Il y a des cycles d’investissement qui se répètent et qui poussent un investisseur à réinvestir dans une entreprise qu’il avait pourtant totalement délaissée quelques années plus tôt. C’est le cas de la Caisse de dépôt, qui réalise un retour dans le capital de Solotech, le leader mondial en audiovisuel et en technologies du divertissement, après avoir complètement liquidé sa participation dans cette entreprise il y a 10 ans.

Et, détail encore plus intéressant, c’est exactement pour les mêmes raisons qui avaient poussé la Caisse à prendre une participation importante dans Solotech, à l’époque, que l’institution a décidé d’y réinvestir, soit dans le but de participer activement à sa croissance à l’international.

En 2006, la Caisse de dépôt avait investi 20 millions dans Solotech pour épauler ses fondateurs afin d’attaquer le marché américain et européen de l’audiovisuel et du divertissement.

Solotech avait déjà une solide expertise et une réputation enviable dans le monde du divertissement pour sa capacité à réaliser l’habillage sonore et visuel de spectacles à grand déploiement lors de leur passage au Québec, que ce soient les tournées mondiales des Rolling Stones, de Paul McCartney ou du Cirque du Soleil.

En 2013, sept ans après son investissement de 20 millions, la Caisse de dépôt et les actionnaires fondateurs de Solotech ont vendu leur participation à trois acquéreurs : Claridge, la firme d’investissement de Stephen Bronfman, Desjardins Capital et Investissement Québec, qui en sont toujours les actionnaires depuis.

Ce retrait de la Caisse du capital de Solotech s’inscrivait dans un cycle d’investissement tout à fait conventionnel de sept ans, un échéancier classique pour ce type de placement en entreprise.

Dix ans plus tard, la Caisse revient pourtant à la charge en prenant une nouvelle participation au capital de Solotech avec encore une fois l’intention bien affichée de faciliter son expansion mondiale alors que l’institution deviendra son deuxième actionnaire en importance derrière Claridge. Ni la Caisse ni Solotech n’ont voulu toutefois dévoiler l’ampleur de l’investissement.

L’injection de nouveaux capitaux ne vise pas à racheter en partie ou en totalité l’un des trois actionnaires existants, mais bien à mettre à la disposition de l’entreprise du capital de développement.

Ce qui est évidemment bien accueilli par le président et chef de la direction de Solotech, Martin Tremblay, en poste depuis 2017 à la tête du groupe québécois du divertissement.

Avant de se joindre à Solotech, Martin Tremblay avait dirigé et assuré la croissance du studio Ubisoft de Montréal et de la division de jeux de Warner, notamment. Sa nomination chez Solotech visait justement à internationaliser le savoir-faire et les opérations de l’entreprise.

Une montée en puissance

Depuis 2018, Solotech a réalisé 10 acquisitions d’entreprises aux États-Unis et en Angleterre, principalement dans sa division d’intégration de systèmes audiovisuels, qui génère 60 % du chiffre d’affaires, et le groupe veut étendre son emprise en Europe, en Asie du Sud-Est et aux États-Unis.

« Quand je suis arrivé en 2017, on enregistrait des revenus de 150 millions, là on est rendu à 650 millions, et notre objectif est d’atteindre le milliard prochainement.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Martin Tremblay, PDG de Solotech

« Notre division événementielle – spectacle et divertissement – génère 40 % de nos revenus, et c’est notre division d’intégration de technologies audiovisuelles qui génère le plus de chiffre d’affaires, soit 60 % », m’explique Martin Tremblay.

Outre la sonorisation et l’habillage visuel des tournées de vedettes internationales comme Taylor Swift, P!nk, Adele, The Weeknd ou Charlotte Cardin, Solotech transforme et fait la gestion audiovisuelle d’hôtels, comme le Caesars Palace de Las Vegas, d’aéroports comme celui de Hong Kong, de gares, d’immeubles de bureaux, ou encore la signalisation d’autoroutes.

« On fait tout l’éclairage et le son du Centre Bell durant les matchs de hockey, on gère les systèmes d’imagerie sur les bandes, les projections sur la glace. On fait ça partout dans le monde », souligne le PDG.

L’entreprise compte aujourd’hui 20 bureaux stratégiques et emploie 2000 personnes au Canada, aux États-Unis, en Angleterre, en Allemagne ainsi qu’à Macau et à Hong Kong. Le groupe veut élargir son empreinte en Europe, en Asie du Sud-Est, en Amérique du Sud et poursuivre le mouvement aux États-Unis, où Solotech réalise tout de même déjà 65 % de ses revenus annuels.

« On va prendre de l’expansion en faisant des acquisitions, mais en réalisant aussi des implantations dans des régions comme les Émirats arabes et le Qatar, où il y a beaucoup de projets en développement et beaucoup d’argent qui va se dépenser », anticipe Martin Tremblay.

Chose certaine, le secteur du divertissement n’est pas présentement touché par un quelconque ralentissement, et Martin Tremblay n’en voit pas survenir à court terme – les tournées de spectacles fonctionnent à plein régime et les amphithéâtres sportifs affichent complet.

Un recul envisageable pourrait toutefois survenir du côté de l’immobilier de bureau, où un ralentissement économique risque de repousser certains projets plus extravagants. Chose certaine, la Caisse de dépôt sera là pour épauler l’expansion du groupe pour au moins les sept prochaines années…