À mesure que les baby-boomers quitteront le marché du travail, le Québec perdra le moteur de son progrès économique des dernières décennies.

À mesure que les baby-boomers quitteront le marché du travail, le Québec perdra le moteur de son progrès économique des dernières décennies.

Tel est le signal d'alarme du professeur Pierre Fortin, du département des sciences économiques de l'UQAM, selon qui le rattrapage du niveau de vie québécois par rapport à l'Ontario s'explique essentiellement par des facteurs démographiques.

«Entre 1945 et 1960, le Québec a connu le plus important contingent de baby-boomers d'Amérique du Nord», a indiqué M. Fortin en fin de semaine, lors d'une conférence donnée à l'UQAM dans le cadre d'une journée portes ouvertes.

Selon lui, c'est ce bond de population qui a permis à la province de hisser son niveau de vie à 92 % de celui de sa voisine ontarienne.

«On est moins bons pour le reste», a-t-il souligné, faisant allusion au nombre d'heures travaillées par les Québécois et à leur productivité, soit les deux autres grands facteurs d'enrichissement d'une société, selon lui.

M. Fortin a ainsi fait écho aux propos mal reçus de Lucien Bouchard sur les horaires de travail moins chargés au Québec qu'en Ontario. «C'est important d'avoir une idée du phénomène. On a dit qu'il nous traitait de paresseux, mais ce n'est pas ça.»

Quant à la productivité québécoise, elle est passée de 99 % à 96 % de celle de l'Ontario, calcule Pierre Fortin.

«Dans la joute économique, on a une balle deux prises», résume-t-il.

M. Fortin prévoit que le taux d'emploi québécois continuera à augmenter encore quelques années et atteindra un plateau entre 2010 et 2012, après quoi les boomers partiront en masse pour la retraite et seront remplacés par des générations plus clairsemées.

Les adultes de 15 à 64 ans, qui comptent aujourd'hui pour 70 % de la population, n'en formeront plus que 15%, dit-il.

Les Québécois semblant nettement réticents à alourdir leur horaire de travail, Pierre Fortin privilégie l'augmentation de la productivité pour contrer la menace démographique.

Il recommande notamment des investissements dans le capital humain des entreprises, dans la technologie et dans le matériel, des baisses des impôts des compagnies, des taxes à la consommation plutôt qu'à l'épargne et un accent sur le développement de Montréal et de Québec, coeurs du développement économique.

«Mon observation, c'est que les gouvernements ne sont préoccupés que par les régions», déplore-t-il.

La démographie changera par ailleurs le marché de l'emploi en faisant rétrécir le secteur manufacturier et gonfler celui des services.

«Le poids des aînés dans l'économie va doubler, or ils n'achètent pas des biens, mais des services», note l'économiste.