Considéré comme un congé extrêmement lucratif, le week-end de Pâques a plutôt été synonyme de pertes financières de plusieurs dizaines de milliers de dollars pour les restaurants privés d’électricité en raison du verglas.

« On a tout perdu », lance sans détour Nathalie Côté, copropriétaire de La Brasserie Bernard. Bavettes de bœuf, saumon, crevettes, huîtres : les frigos du restaurant d’Outremont étaient remplis et beaucoup de préparation avait été faite en cuisine en prévision du long congé pascal. Mais la panne d’électricité qui a frappé l’établissement de mercredi à dimanche aura finalement entraîné des pertes de nourriture évaluées à 15 000 $. Les denrées qui devaient se retrouver dans les assiettes des clients ont finalement pris le chemin de la poubelle.

En plus des aliments, Mme Côté, qui s’attendait à une fin de semaine achalandée, a enregistré d’autres pertes. « Ce sont aussi des ventes qu’on n’a pas faites et j’ai des employés qui ont perdu leur salaire. »

  • Les frigos étaient remplis et beaucoup de préparation avait été faite en prévision du long congé pascal.

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Les frigos étaient remplis et beaucoup de préparation avait été faite en prévision du long congé pascal.

  • Le chef Maxime Gauthier (notre photo) et les propriétaires estiment à environ 15 000 $ les pertes liées à la nourriture qui a dû être jetée.

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Le chef Maxime Gauthier (notre photo) et les propriétaires estiment à environ 15 000 $ les pertes liées à la nourriture qui a dû être jetée.

  • Lors du passage de La Presse, le restaurant n’avait toujours pas rouvert ses portes aux clients, faute d’une préparation adéquate.

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Lors du passage de La Presse, le restaurant n’avait toujours pas rouvert ses portes aux clients, faute d’une préparation adéquate.

  • En principe, La Brasserie Bernard devait rouvrir lundi, mais les plans ont dû être révisés. « Il fallait renflouer les stocks », nous a-t-on expliqué.

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    En principe, La Brasserie Bernard devait rouvrir lundi, mais les plans ont dû être révisés. « Il fallait renflouer les stocks », nous a-t-on expliqué.

  • Mardi midi, Maxime Gauthier et son équipe s’affairaient derrière les fourneaux à renflouer les stocks afin de redémarrer les services en salle.

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    Mardi midi, Maxime Gauthier et son équipe s’affairaient derrière les fourneaux à renflouer les stocks afin de redémarrer les services en salle.

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En principe, La Brasserie Bernard devait rouvrir lundi, mais Nathalie Côté et son chef, Maxime Gauthier, ont dû se résigner : ils n’étaient pas prêts. Même scénario pour le service du mardi midi. Les frigos étaient vides. « Il fallait renflouer les stocks. »

Mme Côté va faire une réclamation auprès de ses assurances pour tenter de se faire rembourser une partie de ses pertes. Elle croit toutefois peu en ses chances de recevoir une indemnisation.

Plus au nord, dans le quartier Villeray, Victor Afonso, copropriétaire des restaurants Tapeo et Mesón, a lui aussi goûté aux désagréments de la panne. « Tu vis toujours dans l’espoir que l’électricité va revenir », raconte-t-il. Mais le souhait du restaurateur n’a malheureusement pas été exaucé. Ainsi, il calcule avoir jeté entre 5000 $ et 10 000 $ de nourriture.

Pour la nourriture, ç’a été désastreux. On a essayé d’en sauver un peu en donnant des denrées à nos employés.

Victor Afonso, copropriétaire des restaurants Tapeo et Mesón

Et comme il n’a pu accueillir de clients dans ses établissements jeudi et vendredi soir, M. Afonso évalue s’être privé d’environ 50 000 $ en ventes. Selon lui, les assurances refuseront de le rembourser puisque ces pertes sont liées à une « cause naturelle ».

« Grêle, tornades, vents violents, pluies diluviennes ou verglaçantes, Desjardins Assurances traite annuellement un nombre important de réclamations où la météo est en cause, mentionne Valérie Lamarre, porte-parole de Desjardins Assurances. Or, il faut savoir que, tant pour les particuliers que pour les entreprises, nos contrats d’assurance comportent plusieurs garanties visant à indemniser nos assurés dans ces circonstances comme dans d’autres. La très vaste majorité de nos contrats en assurance des entreprises comportent une garantie qui peut s’appliquer [à différents types de pertes comme la nourriture]. »

Du côté du Groupe St-Hubert, une trentaine de restaurants ont dû fermer, confirme la directrice des communications, Josée Vaillancourt. « Nous avons dû recourir à des génératrices et à des camions réfrigérés afin de ne pas perdre de denrées. Certains franchisés ont eu des ventes records tandis que d’autres étaient fermés et ont fourni leurs denrées à leurs collègues. »

À l’usine de Boisbriand, où sont notamment préparés les pâtés, les salades et les côtes levées, l’entreprise a enregistré 175 000 $ de pertes.

« Cette tempête de pluie verglaçante est survenue à un bien mauvais moment, reconnaît Martin Vézina, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales de l’Association Restauration Québec (ARQ). C’est un week-end où les gens vont au resto. » Pour le moment, l’ARQ n’a pas de données sur le nombre d’établissements touchés par la panne.

Retour à la normale à l’épicerie

Par ailleurs, si les grands supermarchés – dont certains ont exceptionnellement ouvert le dimanche de Pâques – ont réussi à limiter les pertes notamment grâce à des génératrices, de plus petits commerces n’ont pas eu la même chance.

Après s’être débarrassé du contenu de son comptoir des viandes, de ses frigos et de ses congélateurs, le copropriétaire de l’Intermarché Boyer sur l’avenue du Mont-Royal, Franck Henot, affirme avoir essuyé des pertes de 100 000 $. « Le magasin débordait de bouffe en prévision du long week-end », souligne-t-il.

Sa génératrice lui a toutefois permis d’avoir de l’éclairage en épicerie et de faire fonctionner ses caisses. Son commerce est donc resté ouvert et les clients pouvaient venir se ravitailler en fruits, en légumes et en ingrédients secs comme des boîtes de conserve, des pâtes, des biscuits ou de la farine.

Ainsi, la plupart des épiceries ont été prises d’assaut au cours de la fin de semaine.

Des consommateurs dont le frigo était vide avaient besoin de faire des provisions. Résultats : certaines allées ainsi que des frigos et des réfrigérateurs ont vite été dégarnis, laissant des tablettes vides un peu partout. Pour Michel Rochette, président pour le Québec du Conseil canadien du commerce de détail (CCCD), il s’agit d’une « situation exceptionnelle ».

« On avait moins de personnel et plus d’achalandage avec des gens qui avaient plus de besoins », rappelle-t-il. Selon lui, les tablettes seront vites regarnies. À partir de ce mercredi, la situation devrait revenir à la normale, assure-t-il.