Québec doit passer des contrats d’urgence très coûteux pour assurer un service minimal en matière d’évacuations médicales aériennes, alors qu’il manque cruellement de pilotes.

Le Service aérien gouvernemental (SAG) a ainsi versé 47 000 $ à une entreprise privée en août dernier pour s’assurer de la disponibilité d’un avion-ambulance pendant sept heures, et ce, même si l’appareil en question n’a même pas eu à décoller. Le mois précédent, il payait 47 500 $ pour la même opération, cette fois pendant 11 heures et demie. Encore là, « aucune mission n’a eu lieu. Les aéronefs sont restés au sol ».

Chaque fois, même explication : « le niveau de service minimal requis par EVAQ […] n’a pu être assuré exclusivement par le ministère des Transports et de la Mobilité durable [MTMD] », a indiqué la relationniste Émilie Lord, dans un courriel. « Considérant le manque de pilotes, il n’a pas été possible de remplacer un pilote absent. »

Le SAG, une division du Ministère, s’était d’abord tourné vers les quatre transporteurs aériens qui ont obtenu un contrat spécifiquement pour pallier ce type de problèmes : Propair, Air Médic, Skyjet et Air Inuit.

« Toutefois, les quatre prestataires ont répondu négativement à la demande, a continué Mme Lord. Par conséquent, le MTMD a été dans l’obligation de noliser un avion en urgence chez Air Charter Service pour maintenir le niveau de service minimal requis par EVAQ. » Le service sert principalement à évacuer les patients en état grave des régions isolées vers les centres hospitaliers de pointe à Montréal et à Québec.

Les contrats passés en urgence pour protéger la vie humaine ne sont pas soumis aux mêmes critères d’octroi que les autres.

« Le moral n’est pas fort »

En octobre dernier, La Presse rapportait déjà que le SAG vivait un exode de ses pilotes vers le privé, un problème qui s’ajoutait à la vétusté de la flotte pour faire bondir le recours à la sous-traitance.

À ce moment, le service se préparait à verser jusqu’à 7 millions aux quatre entreprises embauchées pour prendre la relève en cas de pépin.

« Le Ministère fait face à des défis importants en matière de main-d’œuvre et de vieillissement de sa flotte d’aéronefs, reconnaissait alors sa porte-parole. Le Ministère travaille actuellement sur des scénarios de remplacement afin d’assurer la pérennité des services. »

Le SAG est responsable des transports sanitaires aériens, de la lutte contre les incendies de forêt (avec ses avions-citernes) et d’autres activités aériennes, comme la collaboration avec la Sûreté du Québec (SQ) grâce à ses hélicoptères. La question de la sous-traitance semble surtout concerner le créneau des transports aériens médicaux.

« Le moral n’est pas fort », affirmait cet automne le président général du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, Christian Daigle. « Notre taux de roulement était de 30 % en 2022. Il faut environ 40 pilotes pour que les choses fonctionnent bien. »

« Si on offrait de bonnes conditions et que l’on investissait dans de nouveaux appareils, on arrêterait de verser des millions en sous-traitance, continuait-il. Il ne faut pas le voir comme une dépense, mais une économie à plus long terme. »

Avec Julien Arsenault, La Presse