Le Parti libéral devrait mener une enquête interne sur les allégations de corruption et de financement illégal à son sujet. Et il devrait s'excuser d'avoir laissé les «bandits faire le sale travail», tonne Bernard Drainville, ministre des Institutions démocratiques.

Les députés péquistes sont en réunion aujourd'hui en prévision de la prochaine session parlementaire. Mais devant les journalistes, ils ont surtout parlé de la commission Charbonneau et du précédent gouvernement.

Ils ont demandé au libéraux de s'excuser pour avoir refusé pendant deux ans de créer une commission d'enquête comme le réclamaient une majorité de Québécois de même que les deux regroupements de municipalités, les syndicats de policiers, le Barreau du Québec et les associations d'ingénieurs, sans oublier tous les partis de l'opposition à Québec et la Ville de Montréal.

« Il n'est pas question de nous excuser, a répliqué le député libéral Marc Carrière. On regarde les résultats que ça donne aujourd'hui, et je crois que le ménage est en train de se faire. Ce sont les lois qu'on a faites, les conditions qu'on a mises de l'avant, l'UPAC, etc., qui font en sorte que ça donne des résultats aujourd'hui.»

Le porte-parole libéral en matière d'affaires municipales a fait valoir que le gouvernement Charest a adopté des lois pour lutter contre la corruption et la collusion et qu'il a mis sur pied l'UPAC avant de créer de la commission Charbonneau. «C'est facile pour le Parti québécois de chialer aujourd'hui, mais on a tout mis en place», a-t-il lancé.

Il a assuré que les policiers « avaient les mains libres » pour mener leurs enquêtes à Laval lorsque le Parti libéral était au pouvoir.



Des centaines de millions perdus, accusent les péquistes


«C'est très dommage que (les libéraux) ne s'excusent pas, parce que ce sont les Québécois qui ont payé pour le fait qu'ils n'ont pas pris les décisions au moment où c'était opportun, a déclaré la première ministre Pauline Marois. Ils auraient pu  prendre la décision de créer une commission, de mandater la commissaire il y a trois ans déjà. Ils ne le l'ont pas fait, et ils sont responsables en partie de ce qui se passe.»

M. Drainville a été plus cinglant: «S'ils ne s'excusent pas, on va continuer à demander qu'ils s'excusent demain et après-demain, jusqu'à ce qu'ils le fassent. Parce qu'ils devraient être gênés, ils devraient avoir honte de nous avoir mis dans le pétrin et d'avoir laissé les bandits et les entrepreneurs véreux faire le sale boulot qu'ils ont fait. On a perdu deux ans parce qu'ils ont refusé de créer la commission d'enquête alors qu'il y avait des reportages qui démontraient qu'il y avait un système de corruption et de collusion.»

M. Drainville note que les libéraux sont les seuls à ne pas appuyer sa proposition de plafonner à 100$ les dons annuels aux partis politiques provinciaux.

Ce retard a eu des conséquences très tangibles, a soutenu Jean-François Lisée, ministre responsable de la métropole. «Depuis 2003, le bon temps roulait, comme disent les Louisianais, pour la corruption. Les membres du gouvernement libéral de l'époque devraient commencer à avoir honte et dire qu'ils doivent faire enquête. Pourquoi n'y a-t-il pas enquête interne au Parti libéral en ce moment?»

Il accuse les libéraux d'avoir contribué au gaspillage des fonds publics. «Il est très clair que si les libéraux avaient répondu à la demande massive des Québécois, du Parti québécois, des journalistes et de l'ADQ de créer, il y a deux ans, une commission d'enquête, on serait bien plus avancé aujourd'hui. Les contribuables auraient économisé des centaines de millions de dollars. C'est une certitude. Et le crime organisé serait moins riche qu'il ne l'est.»

En fait, selon le témoignage de Lino Zambito, le prix des travaux à Montréal a chuté après que le gouvernement a créé l'escouade Marteau en 2009, soit deux ans avant la mise sur pied de la commission Charbonneau. Jacques Duchesneau, député caquiste et ancien chef de l'Unité anticollusion, a affirmé la même chose en juin dernier devant la commission Charbonneau. «Les entrepreneurs soumissionnent actuellement 17,2% en dessous des coûts de 2010. Maintenant, ils ont le réflexe. C'est l'effet Marteau. En 18 mois, 347 millions ont été épargnés. Ils se sont gardé une petite gêne», a déclaré M. Duchesneau.



Lisée fait confiance à son sous-ministre


Jean-François Lisée a demandé à son sous-ministre André Lavallée d'offrir sa collaboration à la commission Charbonneau. M. Lavallée, ancien numéro 3 de la ville de Montréal, avait été nommé directeur de cabinet de Gérald Tremblay en 2009. Il a aussi été responsable du plan de transport au comité exécutif. M. Lisée l'a recruté en septembre.

Dès sa nomination, M. Lisée a dit à M. Lavallée : «Si vous avez quoi que ce soit à dire à la commission Charbonneau, appelez-les tout de suite et dites ce que vous savez, ce que vous pensez savoir ou ce que vous avez entendu dire.» M. Lavallée a communiqué avec la Commission, mais il n'a «pas eu d'échos», a déclaré peu après l'attachée de presse de M. Lisée, Christine Fréchette.