(Montréal) La Cour d’appel va se pencher sur l’application des dispositions anti-scabs au télétravail.

La Cour d’appel a en effet accepté la demande pour permission d’en appeler qui avait été présentée par le syndicat Unifor, affilié à la FTQ. Elle entendra donc le fond de la cause.

Le litige porte sur la définition de ce qu’est l’« établissement » de l’employeur dans un contexte de télétravail.

Au Québec, le Code du travail interdit de recourir à des travailleurs de remplacement « dans l’établissement » où la grève ou le lock-out a été déclaré. Mais jusqu’où va « l’établissement » de l’employeur lorsqu’un employé travaille depuis son domicile ?

En novembre 2021, le tribunal administratif du travail avait donné raison à Unifor, en statuant que le Groupe CRH, qui exploite la cimenterie de Joliette, où un lock-out avait été décrété, avait contrevenu aux dispositions anti-scabs en utilisant les services d’une salariée qui faisait du télétravail.

Le Tribunal avait alors vu le télétravail comme un « établissement déployé » de l’employeur, d’autant plus qu’on était alors en pleine pandémie de la COVID-19, où le télétravail était généralisé.

Toutefois, en avril dernier, la Cour supérieure avait infirmé cette décision. Elle avait jugé que le tribunal administratif du travail avait dépassé le sens du mot « établissement ».

Unifor veut donc en appeler à son tour.

Devant la Cour d’appel, pour obtenir la permission d’en appeler, Unifor a d’abord plaidé que la Cour supérieure avait déjà rendu quelques décisions qui sont contradictoires au sujet du télétravail.

Ensuite, Unifor a plaidé que la pandémie de la COVID-19 a créé une situation nouvelle, celle du télétravail qui s’est généralisé.

« Pour que la permission lui soit accordée, la partie requérante doit démontrer que l’appel soulève une question qui mérite un examen par la Cour notamment parce qu’il s’agit d’une question de principe, d’une question nouvelle ou d’une question de droit faisant l’objet d’une jurisprudence contradictoire », écrit la Cour d’appel.

La Cour d’appel souligne elle-même que « l’autorisation de faire appel des jugements rendus en matière de contrôle judiciaire n’est accordée qu’avec parcimonie ».

Finalement, Unifor a plaidé que la définition de l’établissement soulevait des questions de principe sérieuses, qui allaient au-delà du droit de grève.

« Sans me prononcer sur le bien-fondé de l’appel, je conclus qu’il y a lieu d’accueillir la demander pour permission d’appeler, à laquelle l’Employeur ne s’oppose pas », a conclu le juge Peter Kalichman.