L’imposition du passeport vaccinal dans les magasins à grande surface continue de faire des vagues. Alors que Renaud-Bray exhorte le gouvernement à exempter l’industrie du livre et que Walmart sème la confusion sur les réseaux sociaux, les commerçants seront forcés de mettre la main dans leur poche pour fournir des appareils aux employés chargés de faire la vérification auprès des clients.

Le premier ministre François Legault a annoncé jeudi que, à partir du 24 janvier, les commerces d’une superficie supérieure à 1500 m2 devront exiger que les consommateurs présentent leur passeport vaccinal avant d’entreprendre leur magasinage. Costco, Walmart et Canadian Tire comptent parmi ces enseignes. Les supermarchés et les pharmacies, commerces essentiels, n’auront pas à se plier à cette nouvelle règle.

Qualifiant cette mesure d’« inéquitable » et de « pénalisante », le groupe Renaud-Bray demande au gouvernement Legault de faire marche arrière. « Le gouvernement a mal évalué les impacts de cette politique. Elle favorise les librairies de petite superficie, dont l’offre commerciale est restreinte et limitée », a déclaré le président du groupe, Blaise Renaud, dans un communiqué vendredi. « Nous ne disposons d’aucune information quant à la durée de la mesure. Il est donc impossible d’évaluer l’ampleur des impacts négatifs sur le public et les acteurs de la chaîne du livre. Nous exhortons donc le gouvernement à suspendre cette mesure dans le secteur du livre. »

Les récentes mesures risquent de forcer Renaud-Bray à réduire ses heures d’opération et à limiter l’accès à plusieurs de ses points de vente. La mesure impactera aussi directement les auteurs, illustrateurs et éditeurs québécois.

Blaise Renaud, président du groupe Renaud-Bray, dans un communiqué

Dans le cas de Renaud-Bray, également propriétaire d’Archambault, ce sont environ 5 magasins sur un total de 47 qui devront appliquer la mesure.

Confusion du côté de Walmart

Par ailleurs, Walmart – qui vend également des produits d’épicerie et de pharmacie – a semé la confusion dans la tête de certains de ses clients, jeudi en fin d’après-midi, en écrivant sur les réseaux sociaux que ceux-ci n’avaient « pas à présenter de preuve de vaccination pour magasiner » dans les commerces de l’entreprise. « Nous continuons de travailler avec les gouvernements partout au pays et nous suivons les restrictions », a-t-on écrit également.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Walmart a semé la confusion sur les réseaux sociaux jeudi, disant que le passeport vaccinal ne serait pas nécessaire dans ses magasins, avant de rectifier le tir vendredi.

Dans un courriel envoyé à La Presse vendredi matin, le directeur principal aux affaires publiques de Walmart, Steeve Azoulay, a tenté de rectifier le tir. « Il semble que certaines réponses sur Twitter aient été diffusées un peu avant la fin de la conférence de presse du gouvernement [jeudi] soir. Le commentaire a été corrigé sur Twitter depuis », a-t-il écrit.

M. Azoulay nous a par ailleurs fait parvenir la déclaration officielle de la multinationale. « Depuis le début de la pandémie, Walmart a déployé tous les efforts possibles pour assurer un environnement sécuritaire pour ses clients et associés et pour se conformer aux exigences gouvernementales. Assurer une expérience client sécuritaire reste une priorité absolue. Suite à l’annonce [de jeudi], nous prendrons le temps d’analyser soigneusement le décret du gouvernement à venir. »

Achat de téléphones

En plus de l’incompréhension et du questionnement occasionnés par l’annonce de Québec, la nouvelle règle obligera bon nombre de commerçants à acheter des téléphones qui permettront aux employés de scanner les passeports vaccinaux et ainsi éviter que ceux-ci utilisent leur appareil personnel. C’est le cas notamment de Christian Bélair, directeur général de la quincaillerie Lortie et Martin, à Sainte-Agathe-des-Monts. Les magasins Renaud-Bray fourniront également de l’équipement à leurs employés. « On va se procurer deux cellulaires dans lesquels on va télécharger l’application, indique M. Bélair. La personne à la porte va scanner les passeports et s’il y a un attroupement, on va demander à une deuxième personne de venir scanner. »

« Depuis 22 mois, 78 heures par semaine, on a quelqu’un à la porte qui s’assure que les gens se lavent les mains – on leur donne des choix de savon –, on a des gens qui donnent des paniers, ajoute-t-il. Je suis directeur général et comme je n’ai pas d’employé de 7 h à 8 h le matin, eh bien, c’est moi qui suis à la porte. »

Ainsi, M. Bélair tient à souligner que bien que sa quincaillerie soit une grande surface – presque 4000 m–, il doit lui aussi, comme les plus petits, jongler avec la pénurie de main-d’œuvre, ce qui l’oblige à assumer plusieurs rôles au cours d’une même journée afin de servir les quelque 700 clients qui mettent les pieds dans le magasin quotidiennement. Le gouvernement a justifié sa décision de ne pas imposer le passeport dans les plus petits magasins en soulignant que ceux-ci manquent cruellement d’employés.