Dans L’argent et le bonheur, notre journaliste Nicolas Bérubé offre chaque dimanche ses réflexions sur l’enrichissement. Ses textes sont envoyés en infolettre le lendemain.

Je parle souvent ici des rendements des placements à long terme, et j’utilise le chiffre de 7 %. Une lectrice considère que c’est « inatteignable ».

« Qui peut espérer 7 % de rendements annuels ? écrit-elle. Ma mère investit dans son REER depuis sa vingtaine. Elle a toujours fait affaire avec un professionnel, elle a parfois été mal conseillée. Aujourd’hui, à 60 ans, elle me dit qu’atteindre 6 % demeure un rêve. Que peut-on faire pour ne plus espérer, mais faire fructifier notre argent ? »

D’abord, bravo à votre mère d’avoir investi durant la majorité de sa vie adulte. C’est une victoire, peu importe les rendements.

Ensuite, il y a un mythe voulant que pour avoir du succès à la Bourse, il faut : 1) faire carrière en finance ; 2) aimer lire des rapports trimestriels ; 3) se lever à 4 h du matin et prendre son premier café devant huit écrans pour suivre les marchés européens et asiatiques tout en analysant les ratios alpha, bêta et de Sharpe de ses placements.

Je ne travaille pas en finance. Je ne lis pas de rapports trimestriels. Et je ne me lèverai à 4 h du matin que sous la menace (et encore). Pourtant, mon rendement à long terme est meilleur que celui de 95 % des investisseurs professionnels.

Comment est-ce possible ?

C’est que j’ai appris à 1) m’asseoir sur mon derrière et laisser le marché travailler pour moi ; 2) payer très peu de frais.

Allons-y avec des données concrètes.

Un portefeuille diversifié composé d’actions canadiennes, américaines et internationales a produit un rendement moyen de 9 % par année depuis 50 ans, selon les tests rétroactifs de Justin Bender, de PWL Capital⁠1. Ça, c’est le passé. Le rétroviseur. On ne connaît pas l’avenir, mais la quasi-totalité des analystes s’attend à ce que les actions continuent d’être le meilleur véhicule de placement pour les années à venir.

Le problème avec les actions, c’est qu’elles vivent des épisodes terrifiants : des chutes de 10 à 50 % sont inévitables. C’est pour cette raison qu’un portefeuille équilibré contient aussi une autre classe d’actifs : les obligations.

Les obligations – essentiellement de l’argent que l’on prête à un gouvernement ou une entreprise – ont des rendements moins élevés que les actions, mais tendent à stabiliser notre portefeuille.

La façon la plus simple d’acquérir des actions et des obligations est par l’entremise des fonds négociés en Bourse indiciels (FNB). Vendus par des firmes comme BMO, Vanguard ou BlackRock, notamment, ces fonds contiennent des actions de l’ensemble des entreprises d’un marché boursier d’un pays donné. Des FNB d’obligations viennent compléter le tableau.

Pour généraliser – vous devriez parler à un planificateur financier pour avoir l’heure juste –, les jeunes investisseurs, qui ont des décennies devant eux, peuvent avoir un portefeuille « croissance » composé à 80 % d’actions et à 20 % d’obligations. Les gens en milieu de parcours ou à la retraite peuvent viser un portefeuille « équilibré » à 60 % d’actions, 40 % d’obligations.

Des fonds indiciels tout-en-un qui contiennent des milliers d’actions canadiennes, américaines et internationales, ainsi que des obligations, ont eu des rendements de 8,75 % pour la formule « croissance » et de 8,46 % pour la formule « équilibrée » par année en moyenne depuis 50 ans, selon les tests rétroactifs de M. Bender. Ces rendements incluent les frais de gestion des fonds, qui sont de 0,24 % par année, mais n’incluent pas les frais d’un professionnel qui gérerait nos placements. J’ai donné dans ce texte2 le nom de plusieurs fonds populaires.

Si vous faites affaire avec un professionnel, les chances sont grandes pour qu’il vous propose plutôt des fonds communs de placement.

Contrairement aux FNB indiciels, qui contiennent l’ensemble des entreprises d’un marché donné, les fonds communs sont assemblés par un gestionnaire, qui tente d’y inclure les « bonnes » sociétés, et d’en exclure les « mauvaises » afin d’améliorer les rendements ou la stabilité du fonds.

