La pandémie, la guerre et une crise énergétique sans précédent n’ont pas eu raison de l’économie allemande. Du moins pas encore.

La plus importante économie de la zone euro est toujours en vie. Après un recul de 0,3 % au dernier trimestre 2021, son produit intérieur brut a crû de 0,2 % au premier trimestre 2022. Pendant la même période, l’économie de l’Italie a plongé de 0,3 %, et celle de la France, deuxième économie d’Europe, a fait du surplace.

L’Allemagne évite donc la récession, définie par deux trimestres consécutifs de recul, pour le moment. Et même si les nuages s’accumulent dans le ciel, les patrons allemands restent optimistes.

Un sondage réalisé en avril par l’Ifo Institute, centre de recherche économique établi à Munich, indique que 7,1 % des entreprises allemandes sont inquiètes pour leur survie. C’est la moitié moins que le coup de sonde précédent réalisé en janvier, avant que la Russie envahisse l’Ukraine.

Les plus inquiètes de leur avenir sont les entreprises du secteur de l’hébergement et de la restauration, qui souffrent toujours des contrecoups de la pandémie. Dans la fabrication, le commerce de gros et la construction, le moral des patrons est encore bon, et les carnets de commandes sont bien remplis. Aucune des entreprises des secteurs de l’immobilier et des technologies de l’information ne craint le pire.

Dans beaucoup d’autres pays, la possibilité de manquer d’énergie la semaine prochaine pour continuer de fonctionner aurait probablement poussé les entreprises à sonner l’alerte générale.

S’ils ne craignent pas pour la survie de leurs entreprises, les patrons allemands s’attendent quand même à souffrir. La plupart, dans le même sondage, disent qu’il leur sera impossible de transmettre la hausse du coût de leurs intrants, surtout celui de l’énergie, à leurs clients, et que leur marge de profit rétrécira.

Si l’Allemagne cherche désespérément à réduire sa dépendance au gaz et au pétrole russes, ses entreprises, elles, doivent travailler très fort pour remplacer leurs fournisseurs russes, biélorusses ou ukrainiens. La plupart d’entre elles pensent d’ailleurs que ce ne sera pas possible à court terme.

Le défi est de taille quand on pense à la complexité des chaînes d’approvisionnement modernes. Un géant comme Volkswagen, par exemple, a 5000 fournisseurs directs, qui ont en moyenne 250 fournisseurs chacun, ce qui fait 1,25 million de fournisseurs pour une seule entreprise⁠1.

Le scénario du pire

Le pire reste probablement à venir pour l’économie allemande. Si les Russes coupent leur approvisionnement en gaz comme ils l’ont fait à la Pologne et à la Bulgarie, le secteur manufacturier allemand risque l’asphyxie.

Le gouvernement allemand a déjà des scénarios de contingence. Un plan de rationnement serait mis en place, avec une priorité à la population, aux hôpitaux et aux services essentiels.

L’économie allemande vient d’éviter la récession, mais la fin abrupte de l’approvisionnement en gaz russe lui ferait faire le grand plongeon. Selon la Bundesbank, la banque centrale allemande, l’économie reculerait de 2 % advenant ce scénario du pire.

Avant l’invasion de l’Ukraine, le ministère de l’Économie de l’Allemagne prévoyait une croissance de 3,6 % en 2021. Depuis, ces prévisions ont été revues à la baisse, à 2,2 %. C’est dire que la ligne est mince entre croissance et récession.

Les circonstances actuelles sont un test de résistance sans précédent pour la puissante machine allemande. Les entreprises aux commandes, heureusement, ne semblent pas paniquer.

1. Dans une économie mondiale de défiance, les coûts augmentent, une analyse d’Angelo Katsoras, analyste de la Banque Nationale

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