Un segment de l’émission La journée (est encore jeune) diffusée à la radio de Radio-Canada a été le point de départ de l’enquête de l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ) sur Mathieu Arseneault et une plainte de l’animateur Sébastien Diaz a été présentée en preuve lors des audiences disciplinaires lundi.

Le courtier immobilier vedette de l’émission Numéros 1 à CASA a assisté à sa première journée d’audience disciplinaire lundi à Brossard accompagné de ses avocats. Il comparaît sous le chef d’accusation « Honneur et dignité de la profession ».

C’est la porte-parole de l’OACIQ, MCaroline Champagne, vice-présidente encadrement, qui a été interpellée par un segment de l’émission La journée (est encore jeune) diffusée le 21 novembre dernier à la radio de Radio-Canada. Le courtier Mathieu Arseneault y était présenté comme « la pire personne de la journée » par le chroniqueur Olivier Niquet. Elle en a parlé à la syndique adjointe de l’OACIQ, Julie Gagnon, qui a démarré son enquête le 23 novembre.

Ses résultats ont été présentés en preuve tout au long de la journée au comité de discipline. Les membres ont vu une dizaine de vidéos de Mathieu Arseneault diffusées sur ses réseaux sociaux, dans lesquelles il donne de l’argent à des enfants, à un concierge et à des gens qui « peinent à se nourrir » et « vivent à l’extérieur ».

Selon la syndique adjointe, ces vidéos sont destinées à faire l’autopromotion du courtier, car il mentionne le nombre de maisons qu’il a vendues, le numéro pour le joindre et annonce dans l’une d’elles que 2022 a été « une de ses grosses années » en immobilier avant d’ajouter qu’il allait distribuer 2000 $ aux gens dans le besoin.

« C’est faux de dire qu’il fait ça pour inspirer les gens à faire la même chose. Moi, je n’y crois pas », affirme Julie Gagnon, qui note « un décalage entre la clientèle visée et l’image que véhicule l’intimé » avec la Porsche, le manteau et ses marques luxueuses pour aller distribuer de l’argent.

« Je crois que M. Arseneault fait ça pour attirer l’attention par le biais de bonnes causes », ajoute-t-elle.

La syndique adjointe a aussi présenté une sélection de commentaires négatifs sur les réseaux sociaux suscités par les vidéos, une demande d’assistance, une entrevue téléphonique d’un intervenant d’organisme communautaire offusqué, une parodie de l’humoriste Julien Lacroix et un extrait d’une conférence d’humeur du chroniqueur Olivier Niquet devant des centaines de courtiers immobiliers au Rendez-vous de l’OACIQ en octobre dernier.

Le but étant de démontrer qu’« au-delà de l’humour qui est utilisé pour ridiculiser les publications de l’Intimé, c’est la dignité et l’honneur de toute la profession qui est atteinte de même que son image », comme l’indique la requête en suspension provisoire déposée devant les membres du comité.

Commentaire de Sébastien Diaz

Mathieu Arseneault a publié une dizaine de vidéos dans lesquelles il remet 100 $ à un mineur pour récompenser ses résultats scolaires et un autre 100 $ lorsque le jeune cite le numéro de téléphone du courtier et dit qu’il aura recours à ses services pour acheter sa maison plus tard.

L’une d’elles a fait réagir l’animateur de télévision Sébastien Diaz. Comme commentaire sous la vidéo, il a écrit « Ok. Ceci est hautement illégal… »

Sébastien Diaz ne s’est pas limité aux réseaux sociaux du courtier, il s’est rendu sur la page Instagram de l’OACIQ afin de mettre en doute la légalité de cette forme de publicité.

« Venant du milieu de la télévision, je sais à quel point tout ça est réglementé. Ici, je ne vois qu’un courtier se servant de quidam pour rehausser son propre business et je vois mal en quoi c’est reluisant pour la profession de courtiers », a écrit M. Diaz lors d’un échange privé sur Instagram avec la syndique adjointe.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Sébastien Diaz

« Je n’ai pas de témoignage à livrer autre que comment est-ce qu’utiliser des mineurs dans des centres commerciaux en les filmant vanter ses mérites sur ses réseaux sociaux, est-il éthique et légal », a conclu l’animateur.

Julie Gagnon a présenté une vidéo dans laquelle le courtier utilisait le même concept de remise d’argent pour récompenser les résultats scolaires. Or, cette fois, sans donner d’explication, la somme passait de 60 $ à 100 $ et le jeune avait visiblement un handicap.

« Dans cette vidéo, j’ai davantage un malaise de par l’état du jeune homme », a expliqué la syndique adjointe.

« Je ne sais pas si c’est politiquement correct de le dire, a-t-elle précisé, mais il a un handicap, ce jeune homme-là, donc est-ce qu’un jour, vraiment, il va être apte à pouvoir s’acheter une propriété par lui-même ? »

« Eh là là ! », a objecté l’avocat de la défense, MMartin Courville.

« Je ne pense pas que c’est digne, de tenir ces propos-là, particulièrement dans une cause comme celle-ci où on taxe mon client de tenir, de publier des vidéos indignes », a souligné l’avocat de Mathieu Arseneault.

Uniquement une « croyance » ?

Lorsque l’avocat, MCourville, a questionné la syndique adjointe, il a insisté pour qu’elle lui fournisse une preuve objective, concrète, réelle des intentions de son client, qui ne sont pas selon elle d’inspirer les autres, mais de faire de l’autopromotion. Julie Gagnon a répondu qu’elle n’en avait pas.

« C’est uniquement sur votre croyance ? », a demandé MCourville. « Oui », a-t-elle répondu.

Mathieu Arseneault reviendra devant le comité de discipline mercredi, où il sera interrogé par l’avocate de l’OACIQ. La procureure et la syndique adjointe doivent démontrer que la faute déontologique est assez grave pour que le permis de courtage de Mathieu Arseneault soit suspendu d’urgence en attendant les audiences sur culpabilité qui auront lieu en 2024.

Depuis qu’il a obtenu son permis de courtage en 2003, le courtier a fait l’objet de 76 demandes d’assistance et l’OACIQ a dû intervenir à 38 occasions auprès de l’intimé, dont 20 fois spécifiquement pour ses publicités et représentations non conformes à la loi.