ANALYSE - Malgré l'embellie économique légère observée ces derniers mois, le ministre des Finances Nicolas Marceau révise de nouveau à la baisse ses prévisions de revenus autonomes pour 2014-2015. Il l'avait fait une première fois en novembre.

Il vise toujours le retour à l'équilibre en 2015-2016, objectif fixé l'automne dernier.

Cette diminution d'une centaine de millions de dollars pour le prochain exercice et de quelque 200 millions pour 2015-2016 est toutefois largement compensée par une augmentation de plus d'un demi-milliard des transferts fédéraux pour chacun des deux exercices.

Les revenus budgétaires sont estimés à 71,58 milliards, comparativement à 71,47 milliards en novembre, selon le cadre financier présenté hier. Le ministre maintient néanmoins son objectif d'un déficit de 1,75 milliard, soit 750 millions de moins que celui de 2013-2014, projeté en novembre.

Pour ce faire, il demande un nouvel effort de 150 millions aux organismes publics, ce qui équivaut à 1 % environ des dépenses de cette cinquantaine d'entités de tout genre, depuis l'Agence du revenu jusqu'au Musée de la civilisation en passant par Héma-Québec et la Régie du cinéma.

Le ministre Marceau compte empocher 37 millions dans sa lutte contre l'évasion fiscale et bénéficie d'une économie de 78 millions au service de la lourde dette brute qui va atteindre 198,5 milliards à la fin de l'exercice.

Il octroie 15 millions pour la mise en place du Rapport du groupe d'experts pour un financement axé sur les patients, dont les recommandations sont susceptibles d'optimiser les dépenses en santé.

Le ministre alloue toutefois le gros de la petite manne fédérale (430 millions) en 2014-2015 au Fonds de financement des établissements de santé et des services sociaux (FINESSS), qui souffre d'un manque à gagner répété découlant de la réforme de la taxe sur la santé qu'avait mise en place son prédécesseur Raymond Bachand.

Le ministre fait le pari audacieux que ce sous-financement sera non récurrent, ce qui limite en théorie à 530 millions l'écart néanmoins considérable à résorber pour revenir enfin à l'équilibre budgétaire en 2015-2016. C'est la même année où il est prévu qu'Ottawa nagera dans les surplus.

Pour les deux prochains exercices, Québec projette une augmentation de ses revenus autonomes de 3,6 % et de 4,0 %, soit un dixième de plus que son hypothèse de croissance de la taille de l'économie exprimée en dollars courants (le produit intérieur brut nominal), qui reste le meilleur baromètre de l'assiette fiscale.

Cet écart est faible, selon l'expérience passée. Cette prudence s'impose sans doute, compte tenu des révisions que le ministre a dû faire depuis la présentation de son premier budget en novembre 2012.

Malgré le chèque additionnel d'environ un demi-milliard en péréquation, il est à noter que les paiements de transferts fédéraux diminuent de 1 % en 2014-2015 par rapport à ceux de l'exercice qui prend fin le 31 mars. L'année suivante, en revanche, ils augmenteront de 5,2 % pour atteindre 17,3 milliards.

Du côté des dépenses, à l'exclusion du service de la dette, le ministre table sur une augmentation de 2,5 % cette année, de 2,0 % en 2015-2016 et de 1,8 % seulement en 2016-2017. Fait à signaler, cette hausse postule qu'il n'y aura pas de contribution au FINESSS puisée à même les transferts fédéraux comme en 2014-2015.

En ce qui concerne le service de la dette, il augmente de 1,1 % seulement en 2014-2015, même si les emprunts accumulés augmentent de près de 7 milliards.

Ces emprunts gonfleront d'autant en 2015 pour atteindre 205,6 milliards, ce qui correspondra à 54,4 % de la taille de l'économie estimée. C'est de loin la dette brute la plus lourde au Canada. Ce n'est qu'à partir de 2016 que son poids relatif diminuera légèrement, selon le plan budgétaire.

Si le service de la dette n'augmente pas davantage en 2014-2015 et en 2015-2016, c'est en raison d'une diminution de 239 millions des intérêts sur le passif des régimes de retraite dont la solvabilité s'est nettement améliorée en 2013.

Les besoins d'emprunts pour le prochain exercice sont fixés à 15,4 milliards, compte tenu des 4,4 milliards déjà récoltés en préfinancement.

Si le plan budgétaire était respecté en substance, les besoins d'emprunts seraient un peu moins élevés pour les deux années suivantes, malgré l'augmentation continue de la dette.