Le Canada et le Québec veulent développer la filière des batteries pour les véhicules électriques et contribuer à réduire la dépendance du monde occidental envers les fournisseurs asiatiques. Il s’agit d’un défi considérable, dont l’ampleur est probablement sous-estimée.

La domination de la Chine dans ce secteur en forte croissance est tout simplement écrasante. À partir des minéraux indispensables et des principaux composants comme les cathodes et les anodes, jusqu’à la fabrication des batteries proprement dites, la mainmise de la Chine sur la filière est presque totale.

Six des dix plus importants fabricants de batteries lithium-ion dans le monde sont chinois, selon un recensement de Bloomberg. Ensemble, les fabricants chinois détiennent 77 % de la production totale de batteries dans le monde.

C’est aussi en Chine qu’il se vend le plus de voitures électriques dans le monde, soit 52 % des ventes totales en 2021.

Le marché des batteries croît de façon exponentielle. La capacité de production exprimée en gigawattheures passera de 1163 GWh en 2022 à 8945 GWh en 2027, estime Bloomberg.

Tenter de se faire une place sur cette autoroute où tout le monde roule à grande vitesse sera difficile. Surtout que le Canada et le Québec ne sont pas seuls à attendre leur tour sur l’accotement.

Les États-Unis et l’Europe sont aussi dans la course pour développer la filière des batteries et se concurrencent à coup de subventions et d’incitatifs fiscaux.

Le Canada (et le Québec) apparaissent cette année sur l'écran radar des pays les plus intéressants pour le développement de la filière des batteries. Le classement établi par BloombergNEF place le Canada en deuxième position, derrière la Chine.

Avant de trop se réjouir, il faut savoir que ce deuxième rang reflète surtout le potentiel minier du Canada et sa réglementation en matière d’environnement.

À l’heure actuelle, ni le Canada ni le Québec ne produisent des composants de batteries. Ni de véhicules électriques, d’ailleurs.

Une usine de GM en Ontario est en train d’être réoutillée pour produire des véhicules électriques. Un investissement de 5 milliards a été annoncé par LG et Stellantis pour fabriquer des batteries, encore en Ontario.

Au Québec, l’avancée la plus significative est le projet de la coentreprise GM et Posco, qui construisent des installations de production de cathodes à Bécancour. Le géant allemand BASF a aussi annoncé son intention de produire et de recycler des matériaux de batteries à Bécancour.

Sur la dizaine de milliards d’investissements annoncés dans la filière au Canada, la plus grande part concerne des projets miniers, comme le lithium et le graphite, qui entrent dans la fabrication des anodes et des cathodes. Les projets de Nemaska Lithium et Nouveau Monde Graphite en font partie.

Pour le Canada, les embûches les plus importantes à surmonter dans le développement de la filière des batteries ne viendront pas de la Chine, mais des États-Unis. Avec les milliards mis sur la table par l’administration Biden et son intention de garder les activités de fabrication en territoire américain, le Canada et le Québec ont déjà un handicap à surmonter.

Selon une analyse de la Réserve fédérale de Dallas, les fabricants de batteries sont enclins à s’installer à proximité des manufacturiers automobiles, à tel point que les investissements déjà annoncés dans la filière sont en train de construire une « Battery Belt » en plein milieu du territoire américain.1

En Amérique du Nord, le Canada et le Québec pourraient être dans la « game », mais surtout pour leurs ressources minières. À nous l’impact environnemental et à d’autres la valeur ajoutée de cette nouvelle ruée vers l’or ? C’est un risque à considérer.

Il ne faut pas oublier que la Chine ne disparaîtra pas du portrait. Malgré les efforts des pays qui veulent s’en affranchir, la Chine restera encore longtemps l’acteur dominant du marché des batteries, selon les projections de Bloomberg.

Consultez le document de l’antenne de la Réserve fédérale (Fed) de Dallas (en anglais)