(Montréal) Si Québec tient véritablement à mettre le patient au cœur de sa grande réforme du réseau de la santé, il faudra donner une voix plus forte aux usagers. C’est ce qu’ont réclamé plusieurs intervenants invités, jeudi, à commenter le projet de loi 15 en commission parlementaire.

Au deuxième jour des consultations particulières sur le projet de « Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace », les parlementaires ont notamment entendu le directeur patient et co-directeur scientifique au Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public (CEPPP), Vincent Dumez.

Tout en saluant le projet de loi dans son ensemble, il s’est dit inquiet d’un risque de voir la défense des droits des usagers affaiblie par la diminution du nombre de comités d’usagers ainsi que par une possible perte d’indépendance des futurs conseils d’établissement par rapport aux actuels conseils d’administration.

Vincent Dumez a surtout défendu le concept des usagers partenaires, qui sont actuellement quelque 1500 au Québec. Il s’agit de personnes atteintes de maladies graves ayant une longue expérience comme patients.

« Ils sont des experts de leur pathologie et de la navigation dans le réseau », a-t-il soutenu. À ses yeux, ces patients sont parmi les mieux placés pour offrir des solutions concrètes ayant un impact considérable sur l’accès aux soins.

Pourtant, ces patients partenaires sont absents du projet de loi. Aucun rôle spécifique ne leur est confié dans l’organigramme soumis par le ministre de la Santé Christian Dubé.

Le Dr Antoine Groulx, médecin de famille, qui accompagnait M. Dumez, a conclu son intervention en appelant les élus à « laisser entrer un peu plus d’humanisme et de bienveillance » dans le projet de loi en écoutant les patients.

En après-midi, c’est le Conseil pour la protection des malades (CPM) qui a repris le flambeau en assénant qu’« on assiste à une forme d’érosion de la participation citoyenne » et en exigeant un comité d’usager pour chaque installation de soins avec un budget adéquat pour remplir son rôle.

Le CPM a réclamé une plus grande représentation citoyenne en demandant que les représentants des usagers soient élus et non pas nommés par Santé Québec.

Une demande à laquelle le ministre Christian Dubé a semblé vouloir accéder.

Dans son mémoire, le CPM a également suggéré la possibilité de jouer le rôle du Comité national des usagers créé par la nouvelle loi afin d’éviter d’ériger une nouvelle structure. L’organisme s’inquiète surtout du fait qu’on accorde au comité national une fonction de « surveillance » des comités locaux.

Le ministre de la Santé a déposé le projet de loi 15 le mois dernier. Le volumineux document de près de 1200 articles prévoit notamment la création d’une nouvelle société d’État appelée Santé Québec.

Cette nouvelle structure aura la responsabilité de coordonner les opérations du réseau de la santé québécois, alors que le ministère conservera son rôle d’énoncer des orientations et d’allouer les budgets.

À son tour, le Regroupement provincial des comités des usagers (RCPU) a proposé au ministre de participer à l’évaluation de l’état du réseau de comités existants afin de trouver un compromis. Encore une fois, le ministre a semblé ouvert à l’idée en ouvrant la porte à l’ajout de comités ou de sous-comité d’usagers à ce que prévoit son projet de loi.

Le RCPU a aussi demandé à ce que le comité national des usagers puisse avoir l’oreille du ministère et non seulement de Santé Québec afin de pouvoir influencer les orientations en plus des opérations.

Peu importe le résultat net en matière d’espace qu’on leur accorde, les usagers auront toujours, en dernier recours, la possibilité de s’adresser à leur commissaire aux plaintes.

D’ailleurs le président du Regroupement des commissaires aux plaintes et à la qualité du Québec, Jean-Philippe Payment, a rapporté en fin de journée que ses membres accueillaient favorablement leur rôle dans le projet de loi, tout en proposant des pistes d’amélioration pour renforcer et élargir leur capacité d’intervention.

Ils se réjouissent enfin à l’éventualité de se rapporter à un commissaire national ayant une vue d’ensemble sur le réseau.

La Commission de la santé et des services sociaux entendra les prochains intervenants au sujet du projet de loi 15 le 9 mai.

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