Le bras de fer continue entre la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) et son deuxième actionnaire. Ce dernier reproche à l’entreprise montréalaise d’avoir échoué à attirer son candidat favori et lui demande de prendre une pause dans ses recherches pour dénicher son prochain dirigeant – ce qui ne semble pas dans les plans.

TCI Fund Management tentait d’installer Jim Vena, un vétéran de l’industrie membre de la haute direction du transporteur ferroviaire américain Union Pacific jusqu’à la fin de 2020, aux commandes du CN. L’homme de 61 ans s’est désisté, mais les raisons n’ont pas été dévoilées.

Le fonds spéculatif londonien, qui détient une participation de 5,2 % dans le plus important chemin de fer au pays, estime que le processus mis en place par le conseil d’administration du CN était « imparfait » et « peu fiable ».

Nous ne sommes pas surpris que le conseil n’ait pas réussi, une fois de plus, à attirer le meilleur candidat pour le poste.

TCI Fund Management, dans une déclaration, jeudi

Selon la firme, les recherches devraient être retardées jusqu’à l’issue d’une assemblée extraordinaire des actionnaires prévue le 22 mars, où elle espère que ses quatre candidats au conseil d’administration seront élus.

Le CN prévoit pour sa part annoncer le mois prochain l’identité de la personne qui succédera à Jean-Jacques Ruest, son actuel président-directeur général, qui doit en principe tirer sa révérence à la fin de janvier. TCI demandait la démission de M. Ruest.

« Les actionnaires [pourront] voter pour choisir les personnes qui devraient mener la recherche vitale d’un chef de la direction, estime la firme. La personne qui occupera le poste […] doit avoir la certitude qu’elle tirera profit de l’appui indéfectible du conseil, ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle. »

Le CN n’a pas répondu à la sortie du fonds spéculatif. L’entreprise a dirigé les questions envoyées par La Presse vers son communiqué publié lundi dernier dans lequel elle soulignait que ses recherches se poursuivaient. TCI a refusé de préciser les raisons ayant incité M. Vena à se retirer de la course à la direction.

Pressions « efficaces »

Avec une participation d’environ 8,4 %, TCI est également le principal actionnaire du Canadien Pacifique (CP), le principal concurrent du CN, ce qui soulève des questions chez certains observateurs du secteur ferroviaire.

L’analyste Walter Spracklin, de RBC Marchés des capitaux, estime qu’il est peu probable que le CN reporte la nomination de son prochain dirigeant.

Spécialiste du droit réglementaire, l’avocat Mark Warner, de la firme Maaw Law, à Toronto, s’attend à voir TCI poursuivre ses démarches pour tenter de s’installer au conseil d’administration du CN.

Les pressions de TCI ont été efficaces. Le fonds semble avoir joué un rôle dans la décision prise par [M. Ruest] de céder sa place.

Mark Warner, avocat spécialiste du droit réglementaire

C’est au printemps que TCI a commencé à critiquer publiquement le CN alors que le chemin de fer tentait d’acquérir le Kansas City Southern (KCS), également convoité par le CP. L’entreprise américaine a finalement opté pour l’offre d’achat du Canadien Pacifique en septembre dernier.

De l’avis de la firme britannique, plutôt que de se lancer dans un projet d’acquisition coûteux, le CN aurait dû s’efforcer d’améliorer l’efficacité de ses activités.

M. Warner estime que la présence de TCI au sein de l’actionnariat du CN et du CP soulève des questions en matière de concurrence et croit que les autorités réglementaires devraient se pencher sur la situation.

Le fonds n’a pas voulu répondre aux questions envoyées par La Presse relativement à ses participations dans les deux principaux chemins de fer au pays.