La vente proposée de Freedom Mobile n’éliminera pas la menace d’une substantielle diminution de la concurrence si Rogers devait mettre la main sur Shaw, fait valoir le commissaire de la concurrence dans une demande déposée mardi devant le Tribunal de la concurrence pour bloquer la transaction.

Les nouveaux propriétaires de Freedom Mobile seraient notamment « susceptibles de fournir des ressources financières, une gestion, des compétences techniques et d’autres supports moins efficaces », est-il précisé.

Le dessaisissement de Freedom Mobile du reste des actifs de Shaw, notamment son réseau de câblodistribution et ses points de vente, réduirait la capacité de cette entité à offrir des services groupés aux consommateurs en Alberta et en Colombie-Britannique et sa capacité à concurrencer, innover et croître, souligne le Bureau de la concurrence.

« Au terme de la transaction, les fournisseurs sans fil, incluant Rogers, seront vraisemblablement moins susceptibles de se faire concurrence avec une vigueur similaire à ce qu’ils auraient fait sans la transaction, estime le commissaire. Shaw, avec sa base régionale en tant que fournisseur de service filaire établi dans l’Ouest canadien disposant d’une unité sans fil intégrée, était un compétiteur hors norme disposant de la capacité et de la motivation à gagner des parts de marché. Il avait un incitatif à offrir des rabais agressifs sur le sans-fil. […] Rogers n’aurait pas cet incitatif compte tenu de ses parts de marché relativement élevées et du risque accru pour lui de voir s’abaisser les prix de sa base existante d’abonnés. »

Rogers avait révélé en mars l’an passé une entente évaluée à 26 milliards (dette comprise) pour acquérir Shaw.

Le Bureau de la concurrence considère le sans-fil comme un « service essentiel » et a officiellement contesté ce projet de fusion lundi en demandant une ordonnance au Tribunal de la concurrence pour l’empêcher de se réaliser.

Une injonction est aussi réclamée pour empêcher Rogers et Shaw de conclure la transaction ou de vendre de leurs actifs jusqu’à ce que la demande du Bureau de la concurrence soit entendue.

Rogers et Shaw ont indiqué durant la fin de semaine demeurer engagés à l’égard de la transaction et entendent s’opposer à la demande déposée par le Bureau de la concurrence.

Informées vendredi de l’intention du commissaire de la concurrence de contester leur projet de fusion, les deux entreprises ont fait savoir samedi qu’elles proposent une vente « complète » des actifs de Freedom Mobile, la filiale de Shaw dans le sans-fil.

« Rogers et Shaw s’engagent dans un processus de vente de Freedom Mobile en vue de répondre aux préoccupations soulevées par le commissaire de la concurrence et ISDE [Innovation, Sciences et Développement économique Canada] », ont indiqué samedi les deux entreprises.

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) – l’autre organisme réglementaire dont l’approbation est nécessaire pour la réalisation de la fusion – a donné son approbation en mars.

Vente de Freedom Mobile

Le mois dernier, le quotidien The Globe and Mail affirmait que Rogers avait présenté au fédéral une entente entourant la vente de Freedom à Xplornet dans le but d’obtenir l’approbation des autorités pour son projet de fusion avec Shaw. Le quotidien avait précédemment indiqué que Globalive avait fait une offre pour Freedom avant de révéler vendredi dernier que Québecor avait finalement été invitée à participer au processus de vente entourant Freedom.

Le Bureau de la concurrence avait fait savoir lundi qu’une fusion de Shaw et de Rogers entraînerait des prix plus élevés, une qualité de service amoindrie et une perte de choix, notamment dans les services sans fil, et c’est pourquoi le Bureau de la concurrence s’y oppose.

Le Bureau soulignait que l’élimination de Shaw en tant que concurrent mettrait en péril les progrès « considérables » que l’entreprise a accomplis pour accroître la concurrence dans un marché déjà concentré, selon le Bureau de la concurrence.

L’organisme réglementaire ajoutait que la concurrence entre Rogers et Shaw avait déjà connu une diminution, selon le Bureau, et que si le projet de fusion allait de l’avant, ce tort continuerait et pourrait s’aggraver.