Un enfant des Laurentides a contracté une infection grave causée par un parasite qui se retrouve sous forme d'oeufs présents dans les excréments de renards, de coyotes, de loups et de chiens domestiques.

Il s'agit du premier cas d'échinococcose alvéolaire (EA) signalé au Québec, selon les autorités de santé publique qui ont enquêté sur la source de l'infection.

Les conséquences auraient pu être funestes pour le jeune Québécois.

« Selon la littérature, en l'absence de traitement, cette infection est fatale dans 90 % des cas dix ans après le diagnostic », explique la Dre Geneviève Perreault de la Direction de santé publique des Laurentides en entrevue à La Presse.

Cette infection parasitaire se caractérise par une période d'incubation longue, soit de 5 à 15 ans.

Le malade atteint perd alors du poids et souffre de douleurs abdominales, d'un malaise général et d'une insuffisance hépatique.

Des métastases larvaires peuvent ensuite se propager vers d'autres organes, comme la rate, les poumons et le cerveau.

La direction de la santé publique des Laurentides a été alertée au printemps dernier après que l'enfant eut consulté un médecin pour de la fatigue, une atteinte au foie et un faible poids pour son âge.

L'enfant a passé des examens d'imagerie médicale - échographie et tomographie - qui ont révélé une masse volumineuse au foie. Après avoir fait une biopsie de l'organe, son médecin a posé un diagnostic d'EA.

Comme c'est la première fois qu'un médecin voyait cela au Québec, l'équipe traitante a envoyé le dossier de l'enfant à une équipe française spécialisée qui a confirmé le diagnostic et proposé un traitement aux antiparasitaires pendant un an.

Enquête de la santé publique

L'enquête de la santé publique, elle, ne faisait que commencer. « Ce qui nous préoccupait, c'était de découvrir si la maladie avait été acquise au Québec ou à l'étranger, explique la Dre Perreault, dans le but de savoir s'il se passait quelque chose avec notre faune. »

Comment l'enfant a-t-il pu contracter cette maladie rare chez l'humain ? se sont demandé les autorités de santé publique. En effet, cette maladie ne se transmet pas de personne à personne.

« Ça ne s'attrape pas facilement. L'humain est un hôte accidentel. »

- La Dre Geneviève Perreault, médecin spécialiste en médecine préventive et en santé publique

Les canidés sauvages comme les renards, les coyotes et les loups constituent le principal réservoir de l'infection. Toutefois, les chiens domestiques et, plus rarement, les chats peuvent aussi être des hôtes de l'infection, explique la Dre Perreault.

L'humain doit avoir ingéré accidentellement des oeufs présents dans les excréments de ces bêtes pour être infecté. Les oeufs sont très résistants et peuvent vivre jusqu'à un an dans un sol frais et humide. Une transmission par la consommation de légumes, de petits fruits ou d'eau non traitée est aussi possible. D'autres sources, comme la terre et les carrés de sable, ont été identifiées, mais sont moins probables.

Dans certaines régions du monde, particulièrement en Europe, en Chine, au Japon et en Amérique du Nord, l'EA est présente chez les canidés de façon « endémique ».

Plus près de chez nous, en Ontario, l'EA a été diagnostiquée chez des chiens domestiques, et le parasite a été identifié chez des renards et des coyotes dans le sud de la province. De rares cas d'infections chez des humains ont été rapportés en Alberta (cinq cas) et au Manitoba (au moins un).

Maladie acquise au Québec

Or, l'enfant des Laurentides n'avait jamais voyagé à l'extérieur du Québec, ont découvert les autorités de santé publique. Autre indice : la maison de l'enfant est située près d'un parc national. Des renards sont fréquemment aperçus sur son terrain. Un potager y est cultivé depuis plusieurs années.

Le chien de la famille, mort il y a deux ans sans diagnostic précis, aurait aussi pu infecter l'enfant puisque la bête aimait se rouler dans les carcasses de lièvres et de rongeurs.

Toutes ces informations permettent de croire que la maladie a été acquise au Québec, conclut la Dre Perreault.

La thèse du sol contaminé par les renards est la plus probable, selon elle.

« L'infection serait alors attribuable au chien domestique, qui aurait été en contact avec les selles des renards ou encore avec des rongeurs infectés - des hôtes intermédiaires du parasite. »

- La Dre Geneviève Perreault

L'enfant a aussi pu contracter le parasite après avoir consommé des petits fruits ou des légumes du jardin contaminés par les excréments des renards.

Aucun autre membre de la famille n'a été infecté.

Comme l'EA n'est pas une maladie à déclaration obligatoire au Québec, les autorités de santé publique ont alerté le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs et celui de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour qu'ils fassent preuve d'une vigilance accrue face à cette maladie.

« On va suivre son évolution dans l'environnement », conclut la Dre Perreault, qui rappelle que des mesures simples de prévention peuvent être mises en place, comme clôturer son terrain pour empêcher les animaux sauvages d'y accéder, éviter de nourrir lesdites bêtes, bien se laver les mains après avoir touché à un animal ainsi que laver les fruits et les légumes des potagers avant de les manger.