Après deux mois de pause estivale, la Banque du Canada pose un diagnostic plutôt pessimiste sur l’état de santé de l’économie, qui devrait se dégrader d’ici à la fin de l’année.

La banque centrale a laissé son taux directeur inchangé, à 1,75 %, hier. C’était largement attendu, même si d’autres banques centrales, dont la Réserve fédérale américaine, ont baissé leurs taux ou indiqué qu’elles étaient disposées à le faire à cause des tensions commerciales.

La Banque du Canada s’inquiète elle aussi de la détérioration de l’économie mondiale.

Le conflit commercial entre les États-Unis et la Chine s’est intensifié, souligne-t-elle. « Les échanges mondiaux se sont contractés et les investissements des entreprises ont faibli. Cela pèse plus lourdement sur le rythme de l’économie mondiale que la Banque l’avait prévu dans le rapport sur la politique monétaire de juillet. »

Au Canada, la croissance économique a été vigoureuse au deuxième trimestre, mais la banque centrale estime que cette poussée était temporaire. Elle s’attend à ce que le rythme ralentisse d’ici à la fin de l’année. Les investissements des entreprises sont anémiques et les dépenses de consommation sont faibles, note-t-elle.

Malgré cela, la Banque du Canada n’a pas donné beaucoup d’indices sur la direction que pourrait prendre son taux directeur.

Selon Benoit Durocher, économiste principal de Desjardins, la banque centrale a ouvert la porte à une baisse de taux, mais pas autant que certains observateurs s’y attendaient.

Ce qui m’apparaît clair, c’est que la Banque du Canada ne souhaite pas baisser ses taux, et elle ne le fera que si elle est obligée de le faire.

Benoit Durocher, économiste principal de Desjardins

Avec un taux directeur encore bas, à 1,75 %, les autorités monétaires n’ont pas beaucoup de marge de manœuvre, souligne de son côté Sébastien Lavoie, économiste en chef de la Banque Laurentienne. « La Banque du Canada pourrait peut-être baisser son taux dans les prochains mois, mais elle ne voit pas l’utilité d’annoncer un changement de cap si elle doit le baisser de seulement 25 points de base », estime-t-il.

Attendre et voir

La Banque du Canada a officiellement entrepris de relever ses taux, en juillet 2018, pour notamment mettre un frein à la course à l’endettement hypothécaire des Canadiens. Ce mouvement à la hausse des taux d’intérêt a été stoppé par la conjoncture incertaine, et la banque centrale hésite maintenant à revenir à des taux plus bas.

Des taux hypothécaires plus bas pourraient accroître les niveaux d’endettement déjà élevés des ménages, s’est inquiétée hier la banque centrale. Ce passage du communiqué des autorités monétaires est important, estime Sébastien Lavoie.

Il faudra que le portrait se détériore encore avant qu’il y ait un consensus pour une baisse des taux.

Sébastien Lavoie, économiste en chef de la Banque Laurentienne

La Banque du Canada révise actuellement ses hypothèses pour 2020, au Canada et dans le monde. Le résultat de cette révision sera connu dans le Rapport sur la politique monétaire du 30 octobre.

« On peut s’attendre à une révision à la baisse des provisions de croissance, prévoient les économistes de la Banque Nationale Krishen Rangasamy et Paul-André Pinsonneault. Si, comme nous le prévoyons, la situation évolue positivement sur le front commercial, la Banque du Canada n’aura pas besoin de modifier sa politique. »

Réunis hier à Toronto, les dirigeants des plus grandes banques canadiennes ont unanimement prédit un ralentissement de la croissance économique, en raison des tensions commerciales croissantes.

Baisse des exportations

Le Canada a exporté moins de marchandises en juillet, et il en a importé davantage. Résultat, le déficit commercial du pays avec le reste du monde s’est établi à 1,1 milliard, comparativement à 55 millions le mois précédent.

La baisse des exportations est surtout le fait du recul des ventes de pétrole et de blé, a rapporté Statistique Canada hier.

Les exportations vers les États-Unis ont baissé de 1,1 % et les importations américaines ont augmenté de 1,6 %. Le surplus commercial du Canada avec les États-Unis a donc fondu, passant de 5,5 milliards en juin à 4,6 milliards en juillet.