(New York) Les groupes japonais Nippon Steel et américain U. S. Steel ont annoncé lundi leur prochain rapprochement, une transaction d’un montant d’environ 14,1 milliards de dollars (hors dette) qui déplaît fortement au syndicat américain de la sidérurgie.

Cette acquisition par le géant japonais de la sidérurgie doit être réalisée en totalité en espèces au prix de 55 dollars par action, soit une prime de 40 % par rapport au cours de clôture de l’action de U. S. Steel vendredi, selon le communiqué des deux groupes.

Nippon Steel, qui va financer cette acquisition par des emprunts bancaires déjà approuvés, compte également reprendre la dette du groupe américain, portant le montant total de l’opération à 14,9 milliards de dollars.

Les deux conseils d’administration ont approuvé à l’unanimité l’accord, qui reste soumis à la validation des actionnaires de U. S. Steel et à celles des autorités réglementaires.

La finalisation est attendue, au plus tard, au troisième trimestre 2024.

U. S. Steel (USS) avait lancé une revue stratégique en août après avoir reçu plusieurs offres non sollicitées pour un rachat partiel ou total.

Elle avait rejeté, à l’époque, une offre de son concurrent américain, Cleveland-Cliffs, qui valorisait la fusion à environ 10 milliards de dollars.

Le syndicat des métallurgistes USW avait alors indiqué qu’il soutenait l’accord proposé par Cleveland-Cliffs. Le président du syndicat Thomas Conway avait affirmé que l’USW ne soutiendrait aucun autre groupe que Cliffs.

« Dire que nous sommes déçus par l’accord annoncé entre U. S. Steel et Nippon est un euphémisme, car il illustre la même attitude cupide et de court terme qui guide U. S. Steel depuis bien trop longtemps », a commenté dans un communiqué David McCall, successeur de Thomas Conway à la tête de l’USW.

« Nous sommes restés ouverts pendant tout le processus pour travailler avec U. S. Steel afin de garder cette emblématique société américaine sous actionnariat américain » mais la direction « a choisi de faire fi des inquiétudes » des employés, a-t-il poursuivi.

Syndicat, sénateur mécontents

Selon lui, aucun des deux groupes n’a contacté le syndicat au sujet de cette transaction « ce qui, en soi, est en violation de notre accord » avec la direction d’U. S. Steel.

Tous les accords conclus entre U. S. Steel et le syndicat USW seront respectés, ont assuré lundi les entreprises, précisant que le groupe américain conserverait notamment son nom et son siège à Pittsburgh (Pennsylvanie) à l’issue de la fusion.

La convention collective entre le syndicat et la direction est valide jusqu’en 2028.

Le sénateur américain John Fetterman a promis d’essayer d’empêcher la mise en œuvre de l’accord.  

« Il est absolument scandaleux qu’ils se soient vendus à un pays et à une entreprise étrangers », a-t-il déclaré dans une vidéo diffusée sur X.  

« L’acier est toujours une question de sécurité », a ajouté l’élu démocrate de Pennsylvanie, État qui abrite de nombreuses usines sidérurgiques.

Cette acquisition augmentera considérablement la production actuelle de Nippon Steel aux États-Unis.

« Grâce à l’acquisition de U. S. Steel par NSC (Nippon Steel Corporation), sa capacité de production annuelle totale prévue d’acier brut atteindra 86 millions de tonnes, accélérant ainsi les progrès vers l’objectif stratégique de NSC de 100 millions de tonnes de capacité mondiale d’acier brut par an », selon leur communiqué.

Le groupe japonais produit actuellement environ 60 millions de tonnes.

« Notre objectif commun en matière de décarbonation devrait améliorer et accélérer notre capacité à fournir à nos clients des solutions en acier innovantes pour atteindre les objectifs de développement durable », ont assuré les deux groupes, qui visaient, avant leur mariage, une neutralité carbone en 2050.

L’attrait de U. S. Steel, selon les analystes et les acteurs du secteur, vient du fait que l’entreprise est sur le point de finaliser un plan d’investissement coûteux, comprenant l’installation de fours à arc électrique au lieu de hauts fourneaux au charbon, afin de réduire son empreinte carbone.

Les deux groupes s’attendent à dégager des synergies – non divulguées – grâce à la mise en commun de leurs technologies de production, leurs connaissances ainsi que par des économies d’énergie et par le recyclage.

Nippon Steel, présent depuis une quarantaine d’années aux États-Unis où il emploie environ 4000 personnes – dont 620 adhérents à l’USW – sur un total de quelque 106 000 employés dans le monde, dispose également d’infrastructures de production au Japon, en Inde, au Brésil, en Thaïlande ou encore en Suède.

L’outil industriel d’USS, fondé en 1901 et qui comptait près de 23 000 employés fin 2022, est situé aux États-Unis et en Slovaquie.

L’action d’USS a bondi de 26 % à 49,59 dollars à la clôture à Wall Street. L’action Nippon Steel perdait plus de 5 % mardi matin à la Bourse de Tokyo, visiblement pénalisée par le prix jugé élevé de l’acquisition de U. S. Steel.