Avec ses mauvaises surprises, le tunnel du mont Royal constitue « un défi d’importance » pour le chantier du Réseau express métropolitain (REM), et tout indique que le train électrique ne pourra circuler sur ce tronçon à l’automne 2023 comme le prévoit l’échéancier.
Si la phase d’excavation est terminée, les ouvriers ont encore beaucoup de pain sur la planche, a pu constater La Presse, mercredi dernier, à l’occasion d’une visite visant à faire le point sur l’avancement des travaux dans ce tunnel centenaire.
CPDQ Infra, promoteur du projet, et NouvLR, le consortium responsable de l’ingénierie et de la construction, ne confirment pas de report, mais cela semble une question de temps.
« Ça représente tout un défi », reconnaît Jean-Philippe Pelletier, directeur du secteur Deux-Montagnes chez CPDQ Infra, lorsqu’interrogé à propos de l’échéancier.
Les usagers qui tapent du pied et qui espèrent pouvoir monter dans le REM depuis la station du Ruisseau, dans l’arrondissement de Saint-Laurent, pour se rendre à la gare Centrale devront vraisemblablement continuer de prendre leur mal en patience.
La mise en service du tunnel à l’automne 2023 représente un défi d’importance. Il reste des échanges à avoir avec les équipes techniques et des rencontres avec nos partenaires du projet dans les prochains mois.
Jean-Vincent Lacroix, porte-parole de CDPQ Infra
Celui-ci affirme que la filiale du bas de laine des Québécois garde le cap pour la mise en service des antennes Deux-Montagnes et Anse-à-l’Orme d’ici la fin de 2024. Quant au tronçon de l’aéroport Montréal-Trudeau, il entrera en service après 2024.
D’ici là, le défi se trouve du côté de l’« exécution », dit M. Pelletier.
Environ 90 % des travaux de forage – on devait percer plus de 60 000 trous dans le tunnel – sont terminés. Signe que les travaux progressent, à la station McGill, sous l’avenue McGill College, une imposante structure d’acier a fait son apparition.
« Il y a six mois, elle n’était pas là », souligne M. Pelletier.
Loin d’être fini
Sous terre, les ouvriers sont encore en train d’achever la réfection du tunnel. La machinerie lourde y est encore bien présente. L’érection du mur mitoyen de plusieurs kilomètres pour séparer les deux voies pour des raisons de sécurité n’est pas encore terminée. Conçus chez un sous-traitant, les segments du mur continuent à être quotidiennement livrés.
Sur le sol, où la roche est bien présente, une dalle de béton a été aménagée, mais l’installation des voies ferroviaires sur le tronçon d’environ cinq kilomètres n’a pas encore débuté.
« C’est une transformation complète de l’infrastructure, plaide M. Pelletier. C’est d’une complexité importante. Il y avait 60 trains par jour auparavant et avec le REM, on parle de 500 trains quotidiennement. »
De plus, fait valoir l’ingénieur, NouvLR a les coudées franches seulement depuis mai 2020. Ce n’est que depuis ce moment que les responsables du chantier peuvent travailler librement à l’intérieur du tunnel, affirment-ils.
La présence de dynamite centenaire, à l’origine d’une explosion inopinée survenue en juillet 2020, a ralenti les travaux de forage, qui ont dû s’effectuer à 50 mètres de distance dans un conteneur blindé. Les foreuses ont dû être modifiées en conséquence. Aucun employé ne pouvait se trouver à moins de 500 mètres du lieu de forage.
De plus, la détérioration plus importante du tunnel en raison de l’usage de déglaçage sur McGill College et de l’absence de membranes d’étanchéité a contraint les promoteurs à construire une nouvelle voûte, appelée « voûte parapluie », sous terre sur une distance d’environ 90 mètres entre la station McGill et la gare Centrale.
La COVID-19 et son impact sur l’absentéisme ont aussi ralenti le chantier.
Une boîte à surprise
En se lançant dans la réfection d’un tunnel aussi ancien que celui sous le mont Royal, les imprévus étaient inévitables, particulièrement au chapitre du forage, estime Jonathan Aubertin, professeur au département de génie de la construction à l’École de technologie supérieure (ETS).
« Avec un projet vierge, on peut faire de l’exploration géologique et géotechnique, ce qui permet d’avoir une bonne idée de ce qui nous attend, dit-il en entrevue avec La Presse. C’est sûr qu’il y a toujours des surprises, mais on les contrôle un peu plus. Dans un projet comme ça [le tunnel mont Royal], tu vas avoir de l’incertitude et de mauvaises surprises. »
Selon l’expert, des travaux de forage en présence de « vieux explosifs » comme dans le tunnel qui passe sous le mont Royal constituent une situation « quasiment unique » au Québec.
Avec la collaboration de William Leclerc, La Presse
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- Le réseau du REM s’étend sur 67 kilomètres et comporte 26 stations. La mise en service de l’antenne de la Rive-Sud est prévue cet automne.
CDPQ INFRA- 7 milliards
- C’est la facture du chantier du REM. Le budget initial était de 6,3 milliards.
la presse