Est-ce que certains fonds communs battent le marché ? Bien sûr : si une firme propose des dizaines de fonds, il y en a toujours quelques-uns qui auront connu une excellente période récemment. Ce sont souvent ces « premiers de classe » qui sont ensuite présentés en priorité aux clients.

Malheureusement, la recherche nous montre qu’un fonds qui a bien fait dans une période performe souvent moins bien dans la période suivante. Et donc identifier un fonds ou un gestionnaire qui « bat » le marché pendant des décennies n’est évident qu’avec le recul.

Comme je l’écrivais plus tôt, 95 % des gestionnaires de fonds communs sous-performent leur indice de référence à long terme sur une base ajustée au risque, c’est-à-dire autant pour des fonds dynamiques que prudents, selon l’analyse S&P Indices Versus Active Funds (SPIVA)⁠3 publiée deux fois l’an depuis 2002.

Les fonds communs viennent aussi avec des frais de gestion de quatre à cinq fois plus élevés que ceux d’un FNB indiciel, donc souvent autour de 1 % par année. Cela vient s’ajouter aux frais prélevés par le professionnel qui s’occupe de nos placements.

L’investisseur doit donc dire adieu à 1,75 %, voire 2 %, de la taille de ses placements chaque année. Que les placements soient en hausse ou en baisse n’y change rien. Les performances vont et viennent ; les frais sont pour toujours.

En résumé : un portefeuille indiciel diversifié et équilibré a offert depuis des décennies des rendements annuels supérieurs à 6 %. Mais toutes sortes de raisons font que peu d’investisseurs ont capturé cette croissance.

Comment améliorer ses rendements ? Une option est de s’occuper soi-même d’un portefeuille de FNB indiciels dans son compte de courtage en ligne. C’est ce que je fais. Ma philosophie d’investissement est simple : je suis paresseux à 100 %. Peu importe l’état des marchés, peu importe les prédictions des experts, je ne vends jamais rien dans mon portefeuille. Cette stratégie me prend zéro minute par année à exécuter.

Apprendre à investir correctement est l’un des cadeaux les plus profitables qu’on puisse s’offrir. J’épargne des milliers de dollars par année en évitant les frais élevés et la sous-performance chronique des fonds communs – dollars qui continueront à travailler dans mon compte et à se multiplier pendant des décennies.

Cela dit, gérer soi-même ses placements n’est pas pour tout le monde. Les mauvais comportements d’investisseur (vendre dans une chute, passer d’un fonds à l’autre, trop peu investir, etc.) peuvent vite nous coûter beaucoup, beaucoup plus cher que de faire affaire avec un professionnel, peu importe les frais.

Pendant longtemps, les investisseurs se trouvaient donc dans une impasse.

Mais plus maintenant.

C’est que, depuis 2022, on peut continuer de faire affaire avec un professionnel tout en investissant dans des fonds communs indiciels à frais de gestion extrêmement bas. Bref, le meilleur des deux mondes.

Ces nouveaux fonds communs indiciels sont mis en marché par RBC et TD, mais tous les représentants en épargne collective y ont accès. Voici les fonds communs de placement (Série F) dont il s’agit :

Ces fonds peuvent être utilisés pour bâtir tous les types de portefeuilles, allant de dynamiques à prudents. Et même en retranchant environ 1 % en frais annuels pour le conseiller avec qui on fait affaire, on arrive à des frais totaux moins élevés que ce qui a été la norme au pays jusqu’ici. Sur de très longues périodes, épargner 0,50 % ou 0,75 % par année en frais peut vouloir dire des dizaines de milliers de dollars, voire plus, dans nos poches.

Est-ce que les marchés continueront à nous offrir des rendements généreux à long terme ? Aucune idée. Personne ne contrôle la direction des marchés.

Ce qu’on contrôle, en revanche, ce sont notre comportement et les frais que l’on paie. Notre tâche est de nous en rendre compte. Et de laisser le marché faire le reste.

1. Consultez les tests rétroactifs de Justin Bender, de PWL Capital (en anglais) 2. Lisez « Comment investir en Bourse quand on n’y connaît rien » 3. Consultez l’étude de SPIVA (en anglais)