(Montréal) Le syndicat des employés de la Laurentienne estime que le vote sur la révocation de son accréditation sera « loin d’être la fin de l’histoire » au moment où la direction de la banque se fait reprocher de s’ingérer illégalement dans le processus.

À la veille de la tenue du vote, des dirigeants du SEPB-Québec, affilié à la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), ont dénoncé un climat de peur qui pèse sur leurs membres.

« C’est un droit de se syndiquer. C’est un droit aussi de ne pas se syndiquer. Mais ce droit-là, il appartient aux travailleurs et travailleuses, et aucunement à l’employeur », a martelé le président de la FTQ, Daniel Boyer, dimanche.

Il réagissait en conférence de presse à des informations de l’agence QMI selon lesquelles la direction s’implique en faveur de la désyndicalisation et se tient informée des positions des employés.

« On pourrait aujourd’hui déchirer notre chemise et tout casser, a ajouté M. Boyer. Mais on y croit en cette banque-là, les employés y croient et c’est pour ça qu’on est ici à tendre la main. »

PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE

Le président de la FTQ, Daniel Boyer

Il ne s’agit pas des premières allégations de pratique déloyale soulevées contre l’employeur, la Laurentienne entretenant depuis plusieurs années des relations houleuses avec son syndicat.

Une plainte déposée à cet effet en janvier a retenu l’attention du Conseil canadien des relations industrielles (CCRI), qui a déterminé que ces allégations sont sérieuses et méritent un examen approfondi. Si elles s’avèrent fondées, le tribunal administratif pourrait invalider la demande de révocation.

Ainsi, même si le scrutin est maintenu, son issue ne marquera pas la fin de cette saga, a souligné Pierrick Choinière-Lapointe, du SEPB-Québec.

De son côté, l’institution financière se défend de se mêler des affaires syndicales. « La direction de la Banque Laurentienne respecte l’indépendance du processus qui suit actuellement son cours », a déclaré le conseiller en communications Fabrice Tremblay dans un courriel à La Presse Canadienne.

Un deuxième vote en trois ans

Les syndiqués participeront cette semaine à leur deuxième vote en trois ans. En 2018, ils s’étaient prononcés à plus de 60 % en faveur du maintien de leur syndicat. Une requête précédente avait aussi été écartée par le CCRI, qui avait conclu que des signatures avaient été falsifiées.

Ces tentatives répétées ont toutes été menées par un même employé, Jonathan André Leclerc, « qui semble disposer de moyens illimités », a souligné M. Choinière-Lapointe.

La présidente du syndicat local, Julie Tancrède, estime que la direction de l’institution financière déploie la même stratégie depuis maintenant cinq ans.

« La banque fait des rencontres d’employés, passe des messages antisyndicaux, rapporte-t-elle. Les employés vivent énormément de pression. Nos membres se sentent menacés, intimidés. »

M. Boyer reproche par ailleurs à la direction de ne pas reconnaître le syndicat comme interlocuteur et de refuser de rencontrer ses représentants — du jamais vu en ses 40 ans de carrière, dit-il.

La Laurentienne réplique que sa nouvelle présidente et chef de la direction s’est donné comme priorité de « rencontrer des employés et des clients de tous les secteurs de la banque » à son arrivée. Rania Llewellyn est en poste depuis le 30 octobre.

Les quelque 600 syndiqués, qui représentent environ 20 % de l’effectif total de la banque, se trouvent essentiellement dans des succursales à travers le Québec et dans les bureaux corporatifs de Montréal. Ils étaient environ 2000 en 2015, avant le déploiement du plan de transformation qui s’est notamment traduit par la fermeture et la fusion de succursales ainsi que l’élimination de services au comptoir au profit d’un virage vers le conseil financier et les services numériques.

La Laurentienne est la septième banque en importance au pays et la seule qui est syndiquée.