Le bilan du sida s’améliore dans les pays riches, mais certaines minorités continuent à avoir un taux élevé de nouvelles infections. L’heure est maintenant à la modification des approches de traitement et de dépistage pour mieux servir ces patients, constate-t-on à la Conférence internationale sur le sida, au Palais des congrès de Montréal. Au Canada, l’attention est notamment portée sur les Autochtones.

Deux minorités

Le Canada fait du surplace dans la lutte contre le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), déplore la Fondation canadienne de recherche sur le sida (CANFAR). Et cela touche surtout deux minorités : les Autochtones et les Canadiens d’origine caribéenne et subsaharienne. « La pandémie de COVID-19 a beaucoup perturbé les services, particulièrement pour les communautés vulnérables », indique le PDG de CANFAR, Alex Filiatrault. « Plusieurs communautés autochtones ont été confinées de manière plus restrictive que le reste du pays. » Au Québec, les Autochtones sont moins touchés, mais les Noirs davantage : ils formaient 30 % des nouveaux cas de VIH en 2019, en partie parce qu’ils sont souvent originaires de pays où le VIH est endémique. C’est une proportion quatre fois plus élevée que leur poids démographique.

Le « jour du foie »

Le mantra des chercheurs qui adaptent la lutte contre le VIH aux besoins des minorités particulièrement touchées est de leur donner voix au chapitre. « Nous avons travaillé avec des communautés autochtones en Saskatchewan et nous avons trouvé une approche particulièrement efficace, le “jour du foie” », explique Marina Klein, de l’Université McGill. « On mesure la santé du foie des participants, qui est affecté par l’hépatite C. On peut aussi faire d’autres tests, comme pour le VIH et les infections transmissibles sexuellement (ITS), et aussi pour le diabète. C’est une approche qui stigmatise moins les patients infectés. »

Spiritualité

L’autre pilier des programmes VIH pour Autochtones est l’appel à la spiritualité. « Ma grand-mère me disait que ce que je faisais était diabolique parce qu’elle avait été dans un pensionnat autochtone », explique Trevor Stratton, un Ojibwé de la banlieue de Toronto qui collabore avec la CANFAR. « Mais dans la culture traditionnelle, il y a le concept de bispiritualité, qui englobe la fluidité de genre et l’homosexualité. Quand j’ai repris contact avec les aînés de ma communauté, dans les années 1990, ils m’ont aidé à réconcilier ma bisexualité avec mon identité. Ça m’a poussé à me faire tester et traiter pour le VIH. Je travaille maintenant à mettre sur pied des programmes similaires. »

PHOTO TIRÉE DU SITE DE CANFAR

Trevor Stratton à une conférence de UNAIDS à Genève en 2016

Prophylaxie pour les ITS

L’autre approche qui gagne du terrain consiste à lutter contre les ITS de la même manière que contre le VIH : avec la « prophylaxie préexposition » (PrEP, selon l’acronyme anglais). « C’est de plus en plus proposé pour les ITS, avec la prophylaxie post-exposition », confirme la Dre Klein. Comme le port du préservatif n’est plus nécessaire pour se protéger du VIH avec la PrEP, le taux d’ITS a beaucoup augmenté depuis 10 ans parmi les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes.

Une version antérieure de cet article comportait des erreurs sur les statistiques québécoises sur le VIH.

En savoir plus
  • 54 %
    Proportion d’hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes parmi les nouveaux cas de VIH au Québec en 2019
    Source : Institut national de santé publique du Québec
    25 %
    Proportion de femmes parmi les nouveaux cas de VIH au Québec en 2019
    Source : Institut national de santé publique du Québec
  • 1 %
    Proportion de personnes transgenres parmi les nouveaux cas de VIH au Québec en 2019
    Source : Institut national de santé publique du Québec
    1,6 %
    Proportion d’Autochtones parmi les nouveaux cas de VIH au Québec en 2019
    Source : Institut national de santé publique du Québec