Des bagagistes d'Air Canada ont causé toute une perturbation ce matin à l'aéroport Montréal-Trudeau en déclenchant subitement une grève illégale en solidarité avec des confrères torontois sous le coup d'une suspension. Le coup de force a compliqué le départ ou l'arrivée de plusieurs dizaines de clients du transporteur.

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La situation est cependant en train de rentrer dans l'ordre, mais les effets du débrayage pourraient se faire sentir pendant quelques jours.

À la billetterie d'Air Canada, les voyageurs étaient nombreux à faire la file devant un comptoir où un seul employé était affecté, alors que s'y trouvent six postes de travail, qui ont petit à petit été occupés par des employés appelés en catastrophe.

Une quarantaine de vols ont été annulés ou retardés à Montréal seulement. Quant aux bagages, ils étaient pris en otage par les grévistes, dont l'action était «illégale» selon la direction de l'entreprise.

C'est que toutes les valises déposées sur les tapis roulants, déjà acheminées vers les avions ou prises entre deux vols, ne pouvaient être récupérées. Donc, les voyageurs avaient toujours la possibilité d'acheter des billets pour d'autres vols, sans toutefois savoir ce qu'il adviendrait de leurs bagages.

Voyageurs en colère

«C'est fou. Ça ne fait aucun sens», tonnait Marcia Brown, d'Ottawa. Avec ses enfants, elle souhaitait s'envoler pour Kingston en Jamaïque, pour se rendre au chevet de son père qui vient d'y subir une chirurgie.

«Après huit ans ici, c'est la première fois que mes enfants retournent voir leur grand-père. Je vais acheter des billets sur WestJet, mais je n'ai aucune idée de ce qui arrivera à mes valises, Air Canada ne nous dit rien», déplorait-elle.

Annick Saint-Pierre elle, devait se rendre au Japon avec son copain, via Chicago.

«La connexion à Chicago est déjà manquée. Mon copain essaie de savoir ce qui se passe avec nos bagages, mais il n'a pas de nouvelles. Je comprends la raison de la protestation, mais ce n'est pas la meilleure façon de mettre le public de leur côté», a-t-elle commenté, alors qu'elle faisait la file pour obtenir des billets sur un nouveau vol.

«Je ne crois pas que ce soit la meilleure idée de faire ça le jour le plus achalandé de la semaine. Ils ne peuvent ruiner les plans des gens comme ça», a renchéri Christian Gow, un skieur de fond albertain qui désirait rentrer chez lui après les championnats canadiens disputés ces derniers jours à Québec.

La source du débrayage

Ce chaos spontanément planifié par le groupe de bagagistes survient au lendemain de la suspension d'un groupe de leurs confrères, à Toronto.

C'est que la ministre fédérale du travail, la conservatrice LisaRaitt, est descendue d'avion à l'aéroport Pearson de Toronto jeudi soir. Des employés de soutien d'Air Canada, devant lesquels elle passait, lui auraient exprimé leur façon de penser sur sa décision de retirer le droit de grève aux employés d'Air Canada. D'autres auraient applaudi.

«Ils se sont fait immédiatement retirer leur passe donnant accès à l'aéroport et leur permettant de travailler. Une suspension possiblement de trois jours», déplore le représentant syndical montréalais Richard de Stephano.

«Si en plus de se faire retirer notre droit de grève, on se fait retirer notre droit de s'exprimer, où va-t-on ?», questionne l'employé.

Vers 9h, ils ont reçu de leur employeur la consigne de rentrer au travail, faute de quoi eux aussi seraient sanctionnés.

«Ils nous ont même dit que si on rentrait tout de suite, ça aiderait peut-être à une reprise des négociations», a indiqué M. de Stephano. La convention collective de son groupe de travail est échue depuis un an et les négociations sont rompues depuis un bon moment.

Mais il est sceptique quant à cette promesse de l'employeur.

«C'est Air Canada. Ce qui est bon dans cinq minutes ne l'est peut-être plus dans 10», conclut-il.

Des pilotes dont les vols ont dû être annulés en raison du débrayage ont confié que cette action perturbera la vie des voyageurs même si elle n'aura duré que quelques heures.

«Ça va causer un minimum de deux jours de chaos. Le temps de réacheminer les bagages. Et demain, la compagnie va devoir décider quels vols sont repris de façon prioritaire», a confié un pilote qui devait s'envoler vers Cancun.

Mais ceux-ci refusent de condamner l'action des bagagistes, qu'ils sentent comme eux être muselés par la décision conservatrice de retirer le droit de grève aux travailleurs d'Air Canada.

«Le gouvernement conservateur devrait et forcer Air Canada à négocier avec ses employés. Curieusement, depuis que les conservateurs sont majoritaires au pouvoir, la direction d'Air Canada refuse de négocier avec ses employés», déplore un autre pilote qui a préféré ne pas s'identifier.

«Nous avons obtenu une injonction et les employés reprennent le travail à Toronto et Montréal. Nos opérations devraient être de retour à la normale vers midi. Notre priorité est d'acheminer nos passagers à leur destination le plus rapidement possible. Nous avons mis en place notre politique de modification des réservations pour nos passagers qui devraient comme a l'accoutumé toujours vérifier l'état de leur vol avant de quitter pour l'aéroport», a de son côté indiqué la porte-parole d'Air Canada, en réaction au débrayage de ses employés.