(Québec) C’est promis depuis 20 ans, mais la ministre Marguerite Blais assure maintenant que fois-ci, c’est la bonne : les aînés recevront des soins « personnalisés » dans tous les milieux d’hébergement publics. À commencer par déjeuner à l’heure qu’ils souhaitent.

« [On veut] s’adapter à la personne hébergée, et non l’inverse », a résumé la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, Marguerite Blais, qui a dévoilé jeudi son Plan d’action pour l’hébergement de longue durée 2021-2026. Les visées de la ministre, qui quittera la vie politique à la fin de son mandat, s’accompagnent d’investissements de 2,9 milliards sur cinq ans, des sommes déjà annoncées dans le budget.

Québec veut « personnaliser » les soins et services de santé pour « transformer substantiellement » les milieux d’hébergement pour aînés, comme les CHSLD et les ressources intermédiaires (RI). Le gouvernement Legault veut en faire des milieux de vie à l’instar de ce qu’il projette pour ses futures maisons des aînés. Le plan exclut les résidences privées pour aînés, où les usagers sont pour la plupart autonomes.

« On personnalise les soins en fonction de l’histoire de vie, des valeurs, des préférences des personnes hébergées », a illustré la ministre en conférence de presse. « Un exemple tout simple pour l’illustrer : le déjeuner. Il est important de s’adapter à la personne hébergée et de lui offrir le repas du matin à l’heure de son choix […], on veut personnaliser le soin le plus possible », a-t-elle ajouté.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Marguerite Blais, ministre responsable des Aînés et des Proches aidants

Pour y arriver, Québec veut « renforcer » le rôle du préposé aux bénéficiaires et placer la famille et les proches aidants au centre de toutes les décisions visant l’usager, tant « pour la décoration [des lieux] que pour les plans de soins », a précisé Mme Blais.

L’ex-premier ministre Philippe Couillard, alors qu’il était ministre de la Santé sous le gouvernement Charest, avait déposé en 2003 des orientations ministérielles visant à offrir un « milieu de vie de qualité pour les personnes hébergées en CHSLD ». On évoquait alors l’intention « de créer un milieu de vie dans lequel des services et des soins de qualité seront dispensés, en partant des besoins, des goûts, des habitudes et des valeurs des personnes et de leur famille ».

Pourquoi cette fois-ci serait-elle la bonne ? Celle qui a été ministre responsable des Aînés sous la bannière libérale de 2007 à 2012 répond : « En 2003 […], il n’y a pas eu d’argent qui a accompagné la politique, on se comprend ? Là, on vous parle de 2,9 milliards de dollars, donc là, il y a de l’argent, c’est complet », a-t-elle dit.

Je vais quitter bientôt la vie politique, mais je considère que le plan qui a été déposé est un plan pour le présent et pour le futur. On a besoin de changer nos façons de faire […], on l’a vu avec la pandémie.

Marguerite Blais, ministre responsable des Aînés et des Proches aidants

Cette annonce survient le jour même où la protectrice du citoyen a déposé son rapport d’intervention dans les CHSLD du CIUSSS de l’Estrie-CHUS. L’enquête a permis de révéler des « pratiques qui s’apparentaient à de la maltraitance envers les personnes hébergées », puisque des demandes comme aller aux toilettes ou avoir une collation pouvaient demeurer sans réponse. L’établissement a accepté toutes les recommandations.

La loi de Mme Blais visant à renforcer la lutte contre la maltraitance envers les aînés est par ailleurs entrée en vigueur le 6 avril dernier.

Embauche de personnel

La part du lion des 2,9 milliards ira d’ailleurs à l’embauche de personnel. Québec veut notamment poursuivre son plan de doter chaque CHSLD d’un gestionnaire, un engagement pris au sortir de la première vague de la pandémie, en 2020. Pour l’heure, 280 gestionnaires ont été embauchés, et le plan du gouvernement en prévoit 370, ce qui exclut ceux des futures maisons des aînés.

On recherche aussi 67 chargés de projet qui s’assureront de la mise en œuvre du plan d’action sur le terrain. Québec veut aussi engager 200 pharmaciens pour assurer une utilisation optimale des médicaments en CHSLD et une vingtaine de dentistes, 30 denturologistes et 60 hygiénistes dentaires pour déployer le Programme québécois de soins buccodentaires et de soins d’hygiène quotidiens de la bouche en CHSLD.

« Si on veut être en mesure d’implanter cette nouvelle culture, on a besoin de plus de personnel », a indiqué la ministre, sans préciser où ces travailleurs seraient dénichés dans le contexte de pénurie de main-d’œuvre.

Québec entend néanmoins maintenir son programme accéléré de formation de préposés en CHSLD et compte sur l’arrivée d’infirmières auxiliaires aussi au moyen d’une formation accélérée.

Il faut rappeler que le ministère de la Santé et des Services sociaux prévoit embaucher de 3000 à 4000 travailleurs de la santé additionnels pour l’exploitation de ses 46 maisons des aînés et maisons alternatives.

Le plan de Marguerite Blais déposé jeudi découle de la Politique d’hébergement et de soins et services de longue durée présentée il y a un an.