La biotech américano-asiatique Insilico Medicine se prépare à annoncer qu’un médicament conçu et découvert par intelligence artificielle à l’aide d’un logiciel développé à Montréal vient d’être approuvé pour des études de phase I.

Avec un centre de recherche et développement à proximité du Centre Bell à Montréal, Insilico Medicine est une entreprise basée à Hong Kong et New York ayant pu réaliser cette avancée clinique après avoir récolté plus de 400 millions US en financement depuis ses débuts en 2014.

Le fondateur et grand patron d’Insilico Medicine, Alex Zhavoronkov, est de passage à Montréal pour l’ouverture officielle du centre de recherche montréalais en intelligence artificielle de l’entreprise même si la firme est présente ici depuis un an et demi.

« Notre centre de recherche et développement de Montréal devient beaucoup plus important et nous voulons nous assurer que les gens en parlent », dit-il en entrevue.

Insilico Medicine compte aujourd’hui une quinzaine d’employés à Montréal. La direction dit avoir bon espoir de quadrupler l’effectif jusqu’à 60 d’ici quelques années.

L’entreprise s’apprête à annoncer qu’un médicament contre les maladies inflammatoires de l’intestin entame un long processus d’essais et d’approbations. Ce traitement a été conçu à Montréal à l’aide d’un logiciel permettant de générer de nouvelles molécules aux propriétés semblables à celles des médicaments.

La phase I évaluera la tolérance et la toxicité de la molécule chez l’humain. Afin de poursuivre l’évaluation dans des populations plus larges, Insilico prévoit de mener des essais de phase Ib dans plusieurs centres pour des patients atteints de colite ulcéreuse après avoir terminé les études de phase Ia chez des patients volontaires en Australie.

Un combat plus large

Outre la génération de nouvelles molécules, la plateforme logicielle de l’entreprise permet d’autres applications, par exemple prédire le taux de succès des essais cliniques.

Insilico Medicine combine la génomique, l’analyse de mégadonnées (big data) et l’apprentissage profond pour l’aider à découvrir de nouveaux médicaments.

Pour Alex Zhavoronkov, la découverte de nouveaux traitements s’inscrit dans un combat plus large. « On se bat tous contre un ennemi qui est le vieillissement, alors aussi bien mourir de vieillesse en santé », lance le scientifique de 45 ans.

Le vieillissement est un problème mondial. Plusieurs maladies sont liées au vieillissement. On ne voit pas d’enfants atteints d’alzheimer, de parkinson, d’une fibrose pulmonaire ou d’une maladie rénale chronique. Ces maladies viennent avec l’âge.

Alex Zhavoronkov

« Nous essayons d’entraîner l’intelligence artificielle à comprendre la notion de temps en biologie pour documenter comment les gens changent en vieillissant. Imaginez un médicament qui peut prévenir, par exemple, l’alzheimer et restituer la vitalité perdue en vieillissant. Ce n’est pas de la science-fiction. Ça peut être possible. »

Alex Zhavoronkov souligne que la biotechnologie est un « casino moléculaire » en raison des nombreux risques d’échecs. C’est pourquoi, dit-il, la plupart des pays doivent s’impliquer pour faire des découvertes. « On veut démocratiser la technologie pour que tout le monde puisse contribuer et non seulement bénéficier des médicaments. C’est pourquoi plusieurs de nos modèles sont à codes sources ouverts. »

Montréal, ville de choix

La présidente d’Insilico Medicine Canada, Petrina Kamya, souligne que le choix de s’installer dans la métropole s’explique de plusieurs façons. Si l’aspect multiculturel de la ville est attrayant, elle note les programmes de recherche universitaire « de classe mondiale » en intelligence artificielle à Montréal, un écosystème d’entreprises en démarrage techno « florissant », ainsi qu’un « précieux » soutien gouvernemental.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Petrina Kamya, présidente d’Insilico Medicine Canada

On s’engage à encourager le développement en intelligence artificielle dans le secteur de la santé à Montréal pour les années à venir.

Petrina Kamya, présidente d’Insilico Medicine Canada

L’équipe de Montréal est notamment chargée de développer un logiciel pour aider à découvrir de nouvelles cibles thérapeutiques grâce à des données générées par des robots dans le laboratoire chinois de l’entreprise où des véhicules guidés autonomes mènent des expériences plutôt que des scientifiques.

Le centre de recherche montréalais s’ajoute notamment aux laboratoires robotiques automatisés et alimentés par l’intelligence artificielle en Chine, ainsi qu’au centre de R et D en intelligence artificielle et en informatique quantique à Abou Dabi, aux Émirats arabes unis.

Après avoir complété plusieurs rondes de financement depuis sa création, Insilico Medicine est maintenant très près d’un premier appel public à l’épargne. L’inscription en Bourse pourrait survenir dès l’an prochain.

Insilico Medicine en bref

  • Année de fondation : 2014
  • Siège social : Hong Kong et New York
  • Activités : développement de solutions pour la découverte de médicaments contre notamment le cancer, la fibrose, les maladies du système nerveux central, les maladies infectieuses, les maladies auto-immunes et les maladies liées au vieillissement.
  • Fondateur et PDG : Alex Zhavoronkov
  • Nombre d’employés : Plus de 300, dont 14 à Montréal