Dans chaque entreprise se cache au moins un employé qui se distingue tant par son efficacité que par l’appui qu’il offre à ses collègues ou l’appréciation des clients. La Presse vous a demandé d’identifier cet employé dans votre entourage. Nous vous présenterons leur histoire.

Au centre de distribution Sobeys à Boucherville, Richard Potvin a des allures de couteau suisse. Le travail de ce sexagénaire qui compte 38 ans d’ancienneté va au-delà de la conduite de semi-remorque afin d’approvisionner des supermarchés IGA. C’est lui qui prend les recrues sous son aile et agit comme une sorte de baromètre de la sécurité routière.

En bref

  • Nom : Richard Potvin
  • Âge : 64 ans
  • Titre : Chauffeur-formateur
  • Employeur : Sobeys

La bonne nouvelle pour son employeur : la multiplication des travaux routiers, entraves et cônes orange n’a pas découragé ce chauffeur passionné. Pas question de lâcher le volant. Tout au plus, il lèvera peut-être le pied sur le nombre d’heures hebdomadaires passées au travail.

« Je ne pense pas à ma retraite encore, lance M. Potvin, en rigolant, lors d’une entrevue avec La Presse. C’est une passion. Il faut l’avoir, parce qu’il ne faut pas se le cacher : être chauffeur, ce sont de bonnes journées. Aujourd’hui, c’est ma grasse matinée, j’ai commencé à 5 h. D’habitude, c’est 3 h 30. Je me lève sans cadran. Quand tu te lèves sans cadran, c’est parce que tu aimes ta job. »

M. Potvin partage son temps entre le siège du conducteur et celui du passager. La raison ? Il est aussi le formateur de l’endroit – l’un des cinq centres de distribution de l’entreprise à travers le Québec – pour les chauffeurs depuis plus de 25 ans. Son parcours professionnel l’a aussi amené à enseigner dans une école privée pendant plus de sept ans.

Pour lui, le partage des connaissances est primordial. Bon nombre de recrues passent par les centres de formation en transport routier avant de devenir chauffeurs professionnels. Les trucs du métier qui ne s’enseignent pas à l’école, ils sont souvent enseignés par M. Potvin.

« Quelqu’un, par exemple, qui n’a aucune anticipation et qui freine à la dernière minute, la chose à faire, c’est de baisser son banc, illustre-t-il. Quand tu baisses le banc, la tête part par en arrière. Tu vas regarder plus loin et pouvoir mieux anticiper. Ce sont des trucs comme cela. Ça ne s’apprend pas. C’est de l’expérience. »

Un formateur avec un tel profil vaut son pesant d’or. Lorsque M. Potvin donne son feu vert, l’entreprise a l’esprit tranquille, affirme le directeur du centre de distribution, Daniel Parisé. Elle sait que le chauffeur sera « 100 % autonome ».

On a un très bon formateur et on lui fait entièrement confiance. Avec le temps, on a développé une bonne relation. Surtout avec Mélita [Robinson], qui est la cheffe du transport. Tu peux être un bon chauffeur, mais pas nécessairement être un bon formateur. Quand tu en as un, tu essaies de le garder le plus longtemps possible. On est chanceux d’avoir Richard pour quelques années encore.

Daniel Parisé, directeur du centre de distribution de Sobeys à Boucherville

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Richard Potvin, chauffeur et formateur au centre de distribution de Sobeys à Boucherville. À droite, Daniel Parisé, directeur du centre de distribution.

« À l’embauche, j’ai déjà passé le candidat en entrevue, ajoute Mme Robinson. Richard l’évalue. Après cela, on compare. Si le candidat a un bon potentiel, on dit oui. On travaille conjointement. On ne le laisse pas aller s’il n’est pas sécuritaire. »

Le savoir-faire de M. Potvin au volant d’un poids lourd se manifeste aussi à l’extérieur de Sobeys. Il est un habitué des honneurs du Championnat provincial des chauffeurs professionnels de camions, organisé par le Centre de formation du transport routier de Saint-Jérôme. La pandémie a fait en sorte que ce concours d’habiletés, où les manœuvres en espace restreint sont à l’honneur, n’a pas eu lieu depuis 2019.

N’empêche, le champion en titre, c’est lui. En plus d’obtenir la première place dans la catégorie « cinq essieux », c’est aussi M. Potvin qui est reparti avec le titre de « grand champion ».

« Théoriquement, c’est supposé recommencer l’année prochaine », dit M. Potvin.

Mauvaise nouvelle pour ses adversaires : il semble avoir le goût de défendre son titre.

« Je dis toujours qu’un moment donné, il faut savoir se retirer. Chaque année, on me demande d’y retourner, lance en riant M. Potvin. Moi, j’aime ça. Ce n’est pas une corvée. J’aime ça, la performance. »