L’histoire d’une fillette qui est morte de la grippe aviaire et de son père qui a contracté le virus, au Cambodge, place les autorités en état d’alerte. Pourrait-il s’agir du premier cas documenté de transmission de la H5N1 entre humains ? Les experts d’ici croient qu’il est encore trop tôt pour s’inquiéter.

Deux hypothèses sont à l’étude pour expliquer que deux membres d’une même famille ont contracté la grippe aviaire : soit ils ont tous les deux été en contact avec des oiseaux malades, soit le père a attrapé le virus au chevet de sa fille de 11 ans dont il prenait soin.

« Ils peuvent avoir été exposés au même environnement, et on sait que des oiseaux morts ont été trouvés dans [cette région] », explique le DJasmin Villeneuve, médecin-conseil à l’Institut national de santé publique du Québec pour les dossiers d’infections nosocomiales.

PHOTO DU DÉPARTEMENT DE CONTRÔLE DES MALADIES TRANSMISSIBLES DU CAMBODGE, VIA AGENCE FRANCE-PRESSE

Des habitants de la province cambodgienne de Prey Veng, où une fillette est morte de la grippe aviaire, ont pris part jeudi à une activité de sensibilisation.

« Ou est-ce que le père est devenu positif en s’occupant de sa fille très malade ? Si c’est le cas, ce serait une transmission interhumaine très limitée », précise le DVilleneuve.

On ne parle pas du tout du même mécanisme de transmission que la COVID-19, où simplement en croisant une personne dans une activité sociale, il y a un risque.

Le DJasmin Villeneuve, médecin-conseil à l’Institut national de santé publique du Québec

Douze personnes qui ont eu des contacts avec la fillette malade ont subi un test de dépistage. Sauf chez le père, tous les tests se sont révélés négatifs. L’homme âgé de 49 ans ne présente aucun symptôme de la maladie, a d’ailleurs indiqué un membre du gouvernement cambodgien à l’AFP. Au Cambodge, le dernier cas de grippe aviaire chez l’homme remontait à 2014.

Signes rassurants

Cette fillette de 11 ans qui a présenté des symptômes de fièvre, de toux et de gorge sèche n’est pas le premier cas de grippe aviaire chez l’humain ni le premier décès. Depuis 2000, l’Organisation mondiale de la santé estime que 868 personnes ont attrapé le virus et que 457 en sont mortes. Un seul cas humain de H5N1 a été signalé au Canada en 2014. Le résidant de l’Alberta était mort au retour d’un voyage en Chine.

Le vétérinaire Jean-Pierre Vaillancourt, professeur à l’Université de Montréal, se montre également rassurant. Il doute fort que la souche de la H5N1 qui a rendu l’enfant malade soit celle que l’on retrouve au Canada. Des analyses sont en cours afin de le déterminer.

« Depuis une quinzaine d’années, on a eu cinq ou six souches d’influenza aviaire hautement pathogène qui ont été capables d’infecter des êtres humains dans le monde. Mais dans tous les cas, il n’y a aucun de ces virus qui a réussi à s’adapter pour pouvoir passer entre les humains », note-t-il.

Le Canada touché

Au Canada, la grippe aviaire a fait un retour virulent depuis un an. Au total, 7 174 000 oiseaux de ferme ont dû être euthanasiés, dont 575 000 au Québec. Toutes les provinces ont été frappées par la pandémie à l’exception de l’Île-du-Prince-Édouard.

Ce sont les oiseaux migrateurs qui transportent le virus et qui contaminent l’environnement le plus souvent avec leurs fientes. La maladie a aussi été diagnostiquée au pays chez des mammifères comme des moufettes, des ratons laveurs, des phoques, des ours noirs et des renards.

Le vétérinaire Jean-Pierre Vaillancourt affirme toutefois que les consommateurs ne courent aucun risque en consommant de la volaille achetée dans un magasin d’alimentation si les consignes d’hygiène de base sont respectées. « Les personnes qui ont une basse-cour, les employés d’abattoir et d’élevage devraient se laver les mains très souvent, surtout avant les repas », suggère-t-il.

Si on trouve des oiseaux morts dans l’environnement près de chez soi, c’est important de ne pas y toucher et de ne pas les manipuler.

Le DJasmin Villeneuve, médecin-conseil à l’Institut national de santé publique du Québec

Vendredi, l’OMS a réitéré que le risque demeure « faible » pour l’être humain.

L’Agence de la santé publique du Canada affirme de son côté que l’infection humaine par la H5N1 est rare. « Le risque d’infection est faible pour le grand public qui n’a qu’un contact limité avec des animaux infectés ; les personnes ayant un contact étroit avec des animaux infectés courent un risque accru et doivent prendre les précautions appropriées », a écrit un responsable de l’agence fédérale qui ne s’est pas identifié.

En savoir plus
  • 31
    Nombre de fermes d’élevage touchées par la grippe aviaire au Québec, depuis un an
    12
    Nombre de fermes d’élevage actuellement infectées par la grippe aviaire au Québec
    SOURCE : Agence canadienne d’inspection des aliments