« La flexibilité dans les espaces de travail sera à l’honneur dans l’après-COVID-19, mais le bureau n’est pas mort. » La nouvelle directrice de l’agence immobilière CBRE entrevoit la vie au centre-ville dans l’après-COVID-19 avec optimisme, contrairement à bien d’autres.

« Au mois d’août dernier, je vous aurais dit que je m’attendais à une réduction de la superficie moyenne des locaux de 10 % à 20 % par utilisateur. Aujourd’hui, je n’en suis plus aussi sûre », dit Ruth Fischer, première vice-présidente et directrice générale de CBRE à Montréal.

Arrivée en poste le mois dernier, Mme Fischer travaillait auparavant à Toronto pour CBRE, où elle s’occupait des comptes nationaux, poste stratégique qui l’a mise en relation avec les vedettes de l’équipe montréalaise CBRE : les Christian Charbonneau, Scott Speirs, Pierre Lacroix et Michèle Boutet, explique Andrew Cross, observateur de longue date de l’industrie et éditeur du magazine spécialisé Espace Montréal.

À Montréal, CBRE tire son épingle du jeu dans le secteur de l’investissement, c’est-à-dire la vente et l’achat de propriétés, et la représentation d’utilisateurs de locaux. L’agence compte parmi sa clientèle les cabinets d’avocats et les grands noms de la technologie, notamment. En fait, CBRE est l’une des deux plus importantes agences commerciales à Montréal avec la nouvelle Avison Young-Devencore, les deux partis ayant annoncé leurs fiançailles le mois dernier.

Ruth Fischer est la première femme à diriger un marché régional de CBRE au Canada. Foi d’Andrew Cross, c’est aussi la première femme à diriger un grand cabinet de courtage immobilier commercial à Montréal parmi les Devencore, JLL, Cushman & Wakefield, Colliers, Avison Young et autres NAI Commercial.

Sa carrière l’avait auparavant menée à Londres. Mme Fischer a décroché un bac en planification urbaine à Cornell et une maîtrise à la London School of Economics.

L'innovation, grande perdante

À mesure que la vaccination prend de l’ampleur, l’intérêt pour les bureaux grandit, selon les gens de CBRE. « On connaît maintenant les limites du télétravail, qui existe depuis 40 ans et qui continuera d’exister après la pandémie. Il y a des inconvénients au télétravail. La grande perdante, c’est l’innovation », dit Mme Ruth, citant au passage une étude de Microsoft.

Son adjointe Jacinthe Lachapelle en rajoute. « L’activité reprend, les négociations prennent plus de temps qu’avant la pandémie, mais des entreprises sont prêtes à signer ou à renouveler pour des baux de 5 ans, voire 10 ans. Ce qu’on ne voyait pas ou peu l’an dernier. »

Des esprits critiques feront valoir, non sans raison, que les courtiers immobiliers gagnent leur pain et leur beurre avec les travailleurs de bureau et qu’ils ont tout intérêt à dire que ça va bien aller au centre-ville.

Laissons parler les chiffres, alors. Au chapitre du taux d’inoccupation ou de disponibilité des bureaux, le centre-ville de Montréal affiche le quatrième taux parmi les plus bas des grandes villes nord-américaines, derrière Vancouver, Toronto et Charlotte, mais devant New York, Boston ou Philadelphie.

« Les villes canadiennes avaient les marchés de bureaux avec le moins de disponibilité en Amérique du Nord avant la pandémie en raison de la discipline des promoteurs qui construisent très peu de façon spéculative [sans entente de location au préalable] », avance en guise d’explication Mme Fischer, qui est à recherche d’une maison à Montréal, avec toutes les difficultés que l’on peut imaginer dans le contexte actuel.

Dans les circonstances, Mme Fischer s’attend à une reprise des investissements dans le secteur commercial en 2021. Son cabinet commence à recevoir des inscriptions de propriétés à vendre, notamment dans le secteur industriel, qui connaît ses meilleurs jours depuis 20 ans, propulsé par la popularité du commerce en ligne.