En pleine surenchère, la courtière immobilière vedette Christine Girouard aurait usé de bluff pour pousser des acheteurs à offrir plus d’argent pour une maison qu’elle vendait à Repentigny, a-t-on appris lors des témoignages devant le comité de discipline de l’OACIQ.

En 2021, un courtier fait une promesse d’achat sur une maison vendue par Christine Girouard à Repentigny. Selon les documents présentés lors des audiences disciplinaires mercredi à Brossard, il y a cinq offres sur la table. La promesse d’achat du courtier qui témoigne devant le comité est de loin la plus élevée.

Cependant, ce courtier et ses clients acheteurs n’ont aucun moyen de le savoir, car la loi interdit la divulgation du montant des offres présentées aux vendeurs de la propriété.

Après avoir déposé la promesse d’achat, le courtier raconte au comité qu’il n’a pas d’accusé de réception de la part de Mme Girouard. Il décide donc de l’appeler et de lui demander du même coup si son offre est « dans la course », « dans la game », étant donné qu’il y en a cinq au total.

« Non, elle a dit : “T’es pas dans la game. T’es complètement pas dedans. T’es à côté de la track », a relaté le courtier.

Le courtier rappelle alors ses clients, leur explique la situation et ils décident d’ajouter de l’argent même si leur offre était déjà la meilleure.

Les conversations entre les courtiers ne sont ni enregistrées ni filmées. Comme le courtier qui témoigne rapporte les paroles de Mme Girouard, l’avocat de cette dernière, MMartin Courville, conteste l’admissibilité en preuve des phrases « Non, t’es pas dans la game » et « T’es à côté de la track ». La question sera débattue plus tard cette semaine.

La loi garde le montant des offres secret

Toujours dans le même dossier, le courtier représentant les acheteurs soutient à quelques reprises que Mme Girouard ne lui a jamais révélé le prix de l’autre promesse d’achat prétendument plus élevée. La loi l’interdit.

« Je n’ai pas posé de question concernant le prix. Elle n’a rien dévoilé, aucun chiffre », a assuré le courtier.

Or sa cliente venue témoigner après lui n’avait pas la même version. « Oui, il [mon courtier] m’a dit un prix. Il m’a dit que c’était 400 000 $, 402 000 $, je ne me souviens plus », a-t-elle expliqué.

« Pour être dans la course, il fallait offrir plus que 400 000 $ », se souvient-elle, car un autre acheteur était intéressé notamment par le garage détaché de la maison.

La consommatrice, qui a raconté son histoire devant le comité mercredi, avait porté plainte à l’OACIQ en janvier 2022 au sujet de cette transaction, mais pour un autre enjeu. Quinze mois plus tard, son dossier est devenu prioritaire après la publication de l’enquête de La Presse.

« Je la voyais de ma cuisine »

La dame de Repentigny voulait dénoncer les « pressions » et « menaces » faites par Mme Girouard au cours de l’achat de sa maison. Selon ce qu’indiquait la fiche de mise en marché de Mme Girouard, la propriété était vendue avec la garantie légale, et c’est ce qui avait incité cette consommatrice à venir la visiter et à déposer une promesse d’achat.

La transaction s’est compliquée lorsque le vendeur s’est rendu compte qu’il vendait sa maison justement avec la garantie légale, alors qu’il souhaitait le contraire.

Devant le comité, le vendeur a affirmé qu’il n’avait jamais été question de garantie légale lors de la signature du contrat de courtage avec Christine Girouard, qu’il avait choisie simplement parce que sa photo était dans l’abribus en face de chez lui. « Je la voyais de ma cuisine », a déclaré l’ancien client de la courtière.

Se retrouvant devant une impasse avec cet enjeu de garantie légale, Mme Girouard aurait dit à son client qu’il allait falloir recommencer tout le processus du début s’il ne changeait pas d’idée, tandis qu’elle aurait signifié aux acheteurs qu’elle allait remettre la maison sur le marché s’ils refusaient l’achat sans garantie légale.

Le vendeur a finalement été forcé de changer d’avis, a-t-il raconté, parce qu’il avait déjà signé un bail onéreux.

Christine Girouard aura l’occasion de raconter sa version des faits jeudi lors de son interrogatoire devant le comité de discipline.