cole, porte-parole de Jam City

Joint par La Presse, le président et fondateur de Ludia, Alex Thabet, a affirmé qu’il serait plus en mesure de livrer des informations sur le sujet ce vendredi.

Pour les employés touchés, la nouvelle a été brutale. « Tu te lèves pour entreprendre ta journée, comme chaque matin, et tu es convoqué à une réunion surprise t’annonçant que tu n’as plus d’emploi », raconte à La Presse un testeur de qualité qui ne souhaite pas révéler son nom, par crainte de représailles.

On nous a dit mercredi que l’entreprise serait exceptionnellement fermée jeudi. On a senti que quelque chose se passait. Les 5 à 7 n’avaient plus lieu depuis quelques semaines.

Un testeur de qualité anonyme

La plupart des employés de Ludia travaillent de la maison. « On nous a expliqué qu’on recevrait un courriel pour nous dire quand des gens viendraient récupérer notre équipement de travail », poursuit-il.

« Même si on a un package de départ, c’est difficile à encaisser, car je ne l’ai pas vu venir, dit un autre employé qui a aussi requis l’anonymat. Et le projet de jeux vidéo sur lequel je travaillais était prometteur. Ça manque d’humanité, c’est insultant, mais c’est la norme dans l’industrie du jeu vidéo. C’est rare que ce soit fait avec tact et respect. »

Ce dernier a appris la nouvelle de son renvoi indirectement dès 10 h. « J’ai essayé de me connecter à mes différents logiciels de travail à distance, et on m’en a refusé l’accès », raconte-t-il.

« Sur une pente descendante »

Les personnes qui se sont confiées à La Presse parlent, par ailleurs, d’un avant – et d’après – Jam City. « Ludia est le meilleur employeur de jeux vidéo pour qui j’ai travaillé, affirme ce même ex-employé. Depuis l’acquisition, on est sur une pente descendante. On a vu des projets se faire annuler et des gens perdre leur emploi après ces annulations. »

« Depuis que notre entreprise a été achetée, je n’aimais pas la direction prise », dit une ex-employée, qui est partie d’elle-même il y a quelques mois et qui requiert l’anonymat, parce qu’elle cherche un autre emploi.

Je ne voyais plus d’avenir là-bas.

Une ex-employée anonyme

Ludia a été fondé en 2007, entre autres par Alex Thabet. À l’occasion d’un entretien avec La Presse, en octobre 2021, lors d’une visite de ses bureaux repensés pour l’après-COVID-19 et agrandis (60 000 pieds carrés), il avait déclaré : « Avec Jam City, on est mieux soutenus financièrement. L’argent n’est plus un enjeu. [L’ancien propriétaire] Fremantle, qui ne connaissait pas notre industrie et qui valorisait la rentabilité à court terme, nous limitait dans notre croissance future. On dépense 10 fois plus avec Jam City sur nos jeux. »