Le ministre de la Défense, Peter MacKay, a été contraint hier de défendre les coûts élevés de la mission des quelque 2500 soldats canadiens en Afghanistan alors que près de 250 000 Canadiens ont perdu leur emploi depuis le début de la récession.

Des députés de l'opposition ont soutenu qu'il est difficile de justifier les milliards de dollars investis dans cette mission depuis 2002 au moment même où le taux de chômage augmente au pays, les entreprises font des licenciements ou ferment carrément leurs portes et que la crise économique ne fait que commencer.

 

Ces mêmes députés ont dit douter que la mission soit couronnée de succès. Selon eux, les progrès sur le terrain en Afghanistan sont mitigés puisque les talibans insurgés représentent toujours une menace à la fois pour les troupes canadiennes et la population locale. En tout, 108 soldats, deux travailleuses humanitaires et un diplomate canadiens ont perdu la vie depuis le début de cette mission.

Entre 14 et 18 milliards

«L'escalade des coûts est un grand enjeu pour beaucoup de Canadiens en ces temps de crise économique», a affirmé la députée néo-démocrate Dawn Black, après que le ministre MacKay eut indiqué que la mission coûtera 331 millions de dollars de plus que prévu cette année.

«On n'a pas fait beaucoup de progrès en Afghanistan. Cette mission est une espèce de trou sans fond dans lequel s'enfonce le Canada», a dit pour sa part le député bloquiste Claude Bachand, soulignant que le ministère de la Défense avait réclamé des sommes supplémentaires pour couvrir les dépenses imprévues chaque année depuis le début de la mission.

Selon les calculs du directeur parlementaire du budget, Kevin Page, la mission canadienne en Afghanistan aura coûté entre 14 et 18 milliards de dollars une fois que les troupes canadiennes auront été retirées de ce pays ravagé par des décennies de guerre en 2011.

Le Canada devait mettre fin à cette mission, à laquelle participent 41 pays, en février 2009, mais le gouvernement Harper a obtenu l'appui des libéraux l'an dernier pour la prolonger de deux autres années.

Le NPD réclame toujours le retrait immédiat des troupes canadiennes, tandis que le Bloc québécois souhaitait que la mission prenne fin comme prévu en 2009.

Les partis de l'opposition ont profité du passage du ministre Peter MacKay devant le comité de la défense de la Chambre des communes pour critiquer les coûts de la mission.

M. MacKay a convenu que cette mission coûtait cher aux contribuables, mais il a affirmé que la présence des soldats canadiens dans la région de Kandahar est nécessaire, non seulement pour la sécurité de la population afghane, mais aussi pour la sécurité du Canada.

«Kandahar est l'endroit où les talibans ont vu le jour. C'est l'incubateur du terrorisme», a affirmé le ministre. Il a aussi expliqué que les coûts de la mission ont augmenté puisque la mission elle-même a changé depuis 2002. Au début, les soldats canadiens patrouillaient les routes de Kaboul, capitale de l'Afghanistan. Mais depuis 2005, ils sont affectés à la région la plus dangereuse du pays, Kandahar.

«Nous devons nous adapter aux nouvelles circonstances. Les défis en matière de sécurité à Kandahar sont totalement différents de ceux de la région de Kaboul», a dit le ministre.

M. MacKay a aussi soutenu que les soldats doivent avoir les moyens et l'équipement militaire requis pour assurer la sécurité de la population afghane afin de pouvoir reconstruire le pays.

Devant les journalistes plus tard, le ministre a soutenu qu'une mission militaire est, par définition, coûteuse, surtout quand l'ennemi utilise des tactiques sournoises pour attaquer le travail des soldats.

«Notre présence là-bas nous permet de défendre la cause dans laquelle nous croyons, de protéger les citoyens de l'Afghanistan et d'assurer notre propre sécurité. L'Afghanistan a été le plus grand exportateur du terrorisme de notre vie. Alors, nos efforts pour assurer une certaine sécurité et la démocratie continuent d'être une cause noble et valable», a dit le ministre.

Victoire des femmes

M. MacKay a souligné que le simple fait que des centaines de milliers de jeunes filles puissent aller à l'école aujourd'hui -ce qui était interdit à l'époque du régime des talibans- est un progrès fort important.

La mission en Afghanistan sera l'un des sujets à l'ordre du jour à l'occasion de la visite officielle du président des États-Unis, Barack Obama, à Ottawa le 19 février.

Le nouveau président s'est engagé durant la campagne présidentielle à déployer environ 20 000 soldats de plus en Afghanistan. Les États-Unis ont présentement un contingent de 34 000 soldats en sol afghan.