(Ottawa) La ministre des Finances, Chrystia Freeland, déposera son prochain budget le mardi 16 avril à la Chambre des communes.

La grande argentière du pays déposera son budget dans un contexte économique plus difficile en raison de la hausse du coût de la vie, de la crise du logement et des taux d’intérêt encore élevés qui font grimper les dépenses du gouvernement fédéral. Elle doit aussi composer avec de fortes pressions venant des alliés de l’OTAN pour une augmentation des dépenses militaires et des pressions de son principal allié à la Chambre des communes, le Nouveau Parti démocratique (NPD), pour une hausse des dépenses pour financer des programmes sociaux comme le régime universel d’assurance médicaments.

Il s’agira du quatrième budget que déposera Mme Freeland, qui a été nommée au ministère des Finances en août 2020 afin de prendre la relève de l’ancien ministre Bill Morneau.

Depuis que le gouvernement libéral de Justin Trudeau est arrivé au pouvoir en 2015, il n’a jamais présenté un budget équilibré. Dans son dernier énoncé économique, présenté en novembre, la ministre Freeland a indiqué que le ralentissement de l’économie canadienne et la hausse des taux d’intérêt plombent plus que jamais les finances du gouvernement fédéral et forcent les mandarins du ministère à revoir à la hausse la taille des déficits au cours des cinq prochaines années.

La plus récente revue financière, publiée en décembre par le ministère des Finances, confirme d’ailleurs l’état plus précaire des finances publiques. Durant les neuf premiers mois de l’exercice financier 2023-2024, soit d’avril à décembre, Ottawa a affiché un déficit budgétaire de 23,6 milliards de dollars, comparativement à 5,5 milliards de dollars pour la même période en 2022-2023. Les trois derniers mois d’un exercice financier sont d’ailleurs les plus coûteux pour le gouvernement fédéral.

À eux seuls, les frais d’intérêt pour les neuf premiers mois de l’exercice financier en cours s’élevaient à 35 milliards, soit environ 10 milliards de plus qu’à la période correspondante de l’exercice financier précédent.

Dans son énoncé économique de novembre, la ministre Freeland estimait malgré tout que le déficit devrait s’établir à 40 milliards en 2023-2024, comme cela était prévu dans le dernier budget fédéral, déposé en mars 2023. Mais le manque à gagner devrait être plus élevé durant chacun des exercices financiers suivants. Ainsi, elle prévoyait que le déficit devrait s’élever à 38,4 milliards en 2024-2025 (+3,4 milliards), à 38,3 milliards en 2025-2026 (+11,5 milliards), à 27,1 milliards en 2026-2027 (+11,3 milliards) et à 23,8 milliards en 2027-2028 (+9,8 milliards).

Au cours des derniers mois, la ministre Freeland a défendu bec et ongles la gestion des finances publiques du gouvernement Trudeau, répétant que les agences de notation ont maintenu la cote AAA du Canada et que le pays affiche le déficit le moins élevé des pays du G7, entre autres choses.

Dans une déclaration publiée lundi, le Conseil canadien des affaires (CCA) a affirmé que le gouvernement Trudeau doit impérativement assurer un meilleur contrôle des finances publiques et mettre en œuvre des politiques qui vont soutenir la croissance de l’économie canadienne.

« Le gouvernement a l’occasion de mettre en œuvre des politiques de croissance, y compris un grand nombre de ses propres engagements antérieurs, sans imposer un fardeau financier injuste aux générations futures », a soutenu Goldy Hyder, président et chef de la direction du CCA, dans une déclaration écrite. « Cette approche garantira la viabilité à long terme des programmes sociaux et des niveaux de vie qui nous sont chers, tout en permettant au Canada de rivaliser et de réussir sur la scène internationale. »

Selon le CCA, la ministre Freeland doit éviter d’introduire de nouvelles dépenses nettes afin de ne pas alimenter l’inflation et miner le dur travail de la Banque du Canada.

Le gouvernement Trudeau devrait aussi procéder à un examen sérieux des dépenses de programmes. Le CCA a souligné que la taille de la fonction publique fédérale a bondi de 37,9 % depuis 2016 sous la houlette des libéraux. « Il est temps de procéder à un examen complet des programmes. Une évaluation sérieuse des dépenses publiques actuelles devrait entraîner des économies réelles et permettre au gouvernement de réaffecter des fonds à des priorités essentielles telles que la défense nationale et la sécurité économique, la transition énergétique, la recherche et le développement, ainsi que l’adaptation aux changements climatiques », selon M. Hyder.

Le CCA exige aussi un point d’ancrage fiscal solide qui limite les coûts du service de la dette à un maximum de 10 % des recettes à l’avenir. Ce point d’ancrage préserverait la capacité du gouvernement « à financer les programmes sociaux dont les Canadiens dépendent et ne fera pas peser une charge fiscale excessive et injuste sur les générations futures ».

Également, le CCA exhorte le gouvernement fédéral à présenter un plan afin d’accroître l’efficacité des processus d’évaluation environnementale et de délivrance de permis pour les grands projets. « Cela montrerait que le Canada est prêt à agir avec la rapidité et l’ambition nécessaires pour atteindre nos objectifs en matière de carboneutralité », selon M. Hyder.