Trois ans après le lancement de l’Offensive de transformation numérique (OTN), environ 10 000 PME québécoises ont été accompagnées dans l’évaluation de leurs projets de transformation numérique. Le gouvernement Legault veut maintenant savoir combien d’entre elles passeront de l’étude de faisabilité à l’implantation.

Il est encore trop tôt pour évaluer toutes les retombées de l’OTN, répond le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, mais il se dit encouragé par le nombre d’entrepreneurs qui ont été accompagnés jusqu’à maintenant.

« On a près de 10 000 entreprises qui sont accompagnées, alors moi je trouve ça intéressant », dit le ministre en entrevue pour faire le bilan de l’OTN. Il prévoit que ce nombre doublera à 20 000.

En mars 2021, le gouvernement lançait son Offensive de transformation numérique (OTN). Doté initialement d’une enveloppe de 130 millions, bonifiée à 240 millions, le programme procure une aide pouvant aller jusqu’à 50 % des coûts d’une étude de faisabilité sur le projet de transformation numérique d’une PME. L’autre moitié est payée par l’entreprise.

« À l’échéance de ça, l’entreprise peut décider si oui ou non, elle va de l’avant » en implantant les recommandations du rapport, seule ou en bénéficiant de l’aide d’un autre programme, s’il y a lieu.

Le gouvernement ne choisit pas directement les entreprises bénéficiaires. Il verse plutôt l’aide à des organismes qui accompagneront les PME de leur industrie. Plus d’une trentaine d’organismes ont participé au programme, dont Inno-centre, le Conseil de la transformation alimentaire du Québec (CTAQ), le Regroupement des entreprises en automatisation industrielle (REAI) ou l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ).

Pour M. Fitzgibbon, cette aide aux entreprises est un moyen parmi d’autres pour aider l’économie du Québec à rattraper son retard de productivité. « Je voulais qu’on ait un mécanisme pour que les entreprises puissent réaliser le bénéfice potentiel de la numérisation », explique-t-il.

Une évaluation plus détaillée

Il est encore tôt pour faire le bilan exhaustif du programme, répond le ministre de l’Économie. De l’enveloppe de 240 millions, 191 millions ont été versés à des organismes, mais ceux-ci n’ont pas encore déployé la totalité du soutien.

L’organisme Inno-centre, qui a reçu une première aide de 20 millions en 2021, a effectué un sondage auprès d’un échantillon de participants après l’étude de faisabilité. Les répondants ont indiqué qu’après avoir fait leur étude de faisabilité, ils ont été en mesure d’améliorer leur productivité de 22 %. Québec a d’ailleurs octroyé une autre tranche de 23,6 millions à l’organisme.

M. Fitzgibbon émet, lui-même, un bémol lorsqu’il évoque le résultat. Cet échantillon n’est probablement pas représentatif de toutes les industries et de toutes les entreprises qui auront obtenu une étude de faisabilité. « Ça serait un peu agressif (optimiste) de mettre ce chiffre-là pour tout le monde », admet-il d’emblée.

Le gouvernement évaluera plus en détail les retombées de l’OTN avant de décider s’il le reconduit au-delà de mars 2025. « Durant l’année prochaine, je vais vouloir qu’on regarde plus précisément le bénéfice qu’on a eu du programme. »

Avant de prendre une décision, M. Fitzgibbon veut connaître le nombre d’entreprises qui ont été accompagnées, la proportion de celles qui ont été de l’avant avec leurs projets et avoir des données sur l’impact des projets sur la productivité de ces entreprises. « On va leur demander un compte rendu pour pouvoir avoir des données pour [décider] si on veut, par exemple, renouveler le programme. »

Le ministre veut aussi comprendre les raisons qui auraient pu faire en sorte que certaines PME décideraient de ne pas mettre à profit les conclusions de l’étude de faisabilité. « Est-ce que c’est une question d’argent ? Est-ce que c’était parce que les conclusions du rapport n’étaient pas assez probantes ? »

À la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), on croit que l’OTN a eu des retombées positives. Son vice-président pour le Québec, François Vincent, cite un sondage de la FCEI, publié en décembre, qui démontre qu’une plus grande proportion de PME québécoises a entamé un processus d’automatisation par rapport à la moyenne canadienne.

Le rapport porte sur l’automatisation plutôt que la transformation numérique, mais il donne un aperçu de l’appétit des PME qui veulent améliorer leur productivité, précise M. Vincent.

Il reste toutefois un défi pour faire connaître les programmes gouvernementaux, comme l’OTN, auprès des plus petites PME. « Il doit en faire plus pour rejoindre les plus petites PME », plaide M. Vincent.

M. Fitzgibbon est d’accord sur le fait que la promotion du programme représente un défi. Il estime que près de 150 000 PME pourraient potentiellement améliorer leurs activités avec une transformation numérique.

« C’est du monde, 150 000 personnes, souligne-t-il. Les ressources humaines qu’il faut pour contacter ces personnes-là pour pouvoir travailler avec eux, c’est pharaonique. Alors, c’est sûr que c’est un enjeu. »

M. Fitzgibbon espère que la révision du programme démontrera qu’il mérite d’être renouvelé. « On a un enjeu de productivité au Québec, je pense que ce n’est pas une surprise. C’est (l’OTN) un moyen, selon moi, pour combler cet écart-là. »