Investissement Québec réclame la totalité des 17,2 millions de dollars, obtenus mais pas touchés, par les créanciers ordinaires de Steinberg en 2005, en alléguant qu'elle détient toujours une créance garantie de 40 millions.

Investissement Québec réclame la totalité des 17,2 millions de dollars, obtenus mais pas touchés, par les créanciers ordinaires de Steinberg en 2005, en alléguant qu'elle détient toujours une créance garantie de 40 millions.

Le coordonnateur du Plan d'arrangement avec les créanciers de Steinberg argue pour sa part qu'Investissement Québec (IQ) avait renoncé à toute part de la réalisation d'un portefeuille de litiges offert aux créanciers ordinaires dans le but de leur faire accepter le Plan d'arrangement. Faute de leur accord, Steinberg aurait été mise en faillite et liquidée dès 1993 ce qui aurait pu limiter davantage le recouvrement d'une partie des créances.

Devant le juge Daniel Tingley, de la Cour supérieure, Me Robert Tessier a fait valoir que sa cliente IQ n'avait jamais renoncé à sa créance de 40 millions. Tout au plus avait-elle accepté pendant 10 ans de se faire rembourser à même une partie des flux monétaires générés par la vente des éléments d'actif de la société, à l'exclusion du portefeuille de litiges.

Les beaux morceaux de cet actif étaient les chaînes Smitties et Valdi de même que des terrains en Arizona. Le produit de leur vente a permis de rembourser la dette bancaire de Steinberg de même que les réclamations des municipalités. IQ a même reçu 10 millions en 1996 en guise de premier remboursement d'un prêt de 50 millions.

Pour les 40 millions restants, elle n'a rien reçu, même si elle avait droit à 45% du flux monétaire de l'entreprise jusqu'en 2003, selon les termes d'une lettre la liant à Steinberg.

Bernard Mailhot, qui était à l'époque responsable du recouvrement à IQ, a reconnu devant la Cour que l'administration des flux monétaires de Steinberg était "sporadique". Et d'ajouter: "Mais il n'y avait jamais d'argent pour nous autres. S'il y en avait eu, on l'aurait pris."

Durant toute cette période, Me Tessier a reconnu devant la Cour que sa cliente avait renoncé par écrit à toucher le fruit de quelque litige remporté par Steinberg au nom des créanciers ordinaires.

Depuis 2003 cependant, IQ soutient que sa créance de 40 millions prime sur toutes les autres. Une fois les banques payées, IQ est devenu créancier de premier rang, en vertu du Plan d'arrangement. Cela lui donnerait le droit de mettre la main sur tout, y compris le fruit de la réalisation du portefeuille de litiges.

Cette prétention est cependant contestée par Me Gerald Nudleman, qui représente le coordonnateur du plan d'arrangement dans ce dossier qui s'étire depuis 14 ans. C'est en 1992 que Steinberg s'est placée sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers (C-36) et en 1993 que le Plan a été accepté.

"Le portefeuille de litiges a été accordé sans restrictions aux créanciers chirographaires (ordinaires) afin d'obtenir leur consentement au plan d'arrangement, a-t-il plaidé. La prétention d'IQ est inéquitable et dégoûtante."

Me Nudleman a cité en preuve des extraits d'une lettre du syndicat bancaire dans laquelle il reconnaît laisser aux créanciers ordinaires la réalisation du portefeuille de litiges.

Il a aussi plaidé que les droits auxquels IQ avait renoncé pendant 10 ans portaient sur les 55% restants du flux monétaire ainsi que les intérêts sur sa créance de 40 millions. Quant au portefeuille de litiges, IQ y avait renoncé dès le départ, sans quoi il n'aurait pu y avoir de consentement des créanciers ordinaires.

Me Nudleman a enfin fait valoir qu'IQ ne pouvait, en guise de prix de consolation, joindre les rangs des créanciers ordinaires puisque le plan d'arrangement précise qu'elle ne fait pas partie de cette catégorie.

Les 17,2 millions sur lesquels IQ a des prétentions proviennent d'un litige gagné en Cour d'appel en 2005 par Steinberg contre Provigo. IQ ne s'était pas manifestée auparavant et n'a jamais participé aux activités du Comité permanent des créanciers de Steinberg.

Le juge Tingley a informé la Cour qu'il fera tout pour rendre sa décision avant Noël.

Me Tessier a déjà indiqué par lettre à Me Nudleman qu'il pourrait interjeter appel d'un jugement défavorable.